Plus explicite encore,le 22 décembre dernier à l’Assemblée nationale,
la députée socialiste Pascale Crozon lança :
"Non,l’idée selon laquelle les hommes ne naissent pas libres et égaux n’est pas
une opinion dont nous devrions garantir la liberté.
Elle est la négation de nos valeurs et principes fondamentaux, un cancer qui
menace la cohésion nationale et l’ordre public "[
48].
Parce que le racisme est « la négation même de démocratie »,
« la négation de nos valeurs et principes fondamentaux », il est intolérable,
donc il ne doit pas pouvoir s’exprimer…
Cela au nom même des libertés démocratiques garanties par les droits de l’homme.
Bel exemple de paradoxe !
« Hors des droits de l’homme, point de salut »
Finalement, ce « bien public » invoqué par T. Todorov passe par la démocratie fille
naturelle des droits de l’homme. D’où le principe central du « politiquement correct » :
hors des droits de l’homme, point de salut.
Un principe exprimé dans le Préambule de la Déclaration universelle
Sans surprise, ce principe était clairement affirmé dans la Déclaration universelle
du 10 décembre 1948 dont le préambule déclarait :
Considérant que la méconnaissance et le mépris des droits de l’homme ont conduit
à des actes de barbarie qui révoltent la conscience de l'humanité […][
49].
Cette affirmation faisait écho au préambule de la Constitution française
du 27 octobre 1946 (implicitement repris dans celui de la Constitution
du 4 octobre 1958) :
Au lendemain de la victoire remportée par les peuples libres sur les régimes qui
ont tenté d'asservir et de dégrader la personne humaine, le peuple français proclame
à nouveau que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance,
possède des droits inaliénables et sacrés. Il réaffirme solennellement les droits
et libertés de l'homme et du citoyen consacrés par la Déclaration des droits
de 1789 et les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République[
50].
Un avertissement solennel : droits de l’homme ou barbarie
Ces phrases résonnaient et résonnent encore comme un avertissement :
« Attention ! Ce sont les droits de l’homme ou la barbarie ».
Dès lors, une seule voie s’offre à l’humanité : l’adoption et la défense
les droits de l’homme. Le préambule de la Déclaration universelle
du 10 décembre 1948 l’affirme sans détour :
Considérant qu'il est essentiel que les droits de l’homme soient protégés
par un régime de droit pour que l'homme ne soit pas contraint, en suprême recours,
à la révolte contre la tyrannie et l'oppression.
[…]
Considérant que les États Membres se sont engagés à assurer, en coopération
avec l'Organisation des Nations Unies, le respect universel et effectif des droits
de l’homme et des libertés fondamentales.
[…]
L'Assemblée Générale proclame la présente Déclaration universelle des droits
de l’homme comme l'idéal commun à atteindre par tous les peuples et toutes
les nations afin que tous les individus et tous les organes de la société,
ayant cette Déclaration constamment à l'esprit, s'efforcent, par l'enseignement
et l'éducation, de développer le respect de ces droits et libertés et d'en assurer,
par des mesures progressives d'ordre national et international, la reconnaissance
et l'application universelles et effectives, tant parmi les populations des États
Membres eux-mêmes que parmi celles des territoires placés sous leur juridiction.
[
51].
Les limites à la Liberté pour protéger les droits de l’homme
Les articles 29 et 30 de la Déclaration universelle
La conclusion logique de ce préambule est capitale : seuls peuvent invoquer
les droits de l’homme les partisans des droits de l’homme.
D’où les deux derniers articles de la Déclaration universelle qui prévoient
toutes les limitations possibles aux droits de l’homme afin de les protéger
et de protéger en même temps leur fille naturelle, la démocratie :
Article 29
[…]
2. Dans l'exercice de ses droits et dans la jouissance de ses libertés, chacun
n'est soumis qu'aux limitations établies par la loi exclusivement en vue d'assurer
la reconnaissance et le respect des droits et libertés d'autrui et afin de satisfaire
aux justes exigences de la morale, de l'ordre public et du bien-être général
dans une société démocratique.
3. Ces droits et libertés ne pourront, en aucun cas, s'exercer contrairement
aux buts et aux principes des Nations Unies.
Article 30
Aucune disposition de la présente Déclaration ne peut être interprétée comme
impliquant pour un État, un groupement ou un individu un droit quelconque
de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits
et libertés qui y sont énoncés[
52].
C’est clair : pas de droits de l’homme pour les ennemis de ces droits et de la démocratie.
Nous retrouvons là le principal paradoxe du discours laïc…
Des textes européens promettent monts et merveilles…
Sans surprise, ces restrictions paradoxales se retrouvent dans les textes européens.
Considérons tout d’abord la Charte des Droits fondamentaux de l’Union européenne,
parue le 18 décembre 2000 au Journal officiel des Communautés européennes[
53].
Ses articles 11, 12, 13, 47, 48 et 49 nous promettent monts et merveilles :
Chapitre II
Libertés
Article 11
Liberté d'expression et d'information
1. Toute personne a droit à la liberté d'expression.
Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer
des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques
et sans considération de frontières.
2. La liberté des médias et leur pluralisme sont respectés.
Article 12
Liberté de réunion et d'association
1. Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association
à tous les niveaux […].
Article 13
Liberté des arts et des sciences
Les arts et la recherche scientifique sont libres. La liberté académique est respectée.
[ibid., C 364/11]
CHAPITRE VI
Justice
Article 47
Droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial
Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l'Union ont été
violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions
prévues au présent article.
Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement
et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement
par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter.
[…]
Article 48
Présomption d'innocence et droits de la défense
1. Tout accusé est présumé innocent jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.
2. Le respect des droits de la défense est garanti à tout accusé.
Article 49
Principes de légalité et de proportionnalité des délits et des peines
[…]
3. L'intensité des peines ne doit pas être disproportionnée par rapport à l'infraction
[ibid., C 364/20].
… mais les fondements de l’Europe sont rappelés…
Mais attention:l’Europe repose sur les droits de l’homme et leur fille naturelle,démocratie.
C’est ce qu’énonce l’article 6, § 1, du traité sur l’Union européenne dont voici le texte :
1. L'Union est fondée sur les principes de la liberté, de la démocratie, du respect
des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ainsi que de l'État de droit,
principes qui sont communs aux États membres.
Cet article est davantage développé dans le préambule de la Charte des Droits
fondamentaux de l’Union européenne. On lit (je souligne) :
Préambule
[…] l'Union se fonde sur les valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine,
de liberté, d'égalité et de solidarité ; elle repose sur le principe de la démocratie
et le principe de l'État de droit. Elle place la personne au cœur de son action en instituant
la citoyenneté de l'Union et en créant un espace de liberté, de sécurité et de justice.
… pour justifier des limitations aux libertés
Par conséquent, l’exercice des droits ne peut se faire que dans une perspective
purement « démocratique ».
L’article 52.2 de la Charte des Droits fondamentaux de l’Union européenne précise :
Les droits reconnus par la présente Charte qui trouvent leur fondement dans
les traités communautaires ou dans le traité sur l'Union européenne s'exercent
dans les conditions et limites définies par ceux-ci [ibid., C 364/21].
D’où cet article 54 :
Interdiction de l'abus de droit
Aucune des dispositions de la présente Charte ne doit être interprétée comme
impliquant un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir
un acte visant à la destruction des droits ou libertés reconnus dans la présente
Charte ou à des limitations plus amples des droits et libertés que celles qui
sont prévues par la présente Charte. (voir le document original)
La portée réelle de l’arrêt Handyside
Dans l’arrêt Handyside rendu en 1976 et dont il a déjà été question, les juges
n’avaient pas manqué de rappeler cette réalité. A l’adresse de tous les « mal pensants »,
ils avaient écrit :
Son rôle de surveillance commande à la Cour de prêter une extrême attention
aux principes propres à une « société démocratique ».
La liberté d'expression constitue l'un des fondements essentiels de pareille société,
l'une des conditions primordiales de son progrès et de l'épanouissement de chacun.
Sous réserve du paragraphe 2 de l'article 10 (art. 10-2), elle vaut non seulement
pour les « informations » ou « idées » accueillies avec faveur ou considérées
comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent,choquent
ou inquiètent l'État ou une fraction quelconque de la population.
Ainsi le veulent le pluralisme, la tolérance et l'esprit d'ouverture sans lesquels il n'est pas
de « société démocratique ».
Il en découle notamment que toute « formalité », « condition », « restriction »
ou « sanction » imposée en la matière doit être proportionnée au but légitime poursuivi
[
54].
En clair, la Cour déclarait que si l’on protégeait la liberté d’expression, c’était au nom
de la démocratie. Dès lors et conformément à la logique, la liberté d’expression
ne doit pas permettre de mettre en danger la démocratie.
Un message repris par les élus
Lors des débats sur le projet de loi antirévisionniste, ce message fut répété plusieurs fois.
G. Allouche déclara :
Le seul véritable seuil de tolérance atteint dans notre pays n'est-il pas celui des 15 %
de Français qui votent librement, sans gêne et sans honte, pour la haine, l'exclusion,
la xénophobie et l'antisémitisme ? Depuis quand la démocratie tolère-t-elle
qu'on offre un débouché à la haine ? Le philosophe Milan Kundera parle d'or lorsqu'il dit :
« En 1990, la démocratie est l'alliée de ses propres fossoyeurs. »
S'accommodera-t-on, sans trouble aucun et pour longtemps, d'un racisme sans fard,
banalisé à force d'être répété et amplifié, voire suscité par les médias ?
Alors que la liberté d'expression a pour limites certaines valeurs essentielles
et le respect des droits d'autrui, n'est-ce pas au nom d'une perversion de cette liberté
que s'expriment aujourd'hui, dans le registre de l'opinion, racisme et antisémitisme ?
Avons-nous déjà oublié que c'est au nom de la démocratie, du suffrage universel
et de la liberté d'expression qu'Hitler est arrivé au pouvoir ? [
55]
(voir le document)
Et aussi :
[…] lorsqu'il se fait militant et prédateur, le racisme met en cause la paix civile.
Procédant de la volonté d'exclusion d'autrui, incompatible avec l'idée même
de démocratie, il met en danger les fondements ultimes de l'existence sociale.
Si l'on admet que la France est une société où doivent coexister plusieurs communautés
se référant à des valeurs philosophiques et à des religions différentes, le législateur
et le juge ne peuvent admettre que l'une ou l'autre de ces communautés prétendent
exercer une quelconque hégémonie, ni que les valeurs ou modes de vie soient diffamés.
Cette attitude est commandée autant par le respect de la Déclaration des droits
de l’homme et du citoyen que par la nécessité de maintenir la paix civile
[ibid., p. 1453, col. B.].
D’où cette conclusion :
Si l'on admet tous que le racisme est un délit et non une opinion, il n'est plus possible
de s'abriter derrière la liberté d'expression et derrière certains articles de la loi de 1881
[ibid., p. 1454, col. A].
Peu après, le garde des sceaux P. Arpaillange confirma en expliquant :
Le racisme n'est pas, comme je l'ai entendu dire tout à l'heure, je ne sais quel
sentiment exacerbé d'une différence. Le racisme est une agression et non une opinion ;
pis, le racisme est une théorie de l'agression.
C'est pourquoi il faut le combattre sur plusieurs modes différents : idéologiquement,
par la transformation des esprits et l'éducation, ce que nombre d'entre vous
ont souligné aujourd'hui ; politiquement, en s'attaquant aux raisons profondes
qui font qu'il peut se développer sur certains terrains, par une politique résolue d'intégration;
pénalement, enfin, car le racisme, lorsqu'il s'exprime, met toujours gravement
en cause l'ordre public, et la liberté d'opinion ou d'expression n'a rien à y voir[
56].
(voir le document)
Les limites inévitables prévues dans les articles 10 et 11
D’où toutes ces limitations au nom des « valeurs » des droits de l’homme
et de la démocratie. Citons par exemple la Convention européenne de sauvegarde
des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Les articles 10 et 11 stipulent :
Article 10
Liberté d'expression
Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion
et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans
qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière.
Le présent article n'empêche pas les États de soumettre les entreprises de radiodiffusion,
de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations.
L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut
être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues
par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique,
à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense
de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale,
à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation
d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire.
Article 11
Liberté de réunion et d'association
Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association,
y compris le droit de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier à des syndicats
pour la défense de ses intérêts.
L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui,
prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique,
à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention
du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits
et libertés d'autrui. Le présent article n'interdit pas que des restrictions légitimes
soient imposées à l'exercice de ces droits par les membres des forces armées,
de la police ou de l'administration de l'État.
(voir ces deux articles : art 10, art 11)
L’ombre du révolutionnaire Saint-Just
Là encore, ces restrictions sont justifiées par un autre article qui, dans une version
plus juridique, reprend le cri du révolutionnaire Louis Antoine de Saint-Just :
« Pas de liberté pour les ennemis de la Liberté ».
Il s’agit de l’article 17 qui énonce :
Interdiction de l'abus de droit Aucune des dispositions de la présente Convention ne peut être interprétée
comme impliquant pour un État, un groupement ou un individu, un droit quelconque
de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits
ou libertés reconnus dans la présente Convention ou à des limitations plus amples
de ces droits et libertés que celles prévues à ladite Convention.
(voir cet article)
D’où cet appel,logique,de G. Allouche,à déclarer les « racistes impénitents » inéligibles :
la sanction par l'inéligibilité, aggravée en cas de récidive par la perte des droits civiques,
peut avoir un caractère à la fois symbolique et dissuasif.
En effet, est-il nécessaire de rappeler dans cette enceinte que se présenter au suffrage
de ses concitoyens postule que l'on a fait sien le principe de coexistence ?
On ne peut être élu pour légiférer dans l'intention de discriminer et de rejeter,
car c'est contraire à l'esprit et à la lettre de notre loi fondamentale [
57].
La démocratie n’est que pour les démocrates,tel était ici le message… Un principe ancré dans les esprits
L’affirmation selon laquelle la liberté d’expression doit être limitée est tellement ancrée
dans les esprits que le 22 décembre dernier, le député U.M.P.
François Rochebloine n’a pas hésité à interrompre son collègue Christian Vanneste qui,
au nom de la liberté d’expression, déclarait « malvenu » le projet de loi pénalisant
la contestation de tous les génocides reconnus par la France.
Voici ce que l’on put entendre :
M. le président. La parole est à M. Christian Vanneste.
M. Christian Vanneste.
Monsieur le président, mes chers collègues,je ne voterai personnellement ni pour
ni contre ce texte,car j’estime qu’il est malvenu.
Il est malvenu pour deux raisons.
La première vient d’être rappelée : c’est une atteinte à la liberté d’expression,…
M. François Rochebloine. On ne peut pas tout dire ![
58]
Citons également Sylvie Andrieux qui, peu auparavant, avait lancé avec raison :
La liberté d'expression et d'opinion est aussi parfois invoquée pour combattre la loi.
Mais personne, à notre connaissance, ne conteste celle de 1972 qui fait du racisme
un délit, pas plus que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme
et des libertés fondamentales, qui précise dans son article 10, relatif à la liberté d’expression :
« L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être
soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi,
qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique […] ».
De même, la loi sur la presse de 1881 qui protège de la diffamation n’est pas contestée [id.].
Le cœur du problème : les révisionnistes sapent les fondements des droits de l’homme.
La mise en garde de G. Allouche en 1990
Ces quelques développements permettent de comprendre pourquoi la tolérance
démocratique reste réservée aux partisans des droits de l’homme.
Sauf bouleversement, les révisionnistes n’ont donc aucun espoir d’en bénéficier,
car en contestant l’existence des « actes de barbarie qui révoltent la conscience
de l'humanité », ils remettent en cause la légitimité des droits de l’homme telle
qu’elle est exposée dans le préambule de la Déclaration universelle du 10 décembre 1948
(« Considérant que la méconnaissance et le mépris des droits de l’homme ont conduit
à des actes de barbarie qui révoltent la conscience de l'humanité… »).
Le 11 juin 1990, G. Allouche invoqua de manière implicite cet argument lorsqu’il lança :
Le fondement de cette incrimination [contestation de crime contre l’Humanité]
se trouve dans la Constitution elle-même, puisque le préambule de la Constitution
de 1946 commence ainsi : « Au lendemain de la victoire remportée par les peuples
libres sur les régimes qui ont tenté d'asservir et de dégrader la personne humaine... ».
« Sans la mémoire, la vérité devient mensonge, car elle ne prend que le masque
de la vérité, et qu'est-ce qu'un témoin sans mémoire ? »
Ajoutons qu'il n'est pas d'avenir se fondant sur un refoulement du passé,
ni de pardon qui passe par l'oubli des victimes.
Comment ne pas penser aux millions de juifs, de tziganes, de francs-maçons,
de communistes, de démocrates et de résistants qui trouvèrent l'ultime force de graver,
avec leurs ongles, dans les fours crématoires et les chambres à gaz, ces mots terribles :
« N'oubliez jamais »,en guise d'appel à l'humanité !
Tenter de les oublier, n'est-ce pas, aujourd'hui, les tuer une seconde fois ?[
59].
(voir le document)
L’arrêt Garaudy en 2003
Treize ans plus tard, la Cour européenne des droits de l’homme l’utilisa à son tour
de façon un peu plus explicite. Dans l’arrêt Garaudy déjà cité, on lit
(je souligne) :
Or,il ne fait aucun doute que contester la réalité de faits historiques clairement établis,
tels que l'Holocauste,comme le fait le requérant dans son ouvrage,ne relève
en aucune manière d'un travail de recherche historique s'apparentant à une quête
de la vérité.
L'objectif et l'aboutissement d'une telle démarche sont totalement différents,
car il s'agit en fait de réhabiliter le régime national-socialiste,et,par voie
de conséquence,d'accuser de falsification de l'histoire les victimes elles-mêmes.
Ainsi, la contestation de crimes contre l'humanité apparaît comme l'une des formes
les plus aiguës de diffamation raciale envers les Juifs et d'incitation à la haine à leur égard.
La négation ou la révision de faits historiques de ce type remettent en cause
les valeurs qui fondent la lutte contre le racisme et l'antisémitisme et sont de nature à troubler gravement l'ordre public.
Portant atteinte aux droits d'autrui, de tels actes sont incompatibles
avec la démocratie et les droits de l’homme et leurs auteurs visent incontestablement
des objectifs du type de ceux prohibés par l'article 17 de la Convention.
La Cour considère que la plus grande partie du contenu et la tonalité générale
de l'ouvrage du requérant, et donc son but, ont un caractère négationniste
marqué et vont donc à l'encontre des valeurs fondamentales de la Convention,
telles que les exprime son Préambule, à savoir la justice et la paix.
Elle considère que le requérant tente de détourner l'article 10 de la Convention
de sa vocation en utilisant son droit à la liberté d'expression à des fins contraires
à la lettre et à l'esprit de la Convention.
De telles fins,si elles étaient admises, contribueraient à la destruction
des droits et libertés garantis par la Convention.En conséquence, la Cour estime qu'en vertu des dispositions de l'article 17
de la Convention, le requérant ne peut pas se prévaloir des dispositions de l'article 10
de la Convention en ce qui concerne les éléments relevant de la contestation
de crimes contre l'humanité[
60].
Dans ce long passage, la phrase capitale est :
« La négation ou la révision de faits historiques de ce type remettent en cause
les valeurs qui fondent la lutte contre le racisme et l'antisémitisme et sont
de nature à troubler gravement l'ordre public. »
Le message est clair :
- si le révisionnisme est vrai,alors le préambule de la Déclaration universelle
des droits de l’homme s’effondre et c’est tout qui est remis en cause…
Les aveux récents Les aveux les plus nets furent formulés le 22 décembre dernier par deux sénateurs
centristes :
- François Rochebloine qui, dans son intervention à propos du projet de loi réprimant
tous les génocides reconnus par la France, expliqua (je souligne) :
Il y a un trouble, une atteinte grave à la démocratie quand on nie l’existence
des pratiques génocidaires. En effet, ces pratiques sont manifestement contraires
aux droits de l’homme tels qu’ils sont reconnus par les sociétés civilisées et constatés
dans des déclarations universelles obligatoires en droit international.
En niant leur caractère de génocide, on affaiblit du même coup la portée
de ces déclarations de droits et des garanties qu’elles présentent
pour les citoyens.On porte ainsi atteinte à la démocratie elle-même.
Cela ne peut être toléré par une société soucieuse de son avenir et de sa cohésion
dans le respect des libertés fondamentales [
61].
- Jean-Christophe Lagarde qui,à la même occasion, déclara (je souligne) :
"Le maire de Drancy que je suis peut le dire : lorsqu’on fait visiter les camps d’extermination
à des groupes de jeunes et que ceux-ci, qui ne sont pas seulement d’origine turque,
émettent un doute sur le génocide juif, lorsque des enfants, à Auschwitz, peuvent
se mettre à rire, cela signifie que nous n’avons pas fait non seulement
notre travail d’enseignement, mais aussi notre travail de lutte contre des gens
cherchant à diffuser, à travers le révisionnisme et le négationnisme, une propagande
qui vise à nier les principes les plus fondamentaux des droits de l’homme,
auxquels nous sommes attachés. "(Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes
U.M.P. et N.C. et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) [id.]
Au nom de la liberté, pas de liberté pour les « négationnistes »
Voilà pourquoi J. Fraysse-Cazalis a pu déclarer qu’ « interdire les thèses révisionnistes »
n’était pas « porter atteinte à la liberté d'expression ».
Dans sa logique, en effet, cette interdiction vient au contraire défendre les libertés
garanties par la démocratie fille des droits de l’homme.
Notons d’ailleurs que son collègue d’alors, l’ancien sénateur communiste de l’Essonne
Robert Vizet, le dit ouvertement. Le 11 juin 1990, il lança :
Quels peuvent être les arguments pour rejeter un tel texte ?
Une menace contre les libertés, comme l'a prétendu à l'Assemblée nationale […]
M. Philippe de Villiers ? Cela est ridicule ! […]
C'est, bien au contraire, un texte de défense des libertés dont nous avons
à débattre aujourd'hui, un texte dont le seul et unique objectif est de lutter
efficacement contre les véritables crimes contre la démocratie et l'Histoire
que sont le racisme et l'antisémitisme !
[
62] (voir le document).
Un mois plus tard, la loi Gayssot parut au Journal officiel.
Au nom des libertés démocratiques garanties par les droits de l’homme, on supprimait
toute liberté aux « négationnistes »…
Aujourd’hui, cet état de fait est accepté, même par ceux qui s’opposaient à la loi
pénalisant la contestation de tous les génocides reconnus par la France.
Le 22 décembre 2001 à l’Assemblée nationale, L. Tardy déclara :
"
si l’antisémitisme me semble constituer un trouble à l’ordre public suffisant
pour justifier la loi Gayssot, les autres cas me semblent insuffisamment
le constituer pour justifier la présente loi" [
63].
Voilà pourquoi les « négationnistes » n’ont rien à attendre ni des autorités,
ni du Conseil constitutionnel. Pis,la société allant toujours jusqu’au au bout
de sa logique, la répression s’aggravera. Je m’explique.
La société va jusqu’au bout de la logique
Des interdictions toujours plus larges
On punit désormais la « minimisation »
Le Rapport du sénateur J.-P. Sueur
La loi Gayssot, J.-P. Sueur en reconnaît la légitimité. Il s’oppose au fait de sanctionner
aussi la « minimisation » des génocides reconnus officiellement.
Dans son Rapport déjà cité, on lit :
Votre commission souligne également l'imprécision des termes retenus par la proposition
de loi : le fait de « contester ou de minimiser de façon outrancière » l'existence
d'un génocide est plus large que sa seule négation et peut porter sur l'ampleur,
les méthodes, les lieux, le champ temporel du génocide, sans forcément nier,
au terme de l'analyse et de manière générale, qu'il y en ait eu un.
Ces termes seraient susceptibles de soulever de réelles difficultés d'appréciation
s'agissant de la contestation ou de la minimisation d'évènements historiques s
ur lesquels les historiens poursuivent leurs travaux. [
64].
Il est vrai qu’initialement, seule la « contestation » était punie.
Mais là comme ailleurs,la société va jusqu’au bout.
Quand on interdit la contestation, il faut tout interdire : la minimisation et même
le doute exprimé publiquement, sans quoi les « négateurs » trouveront les expressions
adéquates pour rester dans les limites de l’acceptable,tout en étant compris
par le plus grand nombre.
L’innovation belge de 1992 D’où l’innovation de la loi antirévisionniste belge concoctée en 1992 par deux socialistes,
Claude Eerdekens et Yvan Mayeur. Parue au
Moniteur (l’équivalent belge du Journal officiel) le 23 mars 1995, elle déclare (je souligne) :
Article 1. Est puni d'un emprisonnement de huit jours à un an et d'une amende
de vingt-six à cinq mille francs quiconque […] nie, minimise grossièrement,
cherche à justifier ou approuve le génocide commis par le régime national-socialiste
allemand pendant la seconde guerre mondiale [
65].
La France rattrape son retard Comme on pouvait s’y attendre, la France s’est empressée de rattraper son retard.
D’après une jurisprudence du 29 janvier 1998 :
la minoration outrancière du nombre des victimes de la politique d’extermination
dans les camps de concentration caractérise le délit de contestation de crimes
contre l’humanité […] lorsqu’elle est faite de mauvaise foi [
66].
(voir document)
Une autre jurisprudence du 12 septembre 2000 rend punissable :
La contestation de l’existence des crimes contre l’humanité […] même si elle
est présentée sous forme déguisée ou dubitative,ou encore par voie d’insinuation ;
elle est également [punissable] lorsque, sous couvert de recherche d’une supposée
vérité historique,elle tend à nier les crimes contre l’humanité commis par les nazis
à l’encontre de la communauté juive [ibid.,point n° 7].
En France,tout est désormais entièrement verrouillé.
La décision-cadre européenne de 2008
Et sans surprise, l’Union européenne suit le mouvement. Le 28 novembre 2008,
reprenant l’éternel bla-bla sur le racisme,les députés européens ont adopté
la décision-cadre suivante :
Décision-cadre 2008/913/JAI du Conseil du 28 novembre 2008
(entrée en vigueur le même jour) sur la lutte contre certaines formes
et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal :
LE CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE,
[…]
considérant ce qui suit :
(1) Le racisme et la xénophobie sont des violations directes des principes de liberté,
de démocratie, de respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales,
ainsi que de l’État de droit, principes sur lesquels l’Union européenne est fondée
et qui sont communs aux États membres.
a arrêté la présente décision-cadre :
Article premier
Infractions relevant du racisme et de la xénophobie
1. Chaque État membre prend les mesures nécessaires pour faire en sorte
que les actes intentionnels ci-après soient punissables :
[…]
c) l’apologie, la négation ou la banalisation grossière publiques des crimes de génocide,
crimes contre l’humanité et crimes de guerre, tels que définis aux articles 6, 7 et 8
du Statut de la Cour pénale internationale, visant un groupe de personnes ou
un membre d’un tel groupe défini par référence à la race, la couleur, la religion,
l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique lorsque le comportement est exercé
d’une manière qui risque d’inciter à la violence ou à la haine à l’égard d’un groupe
de personnes ou d’un membre d’un tel groupe ;
d) l’apologie, la négation ou la banalisation grossière publiques des crimes définis
à l’article 6 de la charte du Tribunal militaire international annexée à l’accord
de Londres du 8 août 1945, visant un groupe de personnes ou un membre
d’un tel groupe défini par référence à la race, la couleur, la religion, l’ascendance,
l’origine nationale ou ethnique, lorsque le comportement est exercé d’une manière
qui risque d’inciter à la violence ou à la haine à l’égard d’un groupe de personnes
ou d’un membre d’un tel groupe [
67].
Les crimes de guerre et crimes contre la paix appelés à être protégés par la loi
Cette décision élargit considérablement le champ de la répression, car les génocides
et autres « crimes contre l’humanité » ne sont plus les seuls concernés.
L’article 1.c parle également des « crimes de guerre ».
Bien plus, l’article 1.d mentionne les « crimes définis à l’article 6 de la charte
du Tribunal militaire international annexée à l’accord de Londres du 8 août 1945 »,
ce qui inclut non seulement les « crimes contre l’humanité » et les « crimes de guerre »,
mais aussi les « crimes contre la paix » (TMI, I, 12-3).
Cette décision-cadre ouvre donc la porte à l’adoption de textes infiniment plus
répressifs que les lois actuelles. Désormais, une loi pourrait être votée qui interdirait
toute remise en cause de la thèse officielle selon laquelle l’Allemagne hitlérienne
est totalement responsable du déclenchement de la seconde guerre mondiale.
De quoi combler les espoirs des gardiens de la Mémoire d’Oradour.
Ce risque d’élargissement de la répression n’est pas purement théorique :
en décembre 2011, la députée socialiste de Haute-Vienne,Monique Boulestin,
a exprimé le désir de voir le drame d’Oradour qualifié de « crime contre l’humanité »
afin de pouvoir plus facilement « dénoncer et poursuivre » les « écrits négationnistes
et révisionnistes ». Intervenant à l’Assemblée nationale, elle a déclaré :
Mme Monique Boulestin.
Permettez-moi une réflexion toute personnelle :native d’une région qui a vécu
le terrible drame d’Oradour-sur-Glane, en Haute-Vienne,je sais combien il est difficile
de préserver la mémoire de ce passé douloureux et surtout d’en faire respecter
la vérité historique : faute d’outils législatifs paraissent régulièrement des écrits
négationnistes et révisionnistes qu’avec les derniers témoins et les associations,
notamment d’anciens combattants, nous ne cessons de dénoncer et de poursuivre.
C’est pourquoi nous souhaitons naturellement inscrire le massacre d’Oradour
dans la liste des crimes contre l’humanité [
68]. (voir le document)
Avec la décision-cadre de 2008,Mme Boulestin n’aura plus à œuvrer pour qu’Oradour
soit reconnu comme un « crime contre l’humanité ».
Son caractère de « crime de guerre » suffira.
L’affaire sera d’autant plus aisée que le texte européen ajoute :
(10)
La présente décision-cadre n’empêche pas un État membre d’adopter des dispositions
de droit interne étendant le champ d’application de l’article 1er,paragraphe 1,
points c et d),aux crimes visant un groupe de personnes défini par des critères
autres que la race, la couleur, la religion, l’ascendance ou l’origine nationale
ou ethnique, tels que le statut social ou les convictions politiques [
69].
La France pourra donc voter une loi qui interdira toute contestation
des crimes dont aurait été victime « la population d’Oradour-sur-Glane »…
Plus besoin de discours racistes. La disparition de l’élément intentionnel.
Dans son Rapport déjà cité, J.-P. Sueur écrit :
La présente proposition de loi se présente comme la transposition en droit interne
de la décision-cadre 2008/913/JAI du 28 novembre 2008 relative à la lutte contre
certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal.
En réalité, elle ne propose qu'une transposition très imparfaite de cette dernière.
L'article 1er de cette décision-cadre dispose en effet que « chaque État-membre prend
les mesures nécessaires pour faire en sorte que [...] soient punissables l'apologie,
la négation ou la banalisation grossière publiques des crimes de génocide, crimes
contre l'humanité et crimes de guerre, tels que définis aux articles 6, 7 et 8
du Statut de la Cour pénale internationale, visant un groupe de personnes ou
un membre d'un tel groupe défini par référence à la race, la couleur, la religion,
l'ascendance ou l'origine nationale ou ethnique lorsque le comportement est exercé
d'une manière qui risque d'inciter à la violence ou à la haine à l'égard d'un groupe
de personnes ou d'un membre d'un tel groupe ».
Ainsi, l'incrimination prévue doit viser les comportements « exercés d'une manière
qui risque d'inciter à la violence ou à la haine » : sa finalité n'est donc pas de protéger
la mémoire mais de lutter contre la discrimination. Or l'infraction créée par l'article 1er
de la proposition de loi ne comporte pas cet élément intentionnel, lié à la prévention
des discriminations et à la lutte contre le racisme et la xénophobie [ibid., section III, B.].
La disparition de l’élément intentionnel date de la loi « antiraciste » de 1972.
L’ennui est que :
- la loi « antiraciste » Pleven du 1er juillet 1972 avait consacré cette disparition
de l’élément intentionnel.
Dans La Francophobie, Eric Delcroix a judicieusement expliqué :
Que constate-t-on à ce stade de décomposition de la pensée juridique et de la rigueur judiciaire ?
[…] la disparition de l’élément intentionnel. Il importe peu que le journaliste
en cause ait eu ou non l’intention de provoquer à la haine.
On ne s’interroge pas sur la question de sa bonne foi.
Mais des juges glossateurs apprécient souverainement que l’écrit qui leur est soumis
« ne peut que susciter » ou est « susceptible de susciter », ici un tiers sentimen
t (la peur) « de nature à provoquer à la haine… »
[…]
Le décret-loi Marchandeau [1939] exigeait explicitement ce qui allait sans dire,
savoir la nécessité de l’élément intentionnel. Pour ce faire, il énonçait que les propos
en cause devaient « avoir pour but d’exciter à la haine ».
Ce but, nos juges sidérés l’ont oublié, faisant de la provocation à la haine raciale
un délit métaphysique.
Dès les mois qui ont suivi la promulgation de la loi, M. Foulon-Pignol, vice-président
du Tribunal de Grande Instance de Paris, exultait :
« L’incrimination est débarrassée de l’exigence d’un but d’excitation à la haine,
élément constitutif dont la preuve s’est avérée particulièrement malaisée… »
Confondant :
voilà que l’on débarrasse l’accusation de la charge de la preuve dès lors
qu’elle est « malaisée »…[
70]
Le cas de la loi Gayssot. - fille de la loi Pleven,la loi Gayssot ne comporte pas non plus cet élément intentionnel.
Pour s’en convaincre, il suffit de relire l’article 24 bis :
Art. 24 bis. (L. n° 90-615, 13 juillet, 1990, art. 9).
- Seront punis des peines prévues par le sixième alinéa de l’article 24 ceux qui auront
contesté, par un des moyens énoncés à l’article 23, l’existence d’un ou plusieurs crimes
contre l’humanité tels qu’ils sont définis par l’article 6 du statut du tribunal militaire
international annexé à l’accord de Londres du 8 août 1945 et qui ont été commis
soit par les membres d’une organisation déclarée criminelle en application de l’article 9
dudit statut, soit par une personne reconnue coupable de tels crimes par une juridiction française
ou internationale [
71].
La contestation de la Shoah est donc automatiquement punie,quelle que soit l’intention
de son auteur.
La raison est simple : pour le législateur, le « négationnisme » est en lui-même
un discours raciste.
Les différentes citations publiées dans cette étude le démontrent amplement.
Par conséquent, l’intention d’appeler à la haine n’est nullement à établir puisqu’elle
est le mobile même du discours.
J.-P. Sueur accepte cette analyse…
Notons d’ailleurs que J.-P. Sueur accepte cette analyse quand il reprend à son compte
la décision Garaudy. Dans son rapport déjà cité, il écrit :
si la « loi Gayssot » paraît compatible avec le principe de liberté d'opinion et d'expression,
c'est notamment parce qu'elle tend à prévenir ,aujourd'hui ,la résurgence d'un discours antisémite.
Dans une décision Garaudy du 24 juin 2003, la Cour européenne des droits
de l’homme a ainsi considéré que « la contestation des crimes contre l'humanité
apparaît comme l'une des formes les plus aiguës de diffamation raciale envers les Juifs
et d'incitation à la haine à leur égard.
La négation ou la révision de faits historiques de ce type remettent en cause les valeurs
qui fondent la lutte contre le racisme et l'antisémitisme et sont de nature à troubler
gravement l'ordre public »[
72].
…qui refermera le piège. Mais encore une fois, il faut être cohérent : si la « négation de la Shoah » relève
du racisme antijuif,on ne voit pas pourquoi la « négation du génocide arménien »
ne serait pas, en elle-même, du racisme antiarménien.
Dès lors, au diable l’élément intentionnel. Et voilà J.-J. Sueur piégé…
Un pouvoir exorbitant donné aux magistrats. Le bon sens de deux élus…
Pour tenter d’en sortir, J.-P. Sueur affirme que ce discours antiarménien est quasiment
invisible en France. Avant lui, L. Tardy avait lancé à l’Assemblée nationale :
« si l’antisémitisme me semble constituer un trouble à l’ordre public suffisant
pour justifier la loi Gayssot [sic], les autres cas me semblent insuffisammen
t le constituer pour justifier la présente loi »[
73].
…balayé par la tradition antiraciste… L’ennui est que ce n’est ni au député L. Tardy, ni au sénateur J.-P. Sueur d’apprécier
l’ampleur du discours antiarménien en France.
Ce n’est même pas aux Arméniens eux-mêmes. C’est aux magistrats.
Voilà pourquoi depuis bien longtemps, les textes dits « racistes » peuvent être
poursuivis directement par Ministère public.
Que dit en effet la loi n° 72-546 du 1er juillet 1972 ? Ceci :
la poursuite pourra être exercée d’office par le Ministère public lorsque la diffamation
ou l’injure aura été commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison
de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie,
une nation, une race ou une religion déterminée
[Voy. le Code Pénal (éd. Dalloz, 2004), p. 1987.].
La « justice » française peut donc poursuivre même si personne ne se manifeste.
… et par la récente décision européenne
Cette possibilité exorbitante laissée au Ministère public est clairement affirmée
dans la décision-cadre européenne du 28 novembre 2008.
Le onzième point du préambule déclare :
Il y a lieu de faire en sorte que les enquêtes et les poursuites relatives aux infractions
relevant du racisme ou de la xénophobie ne dépendent pas de déclarations
ou d’accusations émanant des victimes, qui sont souvent particulièrement vulnérables
et hésitent à engager des poursuites [
74].
Quant à l’article 8 de la décision-cadre, il énonce :
Chaque État membre prend les mesures nécessaires pour faire en sorte que les enquêtes
sur les actes visés aux articles 1er et 2 ou la poursuite de leurs auteurs ne dépendent pas
d’une déclaration ou d’une accusation émanant de la victime de l’acte, du moins dans
les cas les plus graves où l’acte a été commis sur son territoire [id.].
Dans la logique « antiraciste », ces dispositions se comprennent parfaitement.
Car l’antiracisme véhicule l’image manichéenne du pauvre immigré sans défense
et intimidé victime du Blanc méchant, violent et sans pitié. J.-P. Sueur se retrouve
donc piégé par une logique à laquelle il adhère…
La société pousse sa logique jusqu’au bout.
Voilà plus d’un siècle, l’abbé Antoine de Salinis prévenait :
La logique des nations est aussi rigoureuse que la vérité de Dieu même.
Un individu peut reculer devant des conséquences, la société, jamais [
75].
Le décision-cadre adoptée voilà plus de trois ans par le Parlement européen en est
une parfaite illustration.
Elle prépare la voie à une répression toujours plus accrue.
Aujourd’hui, en France, seule la Shoah est concernée, car la décision du Conseil
constitutionnel a censuré la loi qui devait pénaliser la contestation des faits qualifiés
de « crimes de génocide ».
Mais ne nous leurrons pas.
Après N. Sartkozy, François Hollande a annoncé son intention de « reprendre le dossier »
s’il était élu à la présidence de la République[
76].
Puis viendront les crimes de guerre et les crimes contre la paix, les crimes commis
contre tel ou tel groupe spécifique…
Conclusion : oui aux soutiens étrangers.
Impossible d’invoquer les droits de l’homme
Ces quelques développements permettent de comprendre pourquoi il est parfaitement
vain de prétendre défendre les révisionnistes en invoquant les droits de l’homme.
C’est totalement méconnaître la nature profonde de ceux droits.
Loin d’être un rempart pour la liberté d’opinion, la liberté de recherche et la liberté
d’expression, ils justifient au contraire le bâillonnement des libres chercheurs en histoire.
Deux siècles plus tard, l’ombre du révolutionnaire Louis Antoine de Saint-Just plane
encore sur nous, parce que son cri « pas de liberté pour les ennemis de la Liberté »
fonde finalement les droits de l’homme.
A ceux qui refusent les soutiens venus du Moyen-Orient.
Les Européens premiers responsables
Sachant en outre que, dans son immense majorité, le peuple en Europe cautionne
(activement ou passivement) cette répression, seuls restent, pour porter le flambeau,
les défenseurs de la cause palestinienne et autres antisionistes.
On me dira qu’il s’agit la plupart du temps d’Arabes et de musulmans qui mettent
en danger l’Europe avec leur démographie galopante et leur islam conquérant.
Pour ma part, je ne crois absolument pas au « péril islamique ».
Je suis d’accord avec V. Reynouard qui a expliqué pourquoi dans une brochure intitulé :
Face au « péril islamique », que faire ? [
77].
Mais supposons que je me trompe. Oui, prenons à la lettre et comme une injonction
toujours actuelle faite aux Arabes la fameuse déclaration de l’ancien président algérien
Mohamed Ben Brahim Boukharouba (alias Houari Boumediene) à la tribune de l’O.N.U.
le 10 avril 1974 :
"Un jour,des millions d’hommes quitteront l’hémisphère sud pour aller dans l’hémisphère nord.
Et ils n’iront pas là-bas en tant qu'amis. Parce qu'ils iront là-bas pour le conquérir.
Et ils le conquerront avec leurs fils. Le ventre de nos femmes nous donnera la victoire"[
78].
Je répondrai alors que pour éviter de se faire submerger,un peuple doit lui-même
faire des enfants et que le meilleur rempart contre une conquête religieuse n’est
ni « le retour du rouleau compresseur républicain », ni « une laïcité sans concession »,
comme le prétend Marine Le Pen[
79], mais une spiritualité forte à opposer.
« La Nature a horreur du vide », ce précepte se vérifie toujours.
Quand, sur un territoire, un peuple fatigué ne croit plus en rien et ne fait plus d’enfants,
d’autres peuples plus jeunes arrivent et le supplantent.
Aujourd’hui, l’Europe meurt par sa faute au motif que, dans leur immense majorité,
les Blancs sont rongés par l’hédonisme.
Trouver une terre d’asile pour nos thèses.
Les révisionnistes doivent donc se tourner vers ceux qui seront prêts à accepter
leur message. Qu’en feront-ils ? Je l’ignore.
Mais je crois que toute idée en péril pour cause de situation sociale extrêmement
défavorable doit trouver des terres d’asile.
Peu importe l’exploitation qui en sera faite là-bas.
L’essentiel est qu’elle puisse vivre en attendant de pouvoir revenir lorsque la situation
aura changée.
Et si la situation ne change jamais ? Et si, submergée, l’Europe que nous défendons
en vient à ne plus exister ? Ces questions ne doivent pas être prises en considération :
l’important, aujourd’hui, est de faire essaimer le révisionnisme dans d’autres parties
du monde afin qu’il ne meure pas. Le reste n’est pas notre affaire.
Des scrupules contre-productifs.
Voilà pourquoi je soutiens totalement les libres chercheurs qui répondent aux invitations
étrangères, même lorsqu’il s’agit de l’Iran.
Il faut se libérer des scrupules et cesser de vouloir paraître fréquentables.
Nous ne le serons jamais ! En France, le révisionnisme existe depuis trente ans ;
tout le monde a eu la possibilité d’en apprécier le sérieux.
S’il reste diffamé, injurié et réprimé, c’est parce les gens le rejette d’emblée.
Si les gens le rejettent d’emblée, c’est parce qu’il dérange au plus haut point.
Et s’il dérange au plus haut point, c’est parce que, dans la guerre idéologique
qui continue contre le national-socialisme, il rend obsolète une grande partie de l’arsenal
des « bons ». Nos adversaires le savent pertinemment.
Lorsqu’il affirme qu’ « en niant leur caractère de génocide, on affaiblit du même coup
la portée de ces déclarations de droits [de l’homme] et des garanties qu’elles présentent
pour les citoyens », le député F. Rochebloine est au cœur du problème.
Qu’on le veuille ou non, le révisionnisme sape les fondements du Nouvel Ordre mondial.
Avec ou sans le soutien du président Ahmadinejad, les libres chercheurs seront donc
toujours considérés par Big Brother comme des monstres à faire taire.
Dès lors, pourquoi repousser le soutien iranien ?
Acceptons-le, au contraire, et poursuivons notre noble mission qui consiste
à propager la vérité historique,prélude au rétablissement d’autres vérités.
..../....