Le mythe de la Résistance qui aurait permis le Débarquement allié en Normandie.
Les mensonges de Lucie Aubrac (
2)
Le mythe de la Résistance
qui aurait permis le Débarquement allié en Normandie.
Sur Lucie Aubrac, lire également : « Lucie Aubrac : une menteuse éhontée »
Table des matières
L. Aubrac encense la Résistance.
1
La « démonstration » de l’ancien commandant en chef des
FTP. 2
Quinze divisions FFI…..
2
… pour appuyer le Débarquement au bon moment
2
Une « démonstration » entièrement fausse.
2
Les mémoires d’Eisenhower contre la légende résistancialiste.
2
Le satisfecit d’Eisenhower…..
2
… sans aucune valeur quand on regarde les faits.
2
La Libération de Paris.
2
Les Alliés ne voulaient pas l’aide de la Résistance pour débarquer
2
Les actions de harcèlement n’ont nullement pesé sur le cours des opérations
2
Les renforts allemands venus de Bretagne sont arrivés sans encombre.
2
La Résistance n’a fourni aucun renseignement important
2
L’aveu d’un historien officiel
2
Dès 1947, Maurice Bardèche avait détruit le mythe résistancialiste.
2
L. Aubrac encense la Résistance. Le mythe des maquisards qui auraient joué un rôle très important
dans la victoire des Alliés a la vie dure.
Dans son ouvrage
La Résistance expliquée à mes petits-enfants,
Lucie Aubrac déclare :
"Dans cette prison qu’était devenue la France,la Résistance
a renseigné efficacement les Alliés,a contribué avec peu d’armes à vaincre
l’occupant,a libéré seule une partie de notre pays,a aidé les Alliés
sur le sol français,a poursuivi avec eux l’armée allemande jusqu’à sa
totale défaite,a débarrassé la Patrie du régime de collaboration"[
1].
La Résistance aurait notamment permis aux Alliés de débarquer en Normandie
le 6 juin 1944 en fournissant des renseignements primordiaux et, surtout,
en harcelant les divisions allemandes qui accouraient, retardant leur arrivée
et permettant ainsi l’établissement d’une solide tête de pont.
La « démonstration » de l’ancien commandant en chef des FTP
Quinze divisions FFI…
Dans son livre intitulé :
Les F.T.P.,l’ancien commandant en chef des Francs-Tireurs
et Partisans Français, Charles Tillon va même plus loin :
il attribue la réussite du Débarquement aux FFI qui,
dans les premières heures du 6 juin 1944, auraient apporté
à l’opération des moyens… deux fois supérieurs à ceux des Alliés.
Sa démonstration vaut la peine d’être exposée.
L’auteur s’appuie tout d’abord sur une note du QG allié en 1944
selon laquelle la force des FFI «
représentait l’équivalent
en hommes de quinze divisions »
(notez le : « en hommes » ; il n’est pas question de matériel,
alors que le matériel a joué un rôle capital dans la deuxième guerre mondiale)[
2].
Puis, il déclare que si le Commandement allié à l’Ouest avait bénéficié de
ces quinze divisions, «
cet avantage ne lui aurait servi à rien
pour la conquête de la tête de pont en Normandie »
car tout au plus «
auraient-elles pu servir de divisions en réserve
loin du théâtre des opérations » (p. 559).
Or, les quinze divisions FFI «
étaient à pied d’œuvre,
au contact de l’ennemi, partout engagées avant,
pendant et après le débarquement » (Id.).
… pour appuyer le Débarquement au bon moment. Et voici l’estocade :
"Dans la création d’une tête de pont,ce qui est essentiel,
ce qui décide tout, c’est le volume des moyens que l’assaillant peut
jeter d’un seul coup sur le rivage.
Il faut que ces moyens soient assez puissants pour contenir l’inévitable
contre-attaque de l’ennemi jusqu’à ce que les unités lourdes aient
été à leur tour mises à terre en quantités suffisantes.
Ce laps de temps durant lequel la première vague de débarquement
est seule sur le rivage, représente le moment critique de l’opération.
En Normandie,sept divisions de premier échelon furent ainsi jetées à terre
(Américains,Anglais, Canadiens).
Donc,à cet instant décisif,selon les propres estimations d’Eisenhower,
les moyens FFI étaient deux fois plus importants que les troupes
de débarquement alliées.
Ce fait essentiel devrait inciter à plus d’objectivité ceux qui voudraient
considérer les FFI comme n’ayant joué qu’un rôle « d’appoint »
aux unités débarquées" [pp. 559-560].
CQFD !
Une « démonstration » entièrement fausse.
L’auteur « oublie » toutefois :
-que les premières vagues d’assaut anglo-américaines n’étaient pas seules ;
elles reçurent l’appui décisif de la marine et de l’aviation qui pilonnèrent
les lignes allemandes (voir tableau récapitulatif des forces engagées) ;
-que les « quinze divisions » FFI étaient non seulement peu armées ,
L. Aubrac avoue que la Résistance avait «
peu d’armes » ,
mais surtout, qu’elles n’étaient pas regroupées en Normandie pour attaquer
les forces allemandes présentes sur les lieux au moment où les premières
vagues d’assaut arrivaient.
Non,elles étaient loin,très loin même,éparpillées sur le territoire
jusqu’à l’autre bout de la France.
Par conséquent :
-il n’y a pas eu de
«laps de temps durant lequel la première vague de débarquement »
auraient été «
seule sur le rivage »
(comprenez:sans aucune aide);
-même à supposer que c’eût été le cas, pendant ce laps de temps,
cette première vague d’assaut n’aurait vu aucune division FFI lui prêter main forte.
Notons d’ailleurs que sur une carte publiée lors du soixantième anniversaire
du Débarquement,les seuls renforts qui arrivent sont… allemands.
Des FFI, il n’est nullement question (voir la carte).
Le raisonnement de C.Tillon est donc faux de bout en bout.
Les mémoires d’Eisenhower contre la légende résistancialiste
Il est d’ailleurs intéressant de souligner que l’auteur ne fait aucune référence
aux mémoires du général Eisenhower.
Or, elles étaient parues en France dès 1949, soit treize ans avant la publication
de son livre. Pourquoi cette lacune ?
Le satisfecit d’Eisenhower…
L’explication est simple :
- dans les milieux résistancialistes, on se plaît à citer encore et encore
le fameux passage de ces mémoires lorsque Dwight D. Eisenhower écrit :
"Pendant toute la compagne de France, les hommes de Forces
Françaises Libres ont joué un rôle particulièrement important.
Ils ont été extrêmement actifs en Bretagne, et en tous points du front,
ils nous ont aidé de mille façons. Sans eux, la libération de la France
et la défaite de l’ennemi en Europe occidentale auraient été bien plus longues
et nous auraient coûté davantage de pertes". [3]
… sans aucune valeur quand on regarde les faits
Seulement, pour bien apprécier la valeur de ce satisfecit,
il faut tout d’abord avoir l’honnêteté de citer la suite immédiate.
La Libération de Paris.
D. Eisenhower écrit :
"Ainsi, lorsque les Forces Françaises Libres commencèrent leur insurrection de Paris,
il fut nécessaire de se porter rapidement à leur secours.
Les renseignements nous portaient à croire qu’il n’y aurait pas
de combats sérieux, et l’on pensait que l’entrée d’une ou deux divisions
alliées suffirait à la libération de Paris" [p. 348].
Par conséquent, même si la résistance allemande promettait d’être faible
(«
il n’y aurait pas de combat sérieux »), les Alliés durent
rapidement secourir les FFL qui, sans prévenir personne, avaient décidé
de « libérer » Paris. Preuve que les Anglo-américains ne se faisaient
aucune illusion sur la valeur réelle des Résistants au combat.
D. Eisenhower raconte ensuite que le commandement choisit d’envoyer à Paris
la 2ème division blindée du général Leclerc. Il ajoute que le 25 août,
ce dernier reçut en personne
«
la reddition du général allemand commandant la garnison de Paris » (p. 348).
C’est certes très honorable.
Mais là encore, lisons la suite immédiate. Le général américain déclare :
"Cependant, avant que les Allemands ne soient complètement annihilés à Paris
et la ville remise en ordre, il fallut faire entrer la 4ème division américaine.
Heureusement, le combat ne devait causer aucun dommage important à la ville". [Id.].
On en déduit qu’en vérité, les Français (FFL & soldats du général Leclerc)
furent incapables de « libérer » seuls la ville.
La résistance allemande, quoi que très faible, nécessita le renfort
d’une division américaine. Quel aveu !
Ajoutons à cela qu’au moment de prendre le pouvoir en défilant triomphalement
dans Paris, le général De Gaulle ne put compter sur ses « troupes »
pour faire une démonstration de force.
Il dut quémander auprès des Américains «
le prêt, à titre temporaire,
de deux divisions américaines afin de faire un étalage de force, comme il disait»
(p. 349). Pitoyable !
Les Alliés ne voulaient pas l’aide de la Résistance pour débarquer.
Mais il y a plus.
Dans l’ouvrage, le satisfecit décerné à la Résistance arrive au seizième chapitre :
« La poursuite et la bataille du ravitaillement ».
Il correspond à la période qui commence à la fin du mois d’août 1944.
La préparation du Débarquement, l’établissement de la tête de pont puis
sa consolidation, les combats acharnés en Normandie et la percée d’Avranches
font l’objet des chapitres XIII à XIV, qui s’étendent sur 74 pages (pp. 265 à 338).
Eh bien, dans ces 74 pages, seules… onze lignes sont consacrées à l’appui
que pourrait fournir la Résistance. Et voici ce que D. Eisenhower écrit :
[…]
"notre plan reposait sur l’appoint considérable que nous escomptions
de la part des mouvements des maquis en France.
On savait qu’ils étaient particulièrement nombreux en Bretagne,
et dans les montagnes et les collines proches de la côte méditerranéenne.
[…] Nous désirions particulièrement que, le Jour J, le général De Gaulle
s’adressât avec moi par radio à la population française afin
qu’elle ne se soulève pas et ne s’expose pas à des sacrifices inutiles
qui n’avaient pas encore d’intérêt,
mais qu’elle se réservât pour le moment où nous lui demanderions son appui".
[pp. 299-300].
C’est net : pour débarquer, les Anglo-américains n’avaient nullement besoin
de l’aide de la Résistance.
Ils n’en voulaient pas.
Ils considéraient que ce serait des «
sacrifices inutiles ».
Les actions de harcèlement n’ont nullement pesé sur le cours des opérations.
Les résistancialistes me répondront sans doute que si les Alliés ne souhaitaient pas
un soulèvement général au moment du Débarquement, ils ont apprécié
les renseignements primordiaux communiqués par les maquis et le harcèlement
constant qui entraîna un retard salutaire dans l’arrivée des renforts allemands.
Or, je note que nulle part, dans ces 74 pages, D. Eisenhower n’évoque
les opérations de harcèlement des maquis. Nulle part il ne déclare
que la tête de pont alliée a pu être établie en Normandie puis consolidée
en partie grâce à l’action des « quinze divisions » de la Résistance.
De cette Résistance au combat, de ces « quinze divisions », il n’est jamais question.
La raison est simple :
- tout au long de ces chapitres, on suit le combat titanesque entre d’immenses
armées continentales très bien équipées :
- centaines de milliers d’hommes,
- divisions contre divisions,
- blindés contre blindés,
- bombardiers,
- pilonnages intensifs, pluies de bombes,
- ravitaillement par centaines milliers de tonnes[
4]…
Dans ce combat de géants, la guérilla ne pesait rien ; or les résistants
n’étaient rien d’autres que des guérilleros très peu armés (voir photo).
Un exemple frappant peut d’ailleurs être trouvé dans l’affaire des quatre jours
critiques de juin. D. Eisenhower raconte que le 19 juin, une tempête balaya
les cotes normandes, détruisant le port artificiel d’Omaha Beach,
coupant toutes les relations avec l’Angleterre et empêchant l’arrivée
de troupes fraîches (pp. 309-310).
Pendant quatre jours, les Allemands bénéficièrent de
«
conditions de contre-attaque idéales » (p. 310).
Mais ils ne bougèrent pas. Pourquoi ? Parce qu’ils avaient été pris au piège
par les maquis ? Non.
S’ils ne purent riposter, ce fut à cause, déclare D. Eisenhower,
de «
la campagne d’isolement menée préalablement par notre aviation » ;
«
Nous eûmes là, poursuit-il, un exemple de plus de l’influence décisive
de l’aviation sur les combats terrestres » (Id.).
C’est la confirmation que, dans une lutte titanesque, seuls les moyens modernes
et massifs ont un effet sensible.
Les renforts allemands venus de Bretagne sont arrivés sans encombre.
Plus révélateur encore :
- bien que D. Eisenhower ait parlé de maquis «
particulièrement
nombreux en Bretagne, et dans les montagnes et les collines proches
de la côte méditerranéenne », bien qu’il ait parlé de Résistants
«
extrêmement actifs en Bretagne »,
il écrit qu’immédiatement après le Débarquement :
[…]
"l’ennemi amena d’abord toutes les troupes disponibles de Bretagne,
puis des divisions venues, les unes du sud de la France, les autres des Pays-Bas".
[p. 306].
Là encore, c’est net :
- après les réserves du Pas-de-Calais, les premiers renforts qui arrivèrent
venaient de la Bretagne. Aussi nombreux et actifs qu’ils aient été,
les maquis n’avaient pu les freiner.
Puis vinrent ceux du Midi, qui, eux non plus, n’avaient pas été retardés.
C’est l’anéantissement définitif du mythe selon lequel la Résistance aurait eu,
sur le plan militaire, une action capitale dans la réussite du Débarquement.
La Résistance n’a fourni aucun renseignement important.
Reste le « renseignement ». Mais là encore, l’ouvrage de D. Eisenhower
réduit à néant les prétentions des milieux résistancialistes.
A aucun moment, l’auteur ne cite des informations données par les maquis.
En revanche, il parle des «
rapports les plus secrets »
établis par des «
officiers d’état-major de Washington »
sur l’avancement des nouvelles armes allemandes (pp. 275-276),
des « services de renseignement » qui durent attendre juin 1944
et le début de l’attaque pour pouvoir fournir
«
des évaluations d’une remarquable exactitude »
sur ces nouvelles armes (p. 276, preuve que la Résistance ne fournissait rien,
ou rien d’exploitable), des «
missions de reconnaissance »
effectuées par « les avions et les sous-marins » (p. 285),
des «
photographies de nos avions de reconnaissance » (p. 308)…
En une occurrence, à la page 285, il précise que le commandement organisait
des missions de reconnaissances sans qu’il :
«
négligeât pour cela les autres sources de renseignement ».
C’est le seul moment où l’on peut tout au plus supposer que le général américain
songeait aux services de renseignements des maquis.
Mais même si cette supposition est vraie, les informations fournies n’ont dû
être ni nombreuses et ni capitales, puisque l’auteur ne cite ni ces autres sources,
ni une seule information qu’elles auraient apportées.
Telles sont les raisons pour lesquelles j’estime que le satisfecit de quelques lignes
donné par le général Eisenhower à la Résistance française n’a aucune valeur.
Il s’agit tout au plus d’une marque de politesse destinée à ne pas froisser
quelques consciences amies.
Le contenu de son ouvrage permet aisément de s’en rendre compte.
C. Tillon le savait, voilà pourquoi il est resté très discret sur ces mémoires
au moment de parler du Débarquement.
L’aveu d’un historien officiel.
Mais peut-être m’accusera-t-on de partialité haineuse.
Alors je citerai un historien de référence en Belgique, Jean Vanwelkenhuyzen.
A l’occasion du soixantième anniversaire du Débarquement,
la question suivante lui a été posée :
«
La résistance a-t-elle vraiment représenté un appoint pour les armées régulières ? »
Il a répondu :
Il y a une légende dorée française qui a été une manière de gommer la défaite de 1940.
Les maquis locaux ont pu fournir des renseignements qui échappaient
à la reconnaissance aérienne et aussi jouer un rôle dans certains combats.
Mais dire que cela a changé les opérations, non".". [
5]
(voir l’article)
On ne saurait être plus clair.
Dès 1947, Maurice Bardèche avait détruit le mythe résistancialiste.
Il est intéressant de noter que dès 1947, soit deux ans avant la publication
en France des mémoires d’Eisenhower, Maurice Bardèche avait déjà conclu
dans ce sens.
Dans sa Lettre à François Mauriac, il écrivit :
"Cette résistance, qui a coûté si cher, a-t-elle eu au moins des résultats militaires ?
Je sens tout ce qu'il y a de pénible pour certains dans les convictions que
je vais énoncer.
Ne croyez pas que ce soit avec joie ni pour une simple satisfaction de polémique
que je me mette dans le cas de dire à des hommes qui ont parfois tragiquement
souffert, que les résultats obtenus ne sont pas en rapport avec les souffrances,
que ceux qui ont perdu dans cette lutte les camarades ou les enfants qui leur
étaient les plus chers, que ces êtres qu'ils ont aimés sont morts inutilement.
Ils ne sont pas morts inutilement, d'ailleurs.
Ce n'est pas souffrir inutilement en vérité que de souffrir pour ses idées,
ce n’est pas mourir inutilement que de mourir pour ses idées, même si cette souffrance
et cette mort n'ont pas contribué, autant qu'on le pense, à la victoire collective.
Même en pensant que la résistance a été une erreur, on peut se dire que
cette faculté de souffrir et de se dévouer est une marque d'énergie
et de désintéressement qui témoigne pour notre pays.
Et je ne crois rien retirer, en parlant ainsi, à l'honneur, ni au respect auquel
on droit ceux à propos desquels je suis fondé à m'exprimer ainsi.
Mais nous ne pouvons transiger sur une question si grave.
Il n'est pas de transaction avec la vérité.
Cette objection sur l'utilité de la résistance, elle a tant de poids que les plus
perspicaces de vos amis ont décidé de ne pas la laisser naître.
Ils ont compris que c’est là-dessus que se battraient les historiens et ils ont pris
leurs précautions. Le passif leur paraissait trop lourd, il leur paraissait écrasant :
il faut que la résistance ait servi à quelque chose.
Ils ont donc pris soin de susciter des témoignages, ils ont demandé des certificats,
ils se sont fait couvrir de décorations.
Ce genre de preuves n'en impose pas à tout le monde.
N'abusons pas de la politesse de nos Alliés et passons aux faits.
Je ne crois pas qu'on puisse refuser à la Résistance d’avoir constitué un réseau
d’agents de renseignements. Je suis peu compétent pour juger de la valeur
d’un pareil secours. Il faut s’entendre pourtant.
L’emploi intensif de l’aviation pour le renseignement et l’usage d’un matériel
de détection absolument inconnu avant cette guerre ont singulièrement limité
l'importance de l'espion.
Un général peut toujours être renseigné sur certains détails importants
par des photos d'avions sur lesquelles ses spécialistes savent lire avec précision
la présence d'un camp d'aviation, le déplacement et la composition d'un convoi,
et même, comme la R.A.F. savait le faire dans les derniers mois,
la trace l'une rampe de V2.
L'importance prise à la fin des opérations par les méthodes scientifiques
de « renseignement » n'exclut pas, bien entendu, les résultats obtenus
par le renseignement empirique. Mais l'histoire vraie de cette guerre,
à mesure qu'on la connaît mieux, prouve que les conceptions répandues
dans le public sur le rôle de la Résistance comme organisme de renseignements
s'apparentent singulièrement à l'image d'Épinal.
On appréciera facilement par la constatation suivante la différence qui existe
entre les deux modes de renseignements qui furent utilisés concurremment :
l'action capitale de cette guerre, la « neutralisation » de la flotte sous-marine
allemande, a été rendue possible par la découverte du radar, tandis
que les renseignements donnés par les réseaux sur l'emplacement des bases
sous-marines n’avaient jamais pu gêner sérieusement l'action sous-marine
des Allemands.
Les documents publiés par l'armée anglaise montrent qu'à la fin de la guerre,
à partir de 1944, le radar donnait des renseignements si précis et si nombreux,
et dans des domaines si divers, que toute une partie des anciens services
de renseignements se trouvait remplacée de cette manière.
Après le débarquement, les spécialistes anglais prétendent que les troupes
au combat connaissaient en quelques heures l'emplacement des batteries,
l'importance des renforts, la situation des parcs, des appareils de repérage,
des organes de commandement, etc. Je ne suis pas bon juge de ces choses-là.
Je reproduis simplement ce qu'on pouvait lire, il y a dix-huit mois,
dans la revue britannique Cadran.
Ces précisions fournies par les pays combattants eux-mêmes, sont troublantes.
On peut se demander, dans ces conditions, si les renseignements de valeur
très inégale du reste, fournis par la Résistance ont pu être autre chose
qu'un appoint. Je ne méconnais pas que plusieurs de ces renseignements
ont pu être très utiles. Mais je ne vois pas qu'on en cite de décisifs.
Selon un rapport du maréchal commandant en chef de l'aviation américaine
en Europe, les renseignements qui déterminèrent le changement de tout le plan
des attaques aériennes sur l'Allemagne au début de 1944 furent ceux
qui signalaient la sortie en grande série des avions à réaction allemands
dont l'apparition pouvait modifier le rapport des forces aériennes.
Avez-vous l'impression que nos réseaux de résistance étaient capables
de recueillir des indications de cette importance ?
Il semble que les renseignements donnés par nos réseaux aient été
constamment secondaires, complémentaires si vous préférez et, à ce titre,
ils ne sont pas négligeables, mais n'ont-ils pas coûté bien cher en vies humaines ?
N'y eut-il pas une certaine puérilité à confier à tant d'amateurs le métier
le plus difficile, le moins romanesque et le plus ingrat, celui de comptable de l'arrière ?
L'officier qui dirigea les services de renseignements de l'organisation gaulliste
a admis lui-même que ces bénévoles avaient causé plus de dégâts qu'ils n'ont
vraiment rendu de services. Je sais bien que des renseignements importants
et exacts ont pu être quelquefois recueillis, mais ne croyez-vous pas
qu’on porte souvent au crédit des organisations de résistance un travail
classique qui a été exécuté par des spécialistes auprès des états-majors
au cours de toutes les guerres, bien avant qu’on eût conçu la notion de résistance ?
On affirme, par exemple, que la Résistance rendit impossible la percée d'Avranches
en fournissant au commandement américain le dispositif des groupes armés
de Normandie et de Bretagne.
Je ne sais si cette affirmation est sûre : toutefois, ce genre de document
ne traîne pas sur toutes les tables :
c’est précisément le genre de travail qu’un réseau de résistance ne peut pas
accomplir et qui a été réalisé, au contraire, dans tous les temps par des agents
qui consacrent des mois à préparer une telle opération.
Ne croyez-vous pas que, pour ce genre de travail, l’Intelligence Service
n’a fait qu’amalgamer les meilleurs renseignements ou les meilleurs agents
des réseaux de résistance aux moyens infiniment plus puissants qu’elle possédait
par ailleurs[6] ?
L’histoire de la « guerre secrète » entre 1940 et 1945 n’est pas faite encore.
Et il n’est pas impossible qu'elle réserve des surprises.
Ce qu’on commence à entrevoir fait penser que les services de renseignement
anglo-saxons disposaient d'éléments d'information infiniment plus importants
que les réseaux de résistance.
Cette « guerre secrète » semble s'être faite, cette fois-ci, sur de toutes
autres proportions qu'en 1914. Et il n'est pas impossible que nos modes
empiriques de renseignement n’aient été aussi périmé que notre armement,
et que sur ce point comme sur beaucoup d'autres, nous n'ayons perdu
beaucoup de vies humaines en nous obstinant à nous servir des méthodes
de la guerre de 1914 alors qu'elles étaient largement dépassées.
C’est cette disproportion qui me paraît frappante. Il faut toujours en revenir là :
si la Résistance n’avait pas existé en France, pensez-vous que l’offensive
anglo-américaine eût été paralysée et le débarquement rendu impossible
à cause de notre neutralité ?
Pour moi, je ne le crois pas. Mais nous tenons à notre version romanesque
de l’espionnage. Nous avons là-dessus une âme de midinette.
Quelle a été, ensuite, la part des groupes de résistance dans les opérations
elles-mêmes ?
Sur ce point, on attend encore le Livre Blanc de la résistance que le gouvernement
issu de la résistance se devrait de publier.
Les récits héroïques nous ont été prodigués.
Nous avons appris que chaque forêt, chaque boqueteau de France recélait
un essaim de soldats de l'an II, lesquels sortant de leur retraite sur un signal,
ont balayé dans un élan irrésistible les divisions allemandes.
De l'armée américaine, de l'armée anglaise, point de nouvelles.
Les F.F.I. ont libéré la France. Les F.F.I., les F.F.I. seuls.
Telle est la version officielle.
Que des garçons courageux et très estimables se soient pris au jeu
et qu'ils se soient fait tuer parfois à cette occasion, je le sais, hélas !
Comptez ces jeunes cadavres, c'est le travail de vos amis :
vous savez aussi bien que moi qu'on pouvait entrer partout l'arme à la bretelle.
Pour l’instant, nous avons peu de documents.
Vous me permettrez de ne pas donner ce nom aux récits fantaisistes publiés
dans la presse « issue de la. Résistance » :
ce qui a été publié dans vos journaux ne compte pas aux yeux des gens honnêtes.
La monographie la plus documentée parue jusqu'à présent est la Libération de Paris
de Dansette. Cette déposition est accablante pour vos prétentions.
On voit très bien que vos coups de fusil n'ont servi à rien qu’à mettre en place
certains organismes politiques.
Quant à l'évacuation de Paris, elle se faisait très bien sans vous.
Il y a tout lieu de craindre que les autres documents qui seront publiés
sur la retraite allemande en France ne laissent apparaître ces mêmes vérités.
Le petit livre de Montgomery sur la campagne de Normandie, paru récemment
en Angleterre, ne laisse pas subsister d'illusions sur votre participation aux opérations.
Et pourtant Montgomery ne cite pas le petit fait significatif révélé par les discours
du Churchill, le geste de mauvaise humeur du général De Gaulle, refusant
de mettre à la disposition du commandement anglais, au moment du débarquement,
les quelques officiers de liaison qu’il s’était engagé à fournir et qui étaient
la seule contribution qu’on lui demandât.
Et, après tout, comment voulez-vous qu’on vous croie ?
Tout dépose contre vous,et d’abord votre propagande, ou du moins celle des Alliés.
Quand on veut établir un mensonge, il faut une unité de doctrine.
Mais vos revues et vos journaux ont abondamment commenté le gigantesque
effort de guerre anglo-américain, vous nous avez montré un continent entier
transformé en usine, des avions couvrant le ciel comme des sauterelles
qui cachent le soleil, des plaines d’obus infinies comme les plaines de la mer,
des tanks aussi nombreux que les morts qui se lèveront dans la vallée de Josaphat ;
vous nous avez dévoilé des travaux plus grands que les travaux de Pharaon,
vous nous avez enseigné le nom des magiciens du monde, vous nous avez conviés
à nous asseoir et à regarder dans des salles obscures l’ordonnance de ces miracles,
et nous avons vu sortir des eaux, comme sur ordre de Moïse, le port d’Arromanches,
avec ses docks flottants, ses pontons, ses môles, comme s’il vous était donné
de réduire en poudre et de susciter des cités.
Dites-moi, Monsieur, avez-vous songé quelque fois à ce que pesaient vos exploits
de patrouille dans cette balance à mesurer les continents ?
[…] J’ai beaucoup entendu parler d’un exploit de la Résistance qui avait consisté
à empêcher la division Das Reich d’arriver sur le front de Normandie.
C’est même le fait que les gens sérieux attestent le plus volontiers.
Est-ce que vous croyez sincèrement que la présence ou l’absence de la division
Das Reich a pu changer l’issue de la bataille du débarquement ?
Le croyez-vous vraiment ? Quel argument vous donnez à ceux qui voudront
défendre la nécessité de la collaboration !
Mais là aussi vous avez une version patriotique.
Ce n’est pas la division Das Reich que vos amis ont arrêtée en chemin,
c’est toute l’armée allemande. […] c’est vingt, cent divisions allemandes
qui n’ont jamais pu rejoindre leur poste de combat.
La France est devenue, grâce à la Résistance, un énorme piège, un bourbier
d’où la botte allemande ne peut plus se lever.
Les spectateurs qui ont pu apprécier, pendant ces semaines, la capacité
de bombardement de la RAF et de l’aviation américaine savent à quoi s’en tenir
sur cette explication inventée par notre chauvinisme.
Il est entendu que la dynamite et le plastic furent les armes essentielles
de cette guerre :
voilà avec quoi nous avons triomphé de l’armée allemande.
C’est le cinéma qui a bien établi cette vérité.
Vous n’avez qu’à aller voir les films sur la Résistance.
On fait sauter un viaduc dans chaque film.
Est-ce que vous ne pensez pas qu’il serait plus honnête, et par conséquent
plus honorable de reconnaître que vous avez mis votre point d’honneur
à participer, sans en avoir les moyens, à une guerre gigantesque,
et que le rôle de la Résistance a été ce qu’il pouvait être, ce qu’il devait
être nécessairement contre des troupes d’un matériel moderne, un simple rôle
de harcèlement ?
Dans les limites de cette définition, nul ne contesterait le courage de vos combattants
et le mérite de certaines opérations.
Mais ne comprenez-vous pas que les rodomontades de vos généraux
et l’outrecuidance de notre gouvernement agacent tout le monde,
et principalement ceux qui ont véritablement vaincu l’armée allemande
et qui savent ce que cela veut dire ?
Ainsi M. Bardèche avait-il déjà tout vu dès 1947.
Aujourd’hui, les historiens lui donnent raison.
Mais leurs voix sont couvertes par les vociférations des fanatiques de la Mémoire…
--------------------------------------------------------------------------------
[
1] Voy. L. Aubrac,
La Résistance expliquée à mes petits-enfants (éd. du Seuil, 2000), p. 52.
[
2] Voy. C. Tillon,
Les F.T.P. (éd. René Julliard, 1962), p. 552.
[
3] Voy. Dwight D. Eisenhower,
Croisade en Europe.
Mémoires sur la deuxième guerre mondiale (éd. Robert Laffont, 1949), pp. 346-348.
[
4]
« Au 2 juillet 1944, nous avions débarqué en Normandie environ un million d’hommes,
comprenant 13 divisions américaines, 11 britanniques et 1 canadienne.
Au cours de la même période, nous avions amené 566 648 tonnes d’approvisionnement
et 171 532 véhicules » (voy. D. Eisenhower, op. cit., p. 319).
[
5] Voy.
La Libre Belgique, 5-6 juin 2004, p. 7.
[
6]
Sur l’échec de la percée d’Avranches, voy. D. Eisenhower, op. cit., pp. 324-326.
L’auteur ne dit à aucun moment que le dispositif allemand était connu.
Il raconte que la première contre-offensive allemande fut stoppée net
par l’aviation américaine et la RAF :
« La neuvième force aérienne américaine et la RAF détruisirent des centaines
de chars et de véhicules ennemis » (p. 324).
Par la suite, les Alliés fixèrent des lignes de défense efficaces.