SOMMAIRE :
Dossier : Le pétrole en Afrique
- Quinze année de montée en puissance
- Le pétrole en Afrique du Nord
- Lé pétrole au Sud du Sahara
- L'avenir est dans le offshore profond
- Le pétrole des deux Soudan
- Le pétrole du Lac Albert
Histoire et culpabilisation : La révolte des Herero entre vérité et légende
Anniversaire : Le Traité de Fès
:
Editorial de Bernard LuganConséquence de la malencontreuse intervention franco-otanienne,
l’éclatement de la Libye a déjà des conséquences géopolitiques dont
nous sommes encore loin de mesurer les effets à moyen et à long terme .
L’on ne peut que demeurer pantois devant la légèreté de ceux qui engagèrent
la France dans une guerre civile qui ne la concernait en rien et dans laquelle
aucun de ses intérêts vitaux n’était menacé.
Ne tenant aucun compte des mises en garde, négligeant les avis de leurs propres services, ils ont tout au contraire choisi de suivre les conseils de ces bateleurs
des « droits de l’homme », de ces chantres de l’ingérence dite « humanitaire »
qui sévissent à longueur de temps dans les médias français.
Les décideurs français n’ignoraient pourtant pas que la Libye n’est pas un Etat,
mais un conglomérat tribal engerbant la Tripolitaine qui regarde vers Tunis,
la Cyrénaïque tournée vers Le Caire et le Fezzan qui plonge vers le bassin du Tchad
et la boucle du Niger. Ils savaient qu’au départ le mouvement n’était qu’une
dissidence régionaliste née en Cyrénaïque et renforcée d’une manière opportuniste
par le soulèvement de la minorité berbère vivant dans le djebel Nefusa, à l’Ouest.
Leurs conseillers ne leur avaient pas caché que l’épicentre de la « révolution »
était la région de Benghazi, capitale de cette Cyrénaïque dissidente à l’époque ottomane, rebelle durant l’Impero italien et insoumise ensuite.
Ce fut donc bien dans une guerre civile que le président de la République immisça
la France, au profit d’un camp contre un autre, trompant la Chine et la Russie
sur ses intentions réelles tout en transformant un mandat onusien limité à la protection des civils de Benghazi en un droit de guerre étendu à l’ensemble du pays.
Reconnu par la France comme « le seul représentant légitime des populations libyennes » dès le 10 mars 2011, le CNT a depuis démontré qu’il ne représente
que lui-même.
Pendant un temps, sa seule marge de manoeuvre fut de donner des gages
à certaines tribus tout en essayant de ne pas s’aliéner les autres.
Aujourd’hui, alors que son autorité ne dépasse pas l’antichambre du bureau
de son président, la Cyrénaïque vient de faire sécession.
La Libye n’existe donc plus et la sous région est désormais en pleine déstabilisation…
Le désastre politique est bien total.
Le dossier central de ce numéro de l’Afrique Réelle est consacré au pétrole
car le continent fonde d’énormes espoirs sur des découvertes qui se multiplient
depuis une décennie.
Est-il pour autant cet eldorado décrit par certains observateurs ?
La réponse doit être nuancée.
Aujourd’hui, l’Afrique dans son ensemble n’assure en moyenne que 15% de la production mondiale et ses 24 pays extracteurs ne produisent à eux tous pas davantage que l’Iran, le Mexique et le Venezuela réunis.
De plus, dans l’état actuel des découvertes, elle ne détient qu’entre 8 et 10%
des réserves mondiales prouvées, soit à peu de choses près l’équivalent de
celles du seul Iran.
Cependant, de très importantes découvertes étant attendues ou annoncées
en off shore et en off shore profond ainsi qu’en on shore, la place de l’Afrique
dans la production mondiale va nécessairement augmenter.
La question qu’il est donc légitime de poser est de savoir si le pétrole va pouvoir,
à lui seul, sortir le continent de sa situation actuelle.
Aura-t-il un effet d’entraînement sur des économies sinistrées ?
En Algérie et au Nigeria, la manne pétrolière n’a pas provoqué de décollage et
le « tout pétrole » y a détruit une agriculture jadis florissante.
Partout, il a provoqué la corruption, le gaspillage et même, ce qui est un comble,
les pénuries en produits pétroliers.
En définitive, le pétrole n’a pas enrichi les Africains, mais des Africains, quelques Africains. Il a d’abord servi à se servir.
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