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L' Agora
Forum politique de libre expression & historique sans tabou.
Bienvenue sur le forum de L'AGORA, ici, le livre de notre Histoire a toutes ses pages....
(Noël 1941)
Exemple de quelques pages d'Histoire "occultées" dans nos livres d'Histoire....JO 1936 à Berlin : (Au dernier moment, toutefois, le comité américain, qui craignait les équipes hollandaise et allemande, revint sur sa décision. J. Owens et R. Metcalfe furent choisis aux dépens des deux athlètes… juifs. (S. Stoller et M. Glickman)(voir photo suivante) Le Bétar en uniforme avec son drapeau à Berlin:"En Histoire, la croûte, c’est le mensonge en lui-même, le pus, c’est l’occultation qui l’accompagne. N’hésitons pas à inciser et à tout purifier …"
Le saviez-vous ?
" Les Juifs déclarent la guerre aux Allemands en 1933."
"La Judée déclare la guerre à l'Allemagne"
Discours d'Adolf Hitler contre le Nouvel Ordre Mondial.
Le saviez-vous ?
Qu'est-ce que le fascisme ? - Petite leçon rapide sur le fascisme.
« Quatre années d’Allemagne d’Hitler vues par un étranger »
de Cesare Santoro.
Affiche de propagande NS: (" On y voit une série d'animaux saluer Goëring.En haut à droite: un signe disant " Vivisection interdite" ( vivisection verboten ).
(" Les animaux de laboratoires saluant Hermann Göring" )
Ces Nazis Noirs qui soutenaient Hitler.
La liberté d'expression au "pays des Droits de l'Homme", c'est ça.... />
...hélas, d'autres "démocraties" embastillent ses citoyens pour délit d'opinion,voyez cette vidéo >
C'est un proverbe populaire utilisé par Shakespeare: "Henry IV", Première Partie, Acte III, scène 1, page 640 édition La Pléiade, traduction de Victor Hugo: << Dites la vérité, et vous humilierez le diable. >>
Ursula Haverbeck explique pourquoi l'Holocauste est le plus grand et le plus persistant mensonge de l'Histoire.
Ursula Haverbeck, 87 ans, est condamnée à dix mois de prison ferme !
Ursula Haverbeck, surnommée en Allemagne la « mamie nazie »,
a soutenu lors de son procès que « le camp d’Auschwitz n’a pas été un lieu d’extermination».
L'interview Vérité de Robert Faurisson à Méta Tour.
Démocratie dictatoriale :
Wolfgang Fröhlich,
en prison depuis 10 ans
pour délit d’opinion.
Udo Voigt (NPD):
Violations des droits de l'homme en Europe :
Dieudonné, Fröhlich, Haverbeck.
"Qui ne gueule pas la vérité, quand il sait la vérité, se fait complice des menteurs et des faussaires" (Charles Péguy)
« Débattre avec quelqu'un,c'est prendre le risque de changer d'avis » (Raymond Aron)
"L'Histoire est du vrai qui se déforme,et la légende du faux qui s'incarne" (Jean Cocteau)
DEVOIR DE MEMOIRE = DRESDE, les 13, 14 et 15 FEVRIER 1945.
" Dresde : Crime contre l'humanité,impuni à ce jour...."
"Souvenons-nous: Dresde 13,14,15 février 1945"
(Sur les raids aériens, lire « L’Incendie » de Jörg Friedrich aux éditions de Fallois. 2004 ).
HELLSTORM - Tempête Infernale:ce film racontel'histoire que les vainqueurs,encore à ce jour, ne veulent pas que vous sachiez...
6 août 1945 : "Barbarie démocratique : Hiroshima "
« Il y a quelque chose de pire que d'avoir une mauvaise pensée. C'est d'avoir une pensée toute faite. »(Charles Péguy)
"Qui n'entend qu'un son, n'entend qu'une cloche, écoutons les deux sons de cloche..."
Claude Sarraute: "notre shoa ont l'a vendu au monde entier".
Ayatollah Khamenei - "Les temps sombres sont devant nous "...
Un rabbin anti-sioniste : « la shoah a été créée par des sionistes. »
" Le professeur Faurisson a eu 85 ans le 25 janvier 2014. Voici la vidéo qu'a composée pour lui un de nos correspondants allemands, que nous félicitons également "
" 1990, 45 ans après Nuremberg,les Sovietiques reconnaissent l'assassinat des officiers polonais dans la forêt de Katyn...."
" Il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis...."
L'avis de nos présidents de la république :
Nagasaki et Oradour: où est la vraie barbarie ?
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Jean Jaurès : « Le courage, c’est de chercher la Vérité et de la dire ».
Les Derniers Jours du Grand Mensonge...
Aucun Juif gazé - 'I'm With You'...
- L’Accusation parle de femmes enceintes battues jusqu’à l’avortement…
- Aucun témoignage ne vient confirmer
- La malhonnêteté de l’Accusation
- Cas des femmes de Résistants : la Gestapo aurait pu faire bien pire
- Cas de Mme Lecour
- Perquisition chez M. Buffet
- Ils ne torturent pas, ils proposent de l’argent
- Aucune brutalité contre Mme Cléret
- La simple ruse contre Mme Meley
- Même stratagème contre Mme Viard
- L’aveu surprenant d’une femme pas maltraitée
- Conclusion -
Note : Cet article est principalement fondé sur quatre procès qui ont été intentés entre 1944 et 1947 au « auxiliaires de la gestapo » en France (voir coupures de presse d’époque).
Les sténotypies de ces procès sont intégralement consultables à la Bibliothèque de Documentation Internationale Contemporaine (BDIC), sise à Nanterre (fonds de réserve,côte générale : F Res 334/…). Pour plus de commodité, nous les appellerons ainsi :
- Procès de la « bande Bonny-Lafon » : PBL.
- Procès de la « gestapo de Neuilly » : PGN.
- Procès des « auxiliaires français de la gestapo » : PAFG.
Procès de la « gestapo géorgienne » : PGG.
- Introduction -
Dans la première partie de mon étude,j’ai démontré que, jusqu’en 1939, loin d’être un instrument de terreur,la Gestapo fut un simple outil de protection de l’État contre des minorités agissantes. Elle n’eut ni à mettre en place un réseau national de surveillance,ni à envoyer des centaines de milliers d’individus dans des camps,ni à faire régner la terreur, pour la bonne et simple raison qu’à partir de 1933,l’immense majorité du peuple allemand marcha volontairement derrière Hitler. D’où le fait qu’à Nuremberg,les juges renoncèrent à déclarer criminelle cette police avant 1939. C’était impossible, tant l’évidence criait contre les arguments fallacieux du Ministère public.
Mais j’entends déjà la réponse qu’on me fera :
« Que la Gestapo n’ait pas été reconnue criminelle avant septembre 1939, nous l’accordons sans peine.Qu’elle n’ait pas eu à commettre de crimes parce que le peuple allemand aurait accepté la dictature nazie, admettons. Cependant, le Police secrète de Hitler a révélé son vrai visage lors de la guerre, quand elle a semé la terreur dans tous les pays occupés, arrêtant, torturant, déportant, fusillant…Dans ces moments,elle a agi conformément à la doctrine raciste hitlérienne selon laquelle tout ce qui n’était pas “pur allemand” ne méritait pas le nom d’homme,et donc pouvait être impunément dégradé,avili, tué… C’est cette Gestapo-là qui a subi les foudres de la Justice ; mais le réel coupable était le nazisme dont elle ne fut qu’un instrument. Comme l’a déclaré le procureur général français à Nuremberg (François de Menthon) :
“Cette doctrine [le national-socialisme] entraînait nécessairement l’Allemagne à la guerre d’agression et à l’emploi systématique de la criminalité dans la conduite de la guerre” (TMI, V, 382). "Vous comprendrez donc que toutes vos arguties concernant la date à partir de laquelle la Gestapo a été déclarée criminelle sont sans objet. Peu nous importe que Hitler se soit bien comporté vis-à-vis de son peuple. L’hitlérisme se juge en examinant la façon dont il s’est comporté en l’encontre des étrangers,c’est-à-dire à partir du 1er septembre 1939 »…
Cette objection étant très forte,je vais y répondre en plusieurs temps. L’enjeu réel de la croisade des Alliés et les conséquences pour l’Allemagne De la légitime défense.
Tout d’abord,j’estime que seule la personne de mauvaise foi peut prétendre que, durant la guerre,telle ou telle organisation allemande aurait révélé le vrai visage de l’hitlérisme. Je m’explique :
- le chien auquel vous donnez un coup de pied et qui vous mord révèle-t-il une nature féroce ? L’homme que vous menacez avec un couteau et qui vous blesse d’un coup de revolver révèle-t-il une nature d’assassin ? Assurément non. L’un et l’autre ont agi en état de défense,pour protéger leur intégrité physique, voire leur vie. Leurs actes ont été ponctuels et uniquement destinés à répondre à une agression ponctuelle. En temps « normal », peut-être le chien et l’homme sont-ils très pacifiques ; on n’en sait rien. Voilà pourquoi,fidèle en cela aux enseignements de la morale chrétienne, la Justice traditionnelle admet la « légitime défense » et ne déclare pas meurtrier celui qui a agi dans cet état. [1] La guerre déclarée le 3 septembre 1939 à l’Allemagne était une guerre d’extermination
Eh bien,ce qui est vrai pour le chien ou pour l’homme l’est également pour l’Allemagne. Le 1er septembre 1939 éclata un conflit armé entre deux voisins,un conflit comme il y en avait eu tant par le passé. Deux jours après,ce conflit local s’étendit à l’Europe de l’Ouest ; là encore, ce n’était pas exceptionnel. Mais bientôt, les nouveaux belligérants (l’Angleterre et la France) le transformèrent en une guerre idéologique à mort. Il s’agissait de détruire l’Allemagne nationale-socialiste. Cette vérité apparut :
- une première fois le 5 septembre 1939,lorsque l’Angleterre torpilla l’ultime tentative de médiation italienne pour trouver une solution au conflit [pour lire notre étude consacrée au sujet, cliquez ici] ;
- une deuxième fois le 17 septembre 1939 lorsque les démocraties se gardèrent bien de déclarer la guerre à l’URSS qui venait de commettre le même « crime » que le Reich : l’invasion de la Pologne (voir document) ;
- une troisième fois lorsque,le 7 octobre 1939,les démocraties repoussèrent avec mépris les offres de paix d’A. Hitler [voir document].
Le 22 mars 1940,en outre,le Gouvernement français publia une bien étrange « déclaration ministérielle » qui affirmait :
« la France est engagée dans une guerre totale […]. Par le fait même,l’enjeu de cette guerre est un enjeu total. »[2].
Or,quelques mois plus tôt,cette même France avait prétendu entrer en guerre pour protéger l’indépendance menacée de la petite Pologne. Que cachait donc cette déclaration de portée bien plus générale ? La réponse fut apportée moins de trois mois plus tard. Le 11 juin 1940, au Conseil suprême tenu près de Briare,Winston Churchill jeta le masque. Il repoussa toute possibilité de paix avec l’ennemi et lança au contraire :
"Même si l’Allemagne parvient à occuper la France tout entière […] les Alliés conservent en fin de compte,les moyens de vaincre et de détruire le régime national-socialiste " [3].
L’aveu était énorme. L’indépendance de la Pologne,il n’en était plus question (on le verra d’ailleurs en 1945,lorsque ce pays sera purement et simplement abandonné à Staline…). La protection des petites nations n’avait été qu’un prétexte. Pour Churchill et sa clique,l’objectif réel était la destruction du IIIe Reich, incarnation du national-socialisme. Cet objectif, ils l’atteignirent.Hitler avait donc eu raison lorsque, le 19 septembre 1939 à Dantzig, il avait lancé :
"Il est vrai que pour ces gens la Pologne n’était non plus qu’un instrument pour atteindre leurs buts.On déclare en effet aujourd’hui tranquillement qu’il ne s’agit plus de l’existence de la Pologne mais de la destruction du régime allemand" [4].
Le 19 juillet 1940,au Reichstag, il déclara (je souligne) :
"Celui qui compare les facteurs d’où est sorti ce règlement de comptes historiques [la querelle germano-polonaise pour Dantzig et le Corridor] avec l’ampleur, la grandeur et la portée des événements militaires,doit reconnaître qu’il n’y a aucune proportion entre les épisodes et les sacrifices de cette lutte et les raisons qui l’ont provoquée,à moins que ces raisons n’aient elles-mêmes été que les prétextes pour réaliser des intentions cachées". [Ibid.,p.205].
Ces « raisons cachées »,c’était bien entendu la destruction du Reich. A partir de 1940,ainsi,l’Allemagne hitlérienne sut qu’elle combattait pour son existence, contre des Alliés qui voulaient sa mort. Dans son discours du 19 juillet,d’ailleurs,le Führer ne le cacha pas : « je ne dissimule en aucune façon, lança-t-il, que la continuation de cette lutte ne pourra se terminer que par la destruction intégrale de l’un des deux adversaires » (Ibid., p. 242).
Les agissements allemands entre 1939 et 1945 doivent être replacés dans le contexte d’une guerre d’extermination.
Or,dans de tels moments,la plupart des actions posées doivent être considérées sous un angle nouveau.Tout comme dans le cas du chien et de l’homme invoqué plus haut,il s’agit d’agissements ponctuels dictés uniquement par les nécessités du moment, notamment celle de protéger son intégrité. On ne saurait donc voir dans tous ces actes le résultat d’une idéologie quelconque. Quand on défend sa vie,on n’agit plus en vertu de principes philosophiques, on agit par instinct de conservation. Si l’on veut juger le national-socialisme (ou plus particulièrement la Gestapo), il faut le juger en temps de paix,pas en temps de guerre,et surtout pas dans les deux dernières années de la guerre,lorsque tout craquait en Allemagne et que le IIIe Reich luttait désespérément pour survivre face à un adversaire qui rasait ses villes une par une,exterminant les femmes et les enfants, et qui promettait de continuer jusqu’à obtenir la reddition inconditionnelle. Dès 1916, dans une réponse aux catholiques français qui véhiculaient des récits d’« atrocités allemandes », Wladislas Switalski avait écrit :
"Pour pouvoir,avec une autorité objective,tirer des faits recueillis des conclusions sur le caractère de l’ennemi,il ne faut pas seulement taxer le cas particulier selon l’échelle d’une valeur idéale,mais il importe en même temps de lui donner sa place dans la conduite générale de l’adversaire,et surtout de ne pas perdre de vue le cadre général des événements de la guerre ". [5]
Ce qui était vrai en 1915 l’était infiniment plus en 1943-1944. Ce que l’on présente habituellement comme des actes imputables à la « barbarie nazie » n’est,dans la majorité des cas,que la conséquence de la guerre d’extermination déclarée par les Alliés au Reich le 3 septembre 1939. Cette vérité,Me Merkel eut le courage de la dire,autant qu’il lui était possible, à Nuremberg. Alors que sa plaidoirie touchait à sa fin, il lança :
"Mais un dernier point,et peut-être le plus important,ne doit pas être omis. Le soldat allemand,le fonctionnaire et l’ouvrier allemand et tout homme de nationalité allemande savaient que la guerre nous avait mis dans une situation qui signifiait la lutte à la vie et à la mort. Le cours graduel de la guerre dévoila avec une netteté effrayante qu’il s’agissait d’être ou de ne pas être.Certes,c’est méconnaître l’âme du peuple allemand que de ne pas voir que tout Allemand honnête,lorsqu’il commencerait à se rendre compte de cette terrible réalité,se sentirait obligé de faire tout ce dont on le chargerait pour sauver sa patrie. C’est également à la lumière de ces faits qu’il faut juger l’attitude du peuple allemand et aussi de la Police politique pour rendre justice à leurs procédés ".[TMI, XXI, 571]
Dans son « Rapport sur les atrocités allemandes commises pendant l’occupation », le professeur H. Paucot admit que la Gestapo « s’affirma plus cynique et plus impatiente à mesure que l’antipathie s’affermissait contre l’occupant et que la résistance croissait »[6]. C’est clair : les Allemands se sont raidis lorsque la situation s’aggrava et qu’à l’arrière du front, certains déclenchèrent une guerre illégale.
Cette vérité de base,nous devons sans cesse la répéter… Sur l’omniprésence et l’omnipotence de la Gestapo dans les territoires occupés
La thèse officielle.
Peut-être me répondra-t-on qu’il est malhonnête de se réfugier dans des considérations très générales pour tenter d’excuser des actes inqualifiables. Afin d’écarter cette critique, je vais maintenant évoquer l’action de la Gestapo pendant le conflit.
Si l’on en croit les récits « résistancialistes »,la Gestapo aurait été partout dans les territoires occupés.Un dépôt d’arme clandestin était-il découvert ? C’était l’œuvre de la Gestapo ! Une perquisition opérée ? C’était la gestapo ! Un réseau démantelé ? C’était la Gestapo ! Des Résistants déportés ? C’était la Gestapo ! Des innocents arrêtés ? C’était l’arbitraire de la Gestapo ! Bref, de 1940 à 1945,la Gestapo aurait été un monstre aux pouvoirs immenses, présent partout à la fois pour faire régner la terreur dans les territoires occupés. La Gestapo n’était pas prête pour la guerre
Naturellement,cette version ne correspond pas à la réalité. Dans la première partie de cette étude,nous avons vu qu’au sein de l’Allemagne hitlérienne,il y avait entre 9 et 10 000 inspecteurs de la Gestapo, soit un inspecteur pour 7 200 personnes. Dès lors,on ne voit pas comment cette police d’État aurait pu soudainement mettre en coupe réglée des territoires s’étendant de la pointe de la Bretagne juqu’au cœur de la Russie. A Nuremberg,Me Merkel demanda au témoin K.Best si la Gestapo était « prête pour la guerre ». Celui-ci répondit :
"Non. D’un côté,il n’y avait pas d’équipement matériel et, en particulier,nous n’avions pas d’armes, de camions,de matériel de transmission pour les territoires occupés. D’autre part,nous manquions de personnel et nous n’avions pas la possibilité de mobiliser des réservistes comme la police ordinaire. Tout le système était en cours d’édification :les directives s’élaboraient, les bâtiments de service s’élevaient, si bien qu’on ne peut pas dire que la Police secrète d’État ou que la Police de sûreté eût été en mesure de supporter une telle épreuve". [TMI, XX, 148].
Très peu de fonctionnaires de la Gestapo dans les pays occupés.
Certes,des fonctionnaires d’exécution appartenant à la Gestapo furent tout de même envoyés dans les pays occupés ;mais dans une proportion maximum de 15 % (TMI, XXI, 566).
Compte tenu des estimations citées plus haut,on en déduit que 1 500 inspecteurs tout au plus au furent envoyés en mission à l’étranger. C’est ridiculement peu…
Interrogé,l’ancien chef du RSHA, Ernst Kaltenbrunner, se déclara incapable de fournir un chiffre,même approximatif. Mais il précisa qu’à sa connaissance,800 membres de la Gestapo avaient été envoyés en France. [7] Si l’on reprend la donnée selon laquelle 20 % de ces personnes étaient des fonctionnaires d’exécution (les autres s’occupant de l’administration), on arrive à 160 inspecteurs proprement dits pour la France. Or,il faut savoir que dans les pays occupés,la Gestapo comprenait quatre services :
- Les questions juives ;
- La répression du marché noir ;
- La section criminelle (recherche des déserteurs allemands, traque des faux-monnayeurs etc.) ;
- La répression du sabotage,du terrorisme…
Notons que la section criminelle chassait aussi les officiers allemands soupçonnés de marché noir. En 1947,au procès dit « des auxiliaires français de la Gestapo », l’un des accusés, M. Schoumacher,déclara :
SCHOUMACHER
:Mon travail a consisté,tout le temps que j’ai été chez eux, à faire arrêter des officiers allemands qui avaient volé de la marchandise et qui la revendaient au marché noir […].
M. LE PRÉSIDENT. : Il y en avait beaucoup, c’est entendu.
SCHOUMACHER. : Il y en avait quelques-uns [8]
Quoi qu’il en soit,tous les inspecteurs envoyés en France, où la Gestapo avaient son siège central rue des Saussaies,ne s’occupaient pas de traquer les juifs ou de lutter contre la Résistance.Seuls quelques dizaines ont pu être affectés à ces tâches. Cette simple constatation suffit pour juger toutes ces histoires qui présentent la Gestapo comme un monstre omniprésent et surpuissant dans les territoires occupés.
En France,la Gestapo manquait de moyens.
Exemple précis : les fichiers trouvés chez la concierge
Un exemple précis illustre ce manque moyen et cette relative impuissance : le 13 juin 1944,à Paris,des agents travaillant pour les Allemands opérèrent une perquisition dans une loge de concierge qui servait de boîte aux lettres à un réseau de Résistance. L’action porta ses fruits :
« Des tracts, des listes d’adresses, des documents, 2 machines à écrire sont saisis et emportés.Une somme de 50 000 F est découverte dans une enveloppe [...] » [9]
Au 6ème étage,en outre,ils « mirent la main, dans une chambre de bonne, sur une assez grosse quantité d’armes (grenades, mitraillettes, bombes incendiaires etc.) qui avaient été entreposées […] et qui était le dépôt d’armes de son groupe de Résistance » (Ibid., p. 57). De façon évidente, il s’agissait d’un gros réseau,structuré et pourvus de moyens financiers. La Gestapo aurait donc dû donner l’ordre de perquisitionner à toutes les adresses découvertes. Elle n’en fit rien.Les agents reçurent la mission suivante :
« monter la garde dans la loge [...], arrêter toute personne se présentant pour motif intéressant cette affaire ou demandant à parler aux Résistants de la loge» (Ibid., p. 52). Quant au fichier d’adresses,il ne fut pas exploité, faute de moyens. Marcel Paul confirme ce manque de moyens
Le fait que la Gestapo n’ait pas été dotée d’une puissance énorme en France a été confirmé par… Marcel Paul lui-même. Interrogé le 31 juillet 1945 au procès du maréchal Pétain,il déclara dans un langage conforme à l’époque :
"Si les autorités occupantes n’avaient pas disposé et bénéficié du concours permanent et acharné des policiers de Vichy,les neuf dixièmes des patriotes qui ont été arrêtés auraient pu continuer l’action libératrice […]. Dans les rangs des combattants de la Résistance,et particulièrement dans les rangs des combattants actifs,nous craignions spécialement les policiers dits français qui obéissaient aux ordres de Vichy.Nous les craignions spécialement,parce que les policiers de la Gestapo n’étaient,en général, pas aidés par les Français ; ils ne pouvaient pas recueillir de renseignements pouvant leur permettre de nous arrêter"[10]
On ne saurait être plus clair : la Gestapo avait finalement peu de moyens. Marcel Paul « oubliait » toutefois de dire que,outre les « policiers de Vichy », la population française aida l’occupant avec les dénonciations anonymes. Lors du procès dit « Bonny-Lafon »,un accusé,Alexandre Villaplane, déclara :
"[…] tous les jours les Allemands recevaient des lettres anonymes [de dénonciation.]. Parce qu’ils ne prenaient aucune initiative,ils ne sont pas plus forts que n’importe quelle police du monde,sans dénonciations" [11] (cliquez sur ce lien):
Pourquoi la Police allemande ne prenaient-elle « aucune initiative » ? Une nouvelle fois, la réponse s’impose:parce qu’elle manquait cruellement de moyens. Voilà pourquoi,dans les pays occupés,elle compta beaucoup sur la police locale et sur… les dénonciations.
L’amateurisme des auxiliaires.
Ses moyens étaient si faibles qu’elle dut s’aider d’auxiliaires recrutés un peu partout dans les pays occupés. Choisis à la hâte,ceux-ci firent parfois preuve d’un amateurisme incroyable. Lors du procès de la « bande Bonny-Lafon »,un ancien Résistant qui avait été arrêté avec son épouse et ses compagnons dans le cadre de la lutte contre les organisations clandestines fut appelé à témoigner. Il déclara :
"Pendant ce temps,ma femme était avec moi.Je la voyais tous les jours. Parce que je dois vous dire qu’ils ne sont pas très forts;ils nous enfermaient tous ensemble,de sorte que nous pouvions nous dire ce que nous avons à nous dire" [12].
Le même témoin raconta également qu’avant d’agir,la Police allemande avait fait surveiller son magasin.Mais les jeunes chargés de la besogne n’avaient pas été discrets, loin s’en faut. A l’audience,M. Wagner raconta :
"Je m’étais aperçu que,depuis quelques temps,nous étions surveillés,parce que, plusieurs fois,j’avais aperçu des jeunes gens qui n’étaient pas toujours les mêmes, qui prenaient des notes,qui stationnaient sur le trottoir en face de la boutique, qui relevaient les numéros des bicyclettes des gens qui venaient chez nous" [Ibid., p.122].
Des indicateurs qui prennent des notes bien en vue en face du magasin à surveiller, des suspects enfermés ensemble entre deux interrogatoires ;nous sommes loin de la Police super efficace car dotée de tous les moyens nécessaires et des agents les plus professionnels. Vraiment,l’image officielle de la Gestapo en France n’est pas celle que l’on présente habituellement, surpuissante et omniprésente…
L’origine des nombreuses confusions La Gestapo devint un bouc émissaire.
Certes,les témoins qui ont faussement impliqué la Police secrète allemande n’ont pas tous menti sciemment. Beaucoup se sont trompés de bonne foi,parce qu’ils ne connaissaient pas l’organigramme des différentes polices allemandes.
Dans sa plaidoirie, Me Merkel expliqua :
"Parmi le peuple allemand,et peut-être plus encore à l’étranger,on avait l’habitude d’attribuer à la Gestapo toutes les mesures de police,en tant qu’elles avaient un caractère tant soit peu politique,toutes les entraves à la liberté,tous les actes de terrorisme et les exécutions.Elle était devenue le bouc émissaire de tous les crimes en Allemagne et dans les territoires occupés et on entend aujourd’hui lui en faire supporter toute la responsabilité. Pourtant, rien n’est plus faux que cela. L’erreur repose sur le fait que toutes les polices,Police criminelle,Police de la Wehrmacht, Police politique ou SD étaient,sans distinction de l’action des différentes formations, considérées comme la Gestapo" [TMI, XXI, 529].
Immédiatement,après,l’avocat cita un exemple précis de confusion :
" l’assassinat du général français Mesny (fin 1944 ou début 1945) avait été attribué par le Ministère public à la Gestapo alors qu’il avait été commis par la Police criminelle" (Ibid., p. 530).
L’interpénétration entre les services dans les territoires occupés.
En France,une source de méprise fut la suivante : à Paris,les Allemands avaient installé leurs services de renseignement à l’Hôtel Lutetia. Il s’agissait de services de Police militaire qui dépendaient tout naturellement de la Wehrmacht. [13] Toutefois,par souci d’efficacité,les renseignements recueillis par leurs membres étaient ensuite transmis rue des Saussaies (ancien siège de la Sûreté nationale) et avenue Foch,où les Allemands avaient placé les services de leur police politique (Gestapo et SD).Cette Police centralisait les informations recueillies. [14] D’où,finalement,une certaine interpénétration entre ces organismes.
En novembre 1945,un officier de Police judiciaire,Roger Sirjean,qui avait enquêté sur l’activité de ces services, confirma :
"Il y a […] eu interpénétration entre,d’une part, les services de la Gestapo, et d’autre part, les services propres d’espionnage allemands du SRA [Service de Renseignement de l’Armée],et tous ces services,ou presque, sont camouflés sous une façade commode :celle des bureaux d’achat" [PGN, 3, p. 41].
Voilà pourquoi les agents de cette Police militaire furent erronément pris pour des membres de la Gestapo,alors qu’ils n’y appartenaient pas. Un grand nombre de services annexes constitués d’individus douteux
Ajoutons que cette Police militaire en vint à travailler avec des services constitués d’étrangers. En France,ceux qui employaient une majorité d’autochtones se trouvaient à Paris,rue Lauriston (groupe de Bonny-Lafon[15]), et à Neuilly-sur-Seine, boulevard Maurice Barrès (groupe Martin et Van Houten)[16]. Ceux constitués en majorité de Géorgiens,la plupart étaient des réfugiés qui vivaient en France depuis les années 20,furent installés à Paris,rue de Londres puis rue de Varennes (groupe Odicharia).
Mentionnons également la « bande des Corses » au boulevard Flandrin (groupe Léandri) ; la « bande de Berger Friedrich » rue de la Pompe, la « bande à de Mérode » rue Mallet Stevens (groupe Rudy), l’ « équipe de Courbevoie » rue Cardinet (groupe Olaff)... Tous étaient composés de personnages plus ou moins douteux,agissant avant tout par souci du gain et très peu par conviction politique. Lors du procès de la « bande Bony-Lafon », le Président parla des inculpés comme de « gens dont il ne saurait être,à aucun moment,question de placer le procès sur le terrain politique » [PBL, 1, p. 5.].
Une exception,le jeune Georges Collignon.
Il y eut tout de même des exceptions.Parmi elles,signalons le jeune Georges Collignon. Né le 4 juillet 1917, « appartenant à une famille très honorable »[17], il avait fait de bonnes études et gagnait,au début de l’occupation,entre 3 à 5 000 F par mois (sans compter les primes) comme courtier dans une agence de commissions (voir le document):
Son engagement dans la « gestapo géorgienne » n’eut donc pas pour cause la volonté de trouver un emploi,de chercher l’aventure ou de gagner de l’argent facile. Au procès de cette « gestapo », il fut l’accusé le plus digne et le plus respectable. Face à ses juges,il eut le courage d’expliquer franchement ce qui le conduisit à travailler pour l’occupant :
M. le Commissaire du Gouvernement Reboul :
Vous avez voulu passer dans la Résistance ?
COLLIGNON: J’ai voulu passer dans une troupe régulière.
Reboul. :
Vous estimez que les Résistants qui n’appartenaient pas aux troupes régulières ne sont pas des Résistants ?
COLLIGNON:
Ce n’est pas du tout dans cet esprit,mais étant donné que si l’on combat, on doit combattre autant que possible au grand jour,il n’y avait pas à se cacher. Si on combattait à l’extérieur,partant en Algérie,il fallait que je m’engage dans une armée régulière. Je n’avais pas à me cacher [...].
Reboul: C’est une opinion [Non ! C’est conforme aux textes des conventions de La Haye (NdA).].
M. LE PRÉSIDENT: Vous n’avez pas réussi ?
COLLIGNON : Non, je n’ai pas réussi.
M. LE PRÉSIDENT: Vous vous êtes retourné de l’autre côté ?
COLLIGNON:
Il fallait essayer de prévenir les cas que si présentaient [comprenez : les attentats communistes], parce que les Allemands menaçaient de faire des déportations et des exécutions en masse,telles que Chateaubriand. Il s’agissait de prévenir,dans une certaine mesure,d’après moi, les attentats contre l’armée,par exemple,occupante ou autre,qui pouvaient engager les Français dans des situations presque sans issue. [...]. Je n’ai pas parlé d’idéal. J’ai dit que j’étais un partisan de l’ordre.
Reboul: De quel ordre ?
COLLIGNON:
Que l’ordre règne,que nous ne soyons pas tout le temps menacés dans notre vie. [...] Quand il y avait un attentat,les Allemands,pour une personne de tuée, en prenaient 50 ou 100. C’est ce que je pensais [PGG, 1, pp. 7-8]
Plus tard,l’accusé persista :
COLLIGNON:
J’ai expliqué que j’avais fait cela dans un ordre d’idées spécial. Je n’admettais pas que,pour un Allemand tué, l y ait 50 Français tués. J’ai essayé de prévenir cela,c’est tout.
Reboul:
Il se trouve que vous avez tué des Français et que vous avez blessé des Français dans des opérations lamentables.
COLLIGNON:
L’origine est une chose, les faits sont autre chose. Les faits sont là, je ne les ai jamais niés.Alors, ensuite,j’ai été,pas forcé,mais je n’ai pas pu refuser. Je les avais derrière moi [...] [PGG, 4, p. 109].
Sans surprise,l’accusé fut finalement condamné à mort[18]. Personnellement,je lui tire mon chapeau. Salut à toi, G.Collignon (voir document).
Des services qui ne travaillent pas tous pour la Gestapo.
Cette précision effectuée,revenons à notre propos. Certains de ces services,comme ceux de la rue de Londres (la « gestapo géorgienne »), travaillaient pour la Police militaire ;ils dépendaient donc de l’Hôtel Lutetia. D’autres,comme ceux de la rue Lauriston (la « bande Bonny-Lafon »), dépendaient du SD, donc de l’avenue Foch[19]. Mais là encore,une confusion s’opéra,si bien qu’on parla de « gestapo française », de la « gestapo de Neuilly », de « gestapo géorgienne »…,comme si tous avaient directement dépendu de la rue des Saussaies et de l’avenue Foch, ce qui n’était pas le cas.
Une confusion soigneusement entretenue depuis la « Libération »
Après la « Libération »,cette confusion fut soigneusement entretenue. Lors du procès dit « de la gestapo géorgienne » (10-28 juillet 1945), le dialogue suivant put être entendu entre le commissaire du gouvernement et le jeune Georges Collignon :
M. LE COMMISSAIRE DU GOUVENEMENT:
[…] A ce moment, vous ne pouviez douter que vous travailliez pour la Gestapo ?
COLLIGNON:
On n’a jamais pu appeler cela la Gestapo. La Gestapo, c’est la police d’État.
M. LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT:
Vous ne pouviez pas douter que vous travailliez pour une Gestapo annexe ?
COLLIGNON:
On travaillait exactement pour la police militaire allemande,pour la Militarish Polizei…
M. LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT:
Je n’ai jamais su l’allemand et je n’ai pas du tout l’intention de l’apprendre. Pour moi,vous êtes des gens qui appartenaient à une Gestapo annexe, bien que vous répondiez négativement quand je vous demande si vous apparteniez à une Gestapo annexe. [PGG, 3, pp. 62-3.]
Aujourd’hui encore,la confusion demeure.Lorsque,début 2005,le quotidien Le Monde révéla les propos tenus par Jean-Marie Le Pen à Jérôme Bourbon pour l’hebdomadaire Rivarol sur l’Occupation,l’éditorialiste de Sud Ouest parla des « suppliciés de la rue Lauriston et autres geôles de la Gestapo »[20], comme si toutes les geôles de la zone nord avaient été celles de la Gestapo, ce qui était loin d’être le cas.
Tous ces faits démontrent qu’en France et ailleurs,la Gestapo ne fut pas la police omniprésente et omnipotente que l’on décrit aujourd’hui,loin s’en faut. C’est abusivement qu’elle est présentée ainsi,parce que depuis 1940, toutes les polices allemandes sont confondues avec elle.
La Gestapo a-t-elle été autorisée à torturer ? Le cas des « interrogatoires aggravés »
A cela,on me répondra :
« Vos pinaillages sont vraiment indécents. Quand un Français était arrêté,il lui était indifférent de savoir pour qui travaillaient ceux qui le battaient et qui le torturaient. Car vous ne pouvez pas nier que tous les services de police allemands, Gestapo ou autres, pratiquaient la torture. … C’est la seule chose qui importe » (voir document).
A l’appui de cette allégation,on invoquera deux décrets allemands parus en 1937 et en 1942,décrets qui autorisaient les « interrogatoires aggravés ». Teneur des ordonnances autorisant les « interrogatoires aggravés »
Cependant,qu’en est-il réellement ? A Nuremberg,les témoins Best et Hoffmann admirent sans problème l’existence de ces deux documents .[21] Pourquoi ? Tout simplement parce que ces décrets n’étaient nullement criminels. Interrogé, K. Best expliqua :
"[Heydrich] m’a dit qu’il avait reçu une autorisation pour cette mesure et que cette mesure était nécessaire pour couper court à certaines actions de conspirateurs et d’ennemis de l’État. Il ne s’agissait nullement d’obtenir des aveux. Il m’a également fait savoir […] qu’il s’était réservé pour chaque cas individuel la faculté de décider et que, par conséquent, il estimait que les abus étaient impossibles" [TMI, XX, 148].
[1] Le cinquième Commandement de Dieu déclare :
« Tout homicide éviteras ». Mais saint Thomas d’Aquin écrit :
« Si donc on tue quelqu’un pour défendre sa vie,on n’est pas coupable d’homicide » (Somme théologique, IIa, IIæ, question 64, art. 7). Plus généralement,la morale chrétienne ne condamne pas le fait de tuer un agresseur si les trois conditions suivantes sont réunies :
1°) Les biens défendus doivent avoir une grande valeur.Parmi ces biens on range : la vie, l’intégrité des membres, la chasteté et les biens temporels de grande valeur ;
2°) L’agresseur doit être injuste et actuel (comprenez :l’attaque doit être immédiate ou imminente comme lorsque l’agresseur tire son poignard,dégaine son revolver, épaule son fusil, appelle ses complices, excite son chien etc.) ;
3°) La défense ne doit causer de dommage à l’agresseur que dans la mesure où cela est absolument nécessaire pour repousser l’attaque. Ainsi ne doit-on pas tuer si la fuite est possible (à moins que la fuite ne soit déshonorante) ou si l’adversaire peut être rendu inoffensif par simple blessure (voy. Héribert Jones, Précis de théologie morale catholique [éd. Salvator, Mulhouse, 1959], § 215).
[2] Voy. la déclaration ministérielle du 22 mars 1940, lue par Paul Raynaud devant la Chambre des députés et par Camille Chautemps devant le sénat. Reproduite in extenso dans la Documentation catholique, n° 911, 5 avril 1940, col. 332.
[3] Voy. Maxime Weygand, Rappelé au service (éd. Flammarion, 1950), appendice VI : « Procès verbal de la séance du Conseil suprême tenu au château du Muguet,près de Briare, le 11 juin 1940 » (reproduction in extenso), p.596.
[4] Voy. A. Hitler, Discours. Du 28 avril 1939 au 4 mai 1941 (éd. Denoël, 1941), p. 95.
[5] Voy. W. Switalski, « La psychologie des récits de cruautés », paru dans : La culture allemande, le catholicisme et la guerre. Réponse à l’ouvrage français « La guerre allemande et le catholicisme » (éd. C.L. van Langenhuysen, 1916), p. 165.
[6] TMI, XXXVII, doc. F-571, p. 264.
[7] « Dr MERKEL.
Combien de fonctionnaires de la Gestapo environ étaient envoyés dans les territoires occupés ? Le chiffre approximatif ?
ACCUSÉ KALTENBRUNNER.:
Je ne peux pas vous le dire, même approximativement. Mais je crois avoir entendu parler, par exemple, pour la France, de 800 personnes. » (TMI, XI, 316).
[8] PAFG, audience du 24 février 1947, pp. 125 et 126.
[9] PGG, 1, p. 52.
[10] Voy. « Le procès du Maréchal pétain », compte-rendu sténographique, 8ème fascicule, p. 127, col. C.
[11] PBL, 3, p. 147.
[12] PBL, 6, p. 121, déposition d’André Wagner.
[13] « services dépendant le la Wehrmacht » (PAFG, audience du 24 février 1947).
[14] Notons que les services du SD en France travaillèrent avec un capitaine anglais qui,fait prisonnier,avait ensuite accepté de servir l’Allemagne. « Doué d’une intelligence et d’une mémoire prodigieuse,ainsi que d’un talent de dessinateur tel qu’il lui permettait de reproduire en portraits fort ressemblants, les personnes avec qui il avait été en relations,cet homme put faire arrêter des quantités d’agents alliés et de patriotes parachutés » (PBL, 1, p. 48. Pour confirmation à l’audience, voy. PBL, 3, 24-25).
[15] Lafon s’appelait en réalité Henri Chamberlin (né le 22 avril 1902). Une enfance malheureuse (orphelin de père et de mère à 11 ans,obligé de travailler aux Halles et de dormir sous les ponts jusqu’à 16 ans…) l’avait entraîné sur une pente dangereuse. A l’Armistice,il était titulaire de 9 condamnations pour vol,abus de confiance et émission de chèques sans provision.De plus,depuis le 5 février 1940, il était insoumis et recherché comme tel (PBL, 1, p. 9). Quant à son comparse Pierre Bonny,il avait été révoqué de ses fonctions d’inspecteur principal de Police suite au scandale Stavisky et à l’affaire du Conseiller Prince (PBL, 1, p. 122). Au départ, la « gestapo française » eut ses locaux au 23, av. Pierre Ier de Serbie. Mais vers le milieu de l’année 1941, elle déménagea au 93, rue Lauriston (PBL, 1, 6).
[16] Véritablement créé février 1941 (avant, il existait sous la forme d’un simple « bureau d’achat », rue Pétrarque, à Paris),le groupe fut scindé en deux un an plus tard. Gédéon Van Houten resta boulevard Maurice Barrès pendant que Frédéric Martin s’installa boulevard Victor Hugo. Un an plus tard, ce dernier déménagea rue du Général Dubail à Paris.
[17] PGG, 1, p. 152.
[18] Voy. Le Monde, 5 août 1945, p. 3.
[19] « L’organisation de la rue Lauriston dépendait en principe de l’organisation allemande SD de l’avenue Foch, qui y avait détaché deux sous-officiers allemands Hess et Willy Karhof » (PBL, 1, pp. 34-5).
[20] Voy. Sud Ouest, 14 janvier 2005, p. 2.
[21] « Dr MERKEL.
Comment en est-on arrivé aux interrogatoires que l’on a appelés “aggravés” ?
TÉMOIN BEST.
En ce qui concerne ces interrogatoires, Heydrich a publié un décret en 1937 […] » (TMI, XX, 148).
« M. BIDDLE. Était-ce un décret écrit ?
TÉMOIN HOFFMANN.
C’était un décret écrit du chef de la Police de sûreté et du SD […].
M. BIDDLE. Quelle était la date du second décret ?
TÉMOIN HOFFMANN. 1942. » (Ibid., p. 196).
..../.....
Spartacus Kouros Messages : 2078 Date d'inscription : 13/03/2010 Age : 58 Localisation : Les arènes
Sujet: Re: L’action de la Police allemande en France occupée. Mer 2 Jan - 16:02
Peu après,K. Hoffmann confirma en tout point :
"Le premier décret stipulait que pour lutter contre les organisations hostiles au Reich, et dans les cas où on ne disposerait plus d’aucun autre moyen,l’individu impliqué pourrait recevoir un certain nombre de coups de bâton. A partir d’un nombre de coups déterminé,il fallait faire appel à un médecin. Cette disposition ne pouvait pas être appliquée pour obtenir des aveux au sujet d’un individu. L’autorisation devait, dans chaque cas,être demandée au chef de la Police de sûreté et du SD "[TMI, XX, 197].
Puis il précisa que le deuxième décret pris en 1942 « n’autorisait que le recours à des mesures moins graves que les coups de bâtons » telles que « l’obligation de rester debout pendant l’interrogatoire » ou d’exécuter « des exercices fatigants » (Id.).
La mauvaise foi du Tribunal de Nuremberg.
Notons que sur ce sujet,le Tribunal révéla une nouvelle fois sa malhonnêteté. En effet,parmi les autres justifications qu’en 1937,R. Heydrich avait données à K. Best, figurait le fait,indéniable,que « la Police,à l’étranger,utilisait des méthodes analogues» (TMI, XX, 148),ce qui était l’évidence même. Lorsqu’il interrogea E.Kaltenbrunner,l’avocat de la Gestapo voulut souligner cette réalité. Voici ce que l’on put alors entendre :
Dr MERKEL:
Savez-vous ce qu’étaient les interrogatoires poussés ? Ces interrogatoires existent-ils également dans d’autres pays ?
ACCUSÉ KALTENBRUNNER:
J’étais président de la commission internationale de Police criminelle et j’ai eu l’occasion, à l’automne 1943,de parler sur ce sujet au cours d’une séance. Je peux déduire de cette réunion et de la lecture de la presse étrangère, que toutes les polices se servent de ces méthodes d’interrogatoires poussés.
Dr MERKEL: Une fonctionnaire de la Police pouvait-il…
LE PRÉSIDENT:
Docteur Merkel,ce qui s’est passé dans les commissions internationales de police ne me semble pas très utile aux débats.
Dr MERKEL:
Je voulais simplement lui demander si ces interrogatoires poussés étaient utilisés en Allemagne et dans d’autres pays.
LE PRÉSIDENT:
Cela ne nous intéresse pas [TMI, XI, 320-1].
On le voit : dès que la Défense voulait invoquer l’argument du « tu quoque » (toi aussi tu l’as fait) pour démontrer qu’à la base,au moins,il n’y avait dans telle ou telle façon d’agir rien d’anormal,le Tribunal interrompait immédiatement en alléguant que c’était hors sujet.
Un exemple flagrant de cette volonté d’obstruction systématique survint le 19 mars 1946,alors que l’Accusation interrogeait H.Göring. Cherchant à démontrer que les nationaux-socialistes auraient conspiré très tôt pour déclencher une guerre d’agression,le procureur Jackson produisit un document du Conseil de Défense du Reich (le EC-405). Daté du 26 juin 1935 et portant la mention « Secret »,il parlait de mobilisation. H. Göring déclara qu’il n’y avait là rien de suspect,car il s’agissait de simples « préparatifs généraux de mobilisation,tels que tous les pays en font » (TMI, IX, 539).
R. Jackson crut bon alors de lui rétorquer :
« Mais ils étaient d’une nature telle qu’ils devaient être gardés absolument secret vis-à-vis des puissances étrangères ? » (Id.)
Ce qui lui valut la réponse ironique suivante :
ACCUSÉ GÖRING:
Je ne crois pas me rappeler quelque part l’annonce des préparatifs de mobilisation entrepris par les Etats-Unis [Id.].
C’était le bon-sens même,car il va de soi qu’aucun pays ne rend public ses plans de mobilisation offensive ou défensive (voir document).
Mais cette réponse déplut fortement au procureur ;celui-ci accusa H. Göring « de faire preuve de mauvaise volonté » et d’adopter « une attitude méprisante et arrogante envers le Tribunal » (Ibid.,pp. 539-540).
Sans surprise,il fut soutenu par le Président qui déclara :
"Une référence aux secrets des Etats-Unis,en ce qui concerne la mobilisation, est non pertinente,et la réponse n’a pas à être faite […]. En ce qui concerne cette réponse en particulier,j’estime qu’elle n’était pas du tout pertinente "[Ibid.,p.542].
Cette façon d’agir fut très tôt dénoncée par Maurice Bardèche. Dans son ouvrage Nuremberg ou la terre promise, il écrivit :
"[…] voici où commence la mauvaise foi. D’on côté, on fouille toutes les archives, on sonde les murs, on scrute les conseils,on utilise les confidences : tout est à jour,les conversations les plus secrètes des hommes d’État allemands sont exposées sur la table des preuves,on n’a même pas oublié les écoutes téléphoniques. De l’autre côté,le silence. On reproche à l’état-major allemand des études d’opérations qu’on a retrouvées dans ses archives : vous prépariez la guerre, lui dit-on. A qui fera-t-on croire que,pendant ce temps, les autres états-majors européens ne faisaient aucun plan, ne se préparaient à faire face à aucun cas stratégique ? A qui fera-t-on croire que les hommes d’État européens ne se concertaient pas ? A qui fera-t-on croire que les tiroirs de Londres et de Paris sont vides et que les préparatifs allemands ont surpris des agneaux qui ne songeaient qu’à la paix ? Lorsque la défense demande au Tribunal à déposer des documents analogues sur la politique française d’extension de la guerre,sur les plans de l’état-major français, sur les crimes de guerre alliés, sur les instructions données à l’état-major anglais aux commandos,sur la guerre des partisans en Russie,on lui répond que cela n’intéresse pas le tribunal et que la question soulevée « est absolument hors de propos ». Ce ne sont pas les Nations Unies qui sont mises en accusation, leur dit-on. C’est fort juste : mais alors pourquoi appeler histoire ce qui n’est qu’un savant éclairage de scène ? Là encore, il n’y a que la moitié de la terre qui est éclairée. C’est en se fondant sur de telles apparences qu’on niait autrefois que la terre fût ronde. L’histoire commence quand on répartit également la lumière,quand chacun dépose ses documents sur la table et dit : jugez. En dehors de cela, il n’y a que des opérations de propagande" [22].
En pratiquant les « interrogatoires aggravés »,la police du IIIe Reich n’a nullement innové.
En autorisant les interrogatoires « poussés »,l’Allemagne hitlérienne n’a fait qu’imiter la plupart des polices étrangères. Cette vérité,il faut la dire,même si les juges de Nuremberg n’ont pas voulu qu’elle le soit. Les « interrogatoires aggravés » sont-ils devenus des séances de torture ?
Cette remarque faite,revenons à la Gestapo. Dans les territoires occupés, les « interrogatoires poussés » furent naturellement pratiqués. Pour le Danemark, ainsi, le témoin K. Hoffmann déclara :
"Ils ont été pratiqués. Pour expliquer cette circonstance,je rappellerai que l’activité des organisations de Résistance s’exerçait dans les domaines suivants :
1). Attentats contre des soldats allemands ;
2). Attentats contre les trains,les moyens de transport et les installations de la Wehrmacht, au cours desquels des soldats étaient également tués ;
3). Élimination des indicateurs et des gens qui travaillaient en collaboration avec la Police allemande ou pour d’autres autorités allemandes. Pour parer à ces dangers et pour sauver des vies allemandes,nous avons institué et pratiqué les interrogatoires de 3e degré,mais uniquement dans ce cas." [TMI, XX, 178-9].
Certains répondront en citant le maréchal von Rundstedt. Interrogé à Nuremberg comme témoin,il déclara que face à la Résistance, il fallait « agir avec énergie, bien entendu, mais en maintenant dans la lutte les procédés corrects du soldat »[23]. Or,dira-t-on,les « nazis » ne se sont pas contentés de pratiquer des interrogatoires « poussés » conformément aux deux directives de 1937 et 1942 ; ils ne se sont pas contentés non plus de condamner à mort et d’exécuter des francs-tireurs comme la loi internationale le leur permettait. Mus par leur doctrine monstrueuse, ils ont affreusement torturé ceux qui tombaient entre leurs mains…
Cette question de la torture étant très importante,je vais m’arrêter. La thèse officielle née à Nuremberg.
A Nuremberg,l’Accusation prétendit naturellement que,partout où ils avaient dominé, les « nazis » n’avaient cessé de torturer leurs adversaires. Le 22 novembre 1945,le correspondant du quotidien Le Monde écrivit :
"[…] ce réquisitoire contre Göring et consorts,cette pièce monumentale, c’est l’histoire des terreurs et des supplices de l’Europe pendant plus de dix ans […] ; une histoire d’attentats, de meurtres, de tortures […].Partout où règnent les nazis, des déportations,des tortures,des camps,des chambres à gaz"[24]. (voir document)
Le 17 janvier 1946, dans son réquisitoire introductif, le procureur général français F.de Menton parla de « la France dont tant des siens furent torturés et assassinés dans les geôles de la Gestapo » (TMI, V,372). Peu après, il lança :
"nous nous trouvons bien devant une criminalité systématique découlant nécessairement d’une doctrine monstrueuse,servie avec une volonté délibérée par les dirigeants de l’Allemagne nazie". [Ibid.,p.383].
Les témoins de la défense contestent l’existence d’ordres supérieurs qui auraient autorisé le recours à la torture.
Seulement,une « criminalité systématique » mise en place pendant quatre ans à l’échelle européenne aurait nécessité des ordres généraux. Or,lors de leurs interrogatoires,les témoins (de la Défense) et les accusés furent formels :
- entre 1933 et 1945,aucun ordre n’était jamais parvenu aux services de Police qui aurait autorisé le recours à la torture contre les Résistants. Le 16 avril 1946, le Tribunal entendit Rudolf Bilfinger. A partir de 1943,cet ancien membre du RSHA avait été « expert des questions juridiques touchant à la Police » (TMI, XII, 52). Questionné par Me Merkel,il déclara :
"Aucun mauvais traitement ni aucune torture n’étaient autorisés et, à ma connaissance, rien de tel ne se produisit ;je ne sais si [en cas de bavure] tout le monde, ou un certain nombre de personnes en étaient informés. Moi, je n’en savais rien". [Ibid., p.58].
Quatre jours auparavant,l’accusé E. Kaltenbrunner avait parlé dans le même sens, comme en témoigne ce qui suit. :
Dr MERKEL:
Le Ministère public a soumis un grand nombre de preuves relatives à des tortures et à des sévices commis dans les régions occupées de l’Ouest,France,Pays-Bas, Belgique, Norvège. Le RSHA a-t-il donné des instructions pour faire commettre ces tortures ?
ACCUSÉ KALTENBRUNNER: Non, certainement pas.
Dr MERKEL: Comment expliquez-vous ces mauvais traitements ?
ACCUSÉ KALTENBRNNER:
Je n’ai jamais entendu parler des sévices qu’on reproche ici à la Police d’État. A mon avis, il s’agit probablement d’excès commis par certains individus, mais il n’y a jamais eu d’instructions données à ce sujet [TMI, XI,321].
L’accusé expliqua ensuite que pour les policiers coupables de mauvais traitements, il existait une « juridiction particulière » qui prononçait « des peines beaucoup plus sévères que la juridiction civile » (Id.). Trois mois plus tard, le témoin K. Hoffmann confirma :
Dr MERKEL:
Existait-il une réglementation uniforme prescrivant d’employer des mauvais traitements ou des tortures au cours des interrogatoires ?
TÉMOIN HOFFMANN:
Les tortures et les mauvais traitements étaient sévèrement interdits et passibles de sanctions devant les tribunaux.
Dr MERKEL:
Connaissez-vous des cas dans lesquels des interrogatoires auraient été jugés par des tribunaux ?
TÉMOIN HOFFMANN:
Je me souviens de deux employés de la Police d’État de Düsseldorf qui ont été jugés par le tribunal régulier pour avoir fait subir des mauvais traitements à des prisonniers [TMI, XX,178].
L’Accusation est incapable de produire un seul ordre allemand.
Naturellement,on pourra me dire que tous ces individus mentaient pour tenter de sauver leur tête dans l’immédiat ou dans un possible procès à venir. Seulement,c’était à l’Accusation de le démontrer en produisant ces ordres généraux dont l’existence était ici contestée. Le matin du 17 janvier 1946,le procureur général français releva le défi lorsqu’il lança (je souligne) :
"Ils [Les accusés] ont délibérément voulu,prémédité et ordonné ces crimes ou se sont sciemment associés à cette politique de criminalité organisée" [TMI, V, 395].
Mais quelques heures plus tard, lors de l’audience de l’après-midi, la baudruche se dégonfla.Concernant les « crimes de la Police »,F.de Menton concéda :
"Certes,aucun ordre précis,aucune directive détaillée,émanant directement de l’un des accusés ou d’un de leurs subordonnés immédiat et valable pour l’ensemble de la Police allemande ou pour celle des territoires occupés de l’Ouest, n’ont été découverts" [TMI, V, 403-4]. (voir document)
Huit jours plus tard,son adjoint Charles Dubost confirma le vide documentaire devant lequel l’Accusation se trouvait. S’adressant au Tribunal qui commençait à s’impatienter,il déclara (je souligne) :
"Il me faut apporter la preuve que les crimes commis individuellement par les chefs de la Police allemande dans chacune des villes,dans chacune des régions des pays occupés de l’Ouest,l’ont été, en exécution d’une volonté centrale, d’une volonté émanant du gouvernement allemand,ce qui nous permet de saisir un à un tous les accusés. Cette preuve,je ne pourrai pas la faire en vous apportant des documents allemands. Il faudra que vous teniez pour valable la lecture des témoignages que je vais commencer à faire" [TMI, VI, 168-9]. (voir la page 168,la page 169)
Ou encore :
"Nous ne pouvons pas apporter une preuve directe […] en vous présentant des documents signés Keitel, notamment" […] [Ibid., p.174].
L’Accusation n’avait donc rien trouvé :
- pas la moindre directive des autorités,
- pas la moindre instruction du plus petit subordonné. Rien.Le vide complet.
La malhonnêteté de l’Accusation lorsqu’elle prétend pallier l’absence d’ordres.
Afin de pallier ce manque,la délégation française cita quelques dizaines de témoignages épars,et même pas faits sous serment ,d’« atrocités nazies ». La plupart de ces récits concernaient des mauvais traitements dans des prisons sous l’occupation. Après discussion,le Tribunal les accepta en se fondant sur l’article 21 du statut qui l’autorisait à considérer comme « preuves authentiques les documents et rapports officiels […] dressés par les Commissions établies dans les divers pays alliés pour les enquêtes sur les crimes de guerre » [25].
Pourtant,sauf à effectuer des enquêtes précises,toutes ces déclarations étaient absolument invérifiables et donc n’avaient aucune force probante. De plus, même à supposer qu’elles aient décrit la réalité, un échantillon de témoignages épars,relatant quelques faits ponctuels survenus dans une époque troublée, pouvait-il pouver l’existence d’ordres supérieurs ? Non, naturellement. Dès 1948, M. Bardèche écrivit :
"La seconde malhonnêteté de la délégation française a consisté à remplacer ces preuves qu’on ne possédait pas,ces ordres qu’on ne possédait pas et dont il est incorrect de dire devant un tribunal qu’ils ont existé puisqu’on ne les fournit pas,par un dénombrement. Je ne fournirai pas de preuves,dit le délégué français,mais je vais faire venir tant de témoins,je déposerai tant de rapports,que ce sera la même chose qu’une preuve,car on verra que tout s’est passé de même partout,ce qui suppose des ordres". [26].
"Belle chose à dire dans le pays de Descartes ! Les garçons de quatorze ans, dans nos lycées,entendent dire que la première règle de la méthode scientifique est en effet de s’appuyer sur des dénombrements complets. Ce petit adjectif est essentiel,car ce petit adjectif,c’est l’honnêteté. Or la délégation française […] a horreur des dénombrements complets. La délégation française confond dénombrement et échantillon. Elle pique quelques rapports de police où l’on parle de massacre,et elle conclut :
- on massacrait partout,M. Keitel,de votre quartier général sur le Dniepr,vous aviez donné l’ordre de massacrer à Annevoye,à Rodez,à Tavaux,à Montpezat de Quercy […]. Tantôt la délégation française s’attache à des incidents particuliers qui,quelque pénibles qu’ils soient par eux-même, n’ont en aucune manière une portée générale : ainsi l’arrestation de la famille du général Giraud,sur laquelle il y aurait beaucoup à dire, ne prouve nullement que les familles des Résistants ont été systématiquement déportées en Allemagne,et nous savons tous qu’il n’en est rien. Une bonne statistique eût mieux fait l’affaire.Tantôt, elle brandit des petits bouts de papier qu’on renifle, qu’on examine, qu’on regarde en transparence avec des marques visibles de soupçon :c’est un officier de police de Saint-Gingolf (Var) qui certifie quelque chose sur les internements administratifs,c’est la Sécurité militaire du Vaucluse qui assure qu’on était mal en prison,c’est un chef d’état-major FFI qui a trouvé un instrument avec des boules.Pour ceux qui savent que la plupart des officiers de police improvisés à la libération ont dû être rétrogradés plus tard, qu’un certain nombre des membres de la Sécurité militaire sont maintenant incarcérés et que les chefs d’état-major FFI avaient souvent pris leurs galons la veille, ces « rapports » surmontés de tampons ne sont pas fort impressionnants. Une enquête sérieuse eût révélé que le régime des prisons variait suivant les prisons, qu’on pouvait être enfermé à Fresnes et ne pas être torturé,que certains services de police ont été corrects et que d’autres étaient composés de tortionnaires, que même les méthodes de la gestapo ont varié, en France,suivant les subalternes qui en avaient la responsabilité" [27].
En produisant ces documents,l’Accusation avait tout au plus démontré que, sous l’occupation,les forces de police allemande ou ayant travaillé pour les Allemands avaient commis certains excès.Mais dans des périodes troublées,qui n’en commet pas ? Là encore,il faut savoir remettre dans le contexte et ne pas imputer à une idéologie quelconque des actes dus à la pression du moment, lorsqu’on livre un combat désespéré à la vie et à la mort. Les tortures enregistrées sur la fin furent le fait de quelques auxiliaires esseulés
Dans sa plaidoirie,d’ailleurs,Me Merkel reconnut sans peine que,surtout vers la fin, des cas de tortures avaient été relevés « en nombre relativement important » (TMI, XXI, 560). Mais il imputa à « quelques individus » seulement,et notamment aux auxiliaires étrangers qui avaient travaillé pour le compte des Allemands. Ainsi parla-t-il des « brutalités exercées par des groupes composés de Français qui remplissaient des tâches quelconques au nom d’un quelconque service allemand » (Id). Il en conclut que :
"vers la fin de la guerre,dans toute la police allemande,il y a avait plus de gens qui n’étaient pas des policiers que des policiers en activité" [Id.].
Ici,le fanatique de la mémoire sourira de mon ingénuité et me remerciera de lui avoir fourni un argument important : « Certes, dira-t-il, les autorités nazies n’ont sans doute pas publié une directive écrite qui autorisait le recours à la torture. Certes, l’occupant lui-même n’a peut-être pas supplicié à grande échelle. Mais il a laissé ses auxiliaires effectuer cette sale besogne à sa place… »
Cet argument pourra impressionner le néophyte;mais il ne déstabilisera pas celui qui aura eu la curiosité de lire les comptes rendus des procès intentés, en France à la « Libération »,aux auxiliaires des Allemands.
Les quatre principaux furent :
- le procès de la « bande Bonny-Lafon » (décembre 1944) ;
- le procès dit « de la gestapo géorgienne » (juillet 1945) ;
- le procès dit « de la gestapo de Neuilly » (novembre 1945) ;
- le procès dit « des auxiliaires français de la gestapo » (février-mars 1947).
Les sténotypies sont consultables à la Bibliothèque de documentation internationale contemporaine (BDIC), à Nanterre. Je les ai lues. Les déclarations entendues lors des procès d’après-guerre réduisent à néant la thèse officielle.
Avant d’entrer dans le vif du sujet et de répondre à l’argument concernant la torture, je rapporterai deux faits très surprenant que j’ai découverts en étudiant ces documents. Ils remettent en cause la thèse officielle en noir et blanc,surtout lorsqu’il s’agit du « racisme nazi ».
Le n° 2 de la « gestapo géorgienne » était un… juif.
Le premier concerne la « gestapo géorgienne »,dont le chef s’appelait Chalva (ou Chaliko) Odicharia,habituellement présenté comme un aventurier trouble, né le 10 novembre 1903 à Kloni en Georgie,réfugié en France depuis les années 20.
Fait ignoré : le principal subordonné de cet Odicharia était un… juif.
Né le 4 mars 1902 à Kertch (Crimée),il s’appelait Henri Oberchmuckler[28] (voir document).
Son histoire vaut la peine d’être racontée :
- en 1939,alors qu’il résidait en France,il s’était porté volontaire et avait été incorporé dans le 21ème régiment de marche. Fait prisonnier en 1940,il fut interné au stalag VI D. Bien que juif,non seulement il ne fut pas déporté dans un camp de concentration, mais aussi,il parvint à devenir « interprète général » du stalag. - Fin 1941,il fut libéré comme blessé de guerre. - En avril 1942,il revint à Paris. Loin de se terrer,il travailla quatre mois dans une usine Opel comme interprète sous le nom d’Obermucker (preuve que les Allemands n’étaient pas très regardants). Ayant apparemment donné satisfaction,il fut envoyé en la même qualité à Buc, dans une usine de la… Luftwaffe. Mais là,il fut dénoncé comme juif. Subit-il alors la déportation ? Non.Il revint tranquillement à Paris et,désœuvré, il s’engagea chez Odicharia,c’est-à-dire au service de la Police allemande. Devenu chef du bureau des réquisitions,il y resta jusqu’à la fin,c’est-à-dire jusqu’en août 1944 lorsqu’il partit avec les Allemands,emmenant 800 000 F.[29]
Un juif comme n° 2 de la « gestapo géorgienne » en France,voilà qui est inattendu.
J’ajoute que H. Oberchmuckler ne fut pas le seul israélite à avoir travaillé pour la Police allemande.A son procès,il demanda au procureur général : « Avez-vous [vu] beaucoup de juifs être agents de la Gestapo ? » ; ce qui lui valut la réponse suivante : « Ici, j’en ai vu un avant vous,qui a été condamné à vingt ans de travaux forcés »[30]. Il s’agissait sans doute de Jacques Lazareff qui,après avoir été interné à Drancy, avait par la suite travaillé pour l’occupant en dénonçant ses coreligionnaires. Arrêté à la « Libération »,début juillet 1945,il venait d’être condamné aux travaux forcés[31] (voir documents).
Mohamed El Maadi : un musulman national-socialiste protégé de la « gestapo de Neuilly »
Qui était M. El Maadi ?
Un autre fait très surprenant et qui met à mal toutes les thèses sur la « folie raciste des nazis » concerne la « bande Bonny-Lafon ». On connaît l’histoire du grand muphti de Jérusalem qui soutint l’Allemagne hitlérienne. Mais on ignore généralement que la France a eu son chef musulman « collabo ». Il s’agit de Mohamed El Maadi. Dans son Dictionnaire commenté de la Collaboration française,Philippe Randa en parle, mais à trois reprises seulement,et au détour d’une phrase[32]. En voici plus sur ce personnage,ses prises de position et ses rapports avec la « gestapo française ». Né à La Sefia (Constantine),issu d’une famille arabo-berbère de noblesse ancienne, musulman convaincu,M. El Maadi était Chevalier de la légion d’Honneur, titulaire de la Médaille Militaire et de la Croix de Guerre. Le 10 avril 1941,il fonda le Comité Musulman de l’Afrique du Nord et le Cercle d’Etudes Nord-Africaine. Bien qu’ayant loyalement servi la France,il était mécontent de la façon dont la colonisation se déroulait en Afrique du Nord. Son principal objectif était le regroupement du Maroc,de l’Algérie et de la Tunisie en une fédération bénéficiant d’une totale autonomie administrative et garantissant l’égalité absolue entre colonisateurs et colonisés (notamment dans le recrutement des hauts fonctionnaires).
M. El Maadi s’engage aux côtés des Allemands.
Vint le débarquement allié du 8 novembre 1942. Les événements qui suivirent lui permirent de constater la façon les « libérateurs » se comportaient envers les autochtones,en comparaison avec les Allemands. Ceux-ci étaient bien moins racistes que ceux-là. En janvier 1943, à Paris, M. El Maadi fonda un mensuel, Er Rachid (le messager). Dès le premier numéro,il annonça clairement son objectif : - la lutte pour la libération de l’Afrique du Nord aux côtés de l’Allemagne. Ainsi pouvait-on lire :
"Notre devoir est de nous libérer de l’emprise judéo-anglo-saxonne. Aucune force ne pourra nous l’interdire. Aux côtés des Armées européennes,il nous faut entreprendre la bataille de libération de notre territoire" [33].
M. El Maadi demande de l’aide à la « gestapo de Neuilly »
Après quelques numéros,M. El Maadi connut de graves problèmes pour trouver le papier nécessaire à l’impression du mensuel. Que fit-il ? Il se rendit à Neuilly, au siège de la « gestapo française ». Là demanda à H. Chamberlin (dit Lafon) d’intervenir en sa faveur pour l’obtention de papier. [34] Ce dernier éconduit-il le « bicot » ? Nullement. Il intervint au contraire auprès de trois grands journaux de l’époque et M. El Maadi reçut « une aide substantielle » [35]. Er Rachid put ainsi paraître jusqu’en août 1944,tiré sur les presses du journal collaborationniste Paris-Soir.
Voici maintenant quelques extraits relevés dans ce mensuel (sauf indication contraire, il s’agit des éditoriaux de M. El Maadi, paraissant toujours en première page).
El Maadi va plus loin que Le Pen sur l’occupation de la France.
Sur l’occupation de la France (5 novembre 1943) :
"Depuis plus de trois ans,la France connaît l’occupation de son territoire par un adversaire vainqueur. Quoi que puissent arguer les prétendus patriotes, cette occupation est des plus bénignes. Elle pouvait être draconienne, mais l’Allemagne nationale-socialiste et son chef,agressés cependant, en jugèrent autrement en lui laissant sa souveraineté et son patrimoine […]".
Une occupation « des plus bénignes » : Jean-Marie Le Pen n’a pas été aussi loin en janvier 2005 dans Rivarol.
Des « libérateurs » plus racistes que l’occupant.
"Sur le comportement des « libérateurs » et des « croisés de la civilisation » comparé à celui des Allemands :
- 5 août 43
Les Allemands à peine débarqués en Tunisie allouèrent à la main-d’œuvre autochtone, employée par leurs différents services,des salaires identiques à ceux des travailleurs de la même catégorie de France,d’Allemagne ou de Norvège,alors que de l’autre côté les « libérateurs »,quand ils daignaient ne pas payer en monnaie de singe, offraient 10 à 18 francs pour 12 heures de travail. Le racisme allemand,dada de la conscience universelle,parlons-en ! Soldats et officiers entretenaient des relations les plus correctes et les plus cordiales avec les autochtones. Au cours d’un séjour de deux mois en Tunisie,je n’ai enregistré ni doléance ni plainte. Par contre,sur l’attitude et la conduite des « libérateurs »,j’en ai appris de belles […]. Alors qu’à Tunis [sous occupation allemande] les transports publics étaient libres pour tout le monde,de l’autre côté les autochtones voyageaient dans des wagons spéciaux". (voir couverture d’un numéro d’Er Rachid)
- 5 novembre 1943
Et si j’admets et préconise le racisme quand il signifie sélection et protection contre le métissage d’une race déterminée afin de lui conserver ses vertus, je réprouve le racisme camouflé des démocraties qui,sous couvert de la civilisation, assassine et dépouille les plus faibles.
Ce texte est à rapprocher d’un article totalement oublié de Georges Suarez (directeur politique de Gringoire) qu’Er Rachid publia le 3 mai 1944. Intitulé « Racisme et xénophobie »,son auteur (qui sera fusillé à la « Libération »)
écrivait :
"Le racisme comme toutes les doctrines a ses faux prophètes. Ce n’était pour Gobineau qu’un moyen de défendre la race. C’est,pour certains de ses interprètes,un instrument de haine contre les autres […]. Ce qu’en haut on appelle le racisme devient en bas de la vulgaire xénophobie. Alors,les mesquines rivalité de la vie,de coude à coude populaire,et des basses querelles de la ruelle s’échappent des propos d’échoppe et de trottoir, où la couleur de peau, la race et la religion se traduisent en griefs et insultes […]. Ce que le racisme demande justement,c’est que la race conserve intacte les caractéristiques de son histoire, et de son rapport au progrès humain. Il ne détruit pas,mais il restitue à chacun sa part pour qu’il l’augmente et la fasse mieux contribuer aux besoins de l’humanité. Le racisme n’implique pas la haine entre les races, mais stimule l’effort de tous. Il ne catalogue pas l’espèce,mais la sélectionne. Il rend aux lois biologiques toute leur force,et à la nature une logique trop longtemps bafouée […]" [36].
Les racistes primaires qui peuplent aujourd’hui les rangs de la droite nationale feraient bien de méditer ces sages enseignements. Poursuivons cependant avec les éditoriaux de M. El Maadi. La victoire allemande ardemment souhaitée
- 20 mai 1943 :
"Nous affinités intellectuelles et raciales nous rapprochent de l’Europe. Nos idéaux musulmans,confrontés aux idéaux nationaux-socialistes de la Nouvelle Europe se révèlent,fait troublant,identiques. Au cours d’un voyage récent en Tunisie,nous avons pu estimer à sa juste valeur cette réalité en observant les relations germano-musulmanes. A aucun moment de notre existence,nous n’avons constaté entre deux peuples s’ignorant la veille et de culture différente,un tel courant de sympathie ni une telle compréhension".
- 26 avril 1944 :
"Si nous épousons la cause de l’Europe et celle de l’Allemagne en particulier, c’est après avoir examiné,médité et confronté son idéologie à celle de ses adversaires. Cet examen nous convainc qu’elle seule ne nourrit pas le rêve criminel de nous assujettir et de nous exploiter à fond".
- 10 octobre 1943
"Notre sympathie est toujours acquise à l’Allemagne nationale-socialiste qui a toujours prodigué son amitié désintéressée à l’Islam opprimé et exploité sans vergogne par les démocraties. Notre attachement reste indéfectible à l’Europe révolutionnaire qui nous élèvera à la dignité humaine. Ici,non seulement nous faisons des vœux pour une victoire allemande mais nous sommes décidés à y aider par tous les moyens,y compris celui des armes".
- 25 octobre 1943
"La victoire de l’Allemagne nationale-socialiste,c’est la fin de l’exploitation d’un peuple par un autre ;c’est la fin des iniquités,c’est enfin la lumière […]. […] l’événement que nous attendons : - l’instauration en Afrique du Nord d’un national-socialisme qui nous permette de naître et de mourir dignement,sans ces magisters qui nous cognent les doigts de leurs règles d’acier.
Des Arabes dans la LVF.
- 20 août 1943
"Notre devoir et notre intérêt sont d’êtres aux côtés de l’Europe qui nous a ouvert des horizons insoupçonnés et inespérés,et non d’écouter les voix traîtresses des propagandistes,des judéocraties prêcheuses de « l’attentisme » qui augmentera notre esclavage. Je sais,cette attitude exige de la bravoure,et le sacrifice de soi ;il faut être animé d’un patriotisme et d’un stoïcisme hors pair,il faut se libérer de tous les liens terrestres, il faut,en un mot,avoir et la terre natale et sa race « dans la peau »,il faut être soldats. Vous l’êtes,arabo-berbères,mes frères "[…] [pp. 1 et 8].
Répondant à cet appel,des Nord-africains s’engagèrent dans la LVF. Dans son éditorial du 20 décembre 1943, M. El Maadi écrivit :
"Quant à l’Europe nouvelle que construisent l’Allemagne et ses Alliés, les Arabes la vénèrent et mettent tous leurs espoirs d’émancipation en sa victoire. Comme gage,ils ont formé,eux,une minuscule émigration,une magnifique Légion , ceci est une confidence,dont les effectifs sont sensiblement égaux à ceux de la LVF formée par la France qui a donné librement des centaines de milliers d’hommes aux armées « judéocratiques ». L’Islam entier est aux côtés de l’Allemagne ;en entier il prie pour sa victoire, malgré l’agitation de quelques hommes d’Etat". (voir le document)
Parmi les volontaires figurait l’Afro-français Louis Joachim-Eugène,qui devint attaché à l’État-major allemand de la LVF avant de s’occuper de la main-d’œuvre arabe dans l’organisation Todt (voy. plus bas).
[22] Voy. M. Bardèche, Nuremberg ou la terre promise (éd. des Sept Couleurs, 1948), pp. 62-4.
[23] « Mon point de vue [sur la Résistance] […] est le suivant : on déchaîne ici, derrière le front de l’armée ennemie, une guerre sans aucune règle qui doit forcément amener le malheur immense sur le peuple du pays en question. Aucune armée au monde ne peut, à la longue, accepter tranquillement la chose. Elle doit, dans l’intérêt de ses propres troupes, de leur sécurité et de leur possibilité de vivre, agir avec énergie,bien entendu, mais en maintenant dans la lutte les procédés corrects du soldat » (TMI, XXI, 36).
[24] Voy. Le Monde, 22 novembre 1945, p. 1.
[25] Pour l’article 21, voy. TMI, I, 17. Sur le fait que le Tribunal accepta les « témoignages » produits par la délégation française en vertu de cet article, voy. TMI, VI, 173 :
« LE PRÉSIDENT: Le Tribunal a envisagé les arguments qui lui ont été présentés,et il pense que le document,versé par le Ministère public français,est un document d’une commission instituée pour les enquêtes sur les crimes de guerre, aux termes de l’article 21 de la Charte. »
[26] « Nous nous appliquerons à démontrer que, partout, les tortionnaires ont appliqué les mêmes procédés et n’ont pu le faire qu’en exécution d’ordres qui leur avaient été donnés par leurs chefs » (déclaration de C. Dubost, TMI, VI, 178).
[27] Voy. M. Bardèche, op. cit., pp. 122-3.
[28] « Oberchmuckler est,en effet,israélite et son père est déporté en Silésie » (PGG, 1, 75 et 151).
[29] Pour toutes ces informations, voy. PGG, dossier 1, pp. 151-2. On lit : « Volontaire en 1939, au 21ème régiment de marche, prisonnier en 1940, [interné au Satlag VI D, il exerce la fonction d’interprète général (PGG, dossier 2, p. 41)] il est libéré comme sanitaire fin 1941 [en vérité, il a été rapatrié car il était un blessé de guerre : « J’ai été rapatrié, blessé de guerre, et non pas comme infirmier » (Ibid., p. 40).] et est entré à Paris en avril 1942 après un séjour de quelques mois à Avignon. « Il est resté ensuite 4 mois comme interprète à la maison allemande Opel [sous le nom d’Obermucker (Ibid., p. 41).], puis il fut envoyé en la même qualité à Buc, à la Luftwaffe. « Dénoncé comme israélite, il dut quitter son poste et s’engage chez Odicharia, qu’il ne connaissait pas auparavant, comme interprète à 10 000 Frs par mois. » « Il devient rapidement chef de son bureau des réquisitions […]. « Il a quitté son domicile le 24 août [1944], déménagé par camions allemands. Il avait réalisé 800 000 Frs d’économies (sic) à leur service ».
[30] PGG, dossier 2, p. 55.
[31] Voy. Le Monde, 17 juillet 1945, p. 7.
[32] Voy. P. Randa, Dictionnaire commenté de la Collaboration française (éd. jean Picollec, 1997), pp. 199, 649 et 651.
[33] Voy. Er Rachid, n° 1, janvier 1943.
[34] « LAFON :Il m’avait demandé si c’était possible de lui demander du papier pour son journal » (PBL, 3, 104).
[35] « Vers le milieu de 1943, un Arabe,El Maadi, chef du groupement musulman de France, vint trouver Lafon à la rue Lauriston pour intéresser ce dernier à la publication d’un journal en langue arabe [faux : en langue française] qu’il rédigeait et qui se nommait Er Rachid. « Grâce à une intervention de Lafon auprès des journaux Paris-Soir, L’Echo de la France et les Nouveaux Temps […], El Maadi reçut une aide substantielle. Er Rachid reçut le contingent de papier et fut tiré sur les presses de Paris-Soir. » (PBL, 1, p. 58-9).
[36] Voy. Er Rachid, 3 mai 1944, p. 1.
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Spartacus Kouros Messages : 2078 Date d'inscription : 13/03/2010 Age : 58 Localisation : Les arènes
Sujet: Re: L’action de la Police allemande en France occupée. Mer 2 Jan - 16:08
Sur le « racisme nazi »
- 2 février 1944, p. 4. Article intitulé :
« De retour du Reich,un Algérien nous parle de l’Allemagne en guerre » :
"Parti volontaire pour le travail, notre camarade Amitouche vient d’être réformé. […] Nous étions très bien vus par les ouvriers allemands et même copains. Vraiment,il a fallu que je revienne de quelques idées en fréquentant de braves gens qui n’avaient aucune haine pour les Français en général et estimaient les Nord-africains".
Nos rapports avec la population étaient excellents.Partout nous étions accueillis avec politesse et même gentillesse ; on nous plaignait d’être loin du bon soleil, on avait des phrases cordiales pour évoquer notre pays.
Remarquez que nous n’étions pas tristes.Pour l’Aïd-el-Kébir,les Allemands et les Français de Bitterfeld nous ont tous aidés à organiser une fête. Nous avons reçu des gâteaux,du thé,du sucre. Nous avons pu cuisiner honorablement quelques petits plats. Rien ne nous manqua,pas même une partie de concert franco-arabe parfaitement réussie.
A cette époque, l’organisation Todt employait des Arabes et avait aménagé une antenne au 26 rue Bayard,à Paris,qui gérait les problèmes. Le responsable était l’Afro-français M. Louis Joachim-Eugène,ex-attaché à l’Etat-major allemand de la LVF,devenu Délégué général de la main-d’œuvre africaine de l’organisation Todt" (voy. Er Rachid, 16 février 1944, p. 4).
Dans la livraison du 16 février 1944,L. Joachim-Eugène publia un article intitulé :
« La situation des nègres français est depuis longtemps réglée avec l’occupant ».
L’auteur commençait par rappeler qu’au début de 1943,suite à une décision d’une administration française quelconque, les musiciens de couleur n’avaient plus été autorisés à exercer dans les cabarets et les boîtes de nuit en France occupée. Il poursuivait ainsi :
"Ce fut une excellente occasion de discuter franchement de la question avec les autorités supérieures allemandes qui, je dois l’avouer,ont eu à mon égard une attitude toute de bienveillance et de compréhension. Des congénères avaient, en effet, donné du leur sur le front de l’Est pour le triomphe de la cause eurafricaine; d’autres y étaient encore ;certains même y avaient perdu leur vie. Dans le Reich national-socialiste,j’avais vu,de mes yeux vu,des noirs [comprenez Nord-africains] décorés de la Croix de Fer ou portant l’insigne du Parti ;d’autres encore occupant à l’institut pour la connaissance de l’étranger des postes auxiliaires linguistiques.Et tous entourés de considération et d’estime. Je ne pouvais donc pas me résoudre à croire à un prétendu racisme anti-nègre « made in Berlin ». Aussi ai-je obtenu sans peine toute satisfaction.
En effet,par une lettre datée du 12 juin 1943,les autorités d’occupation me donnaient l’assurance que, désormais,les ressortissants des colonies françaises seraient,par elles,considérés comme véritablement Français et que,par conséquent, rien ne s’opposerait à l’exercice de leur profession,dans quelque branche que ce soit" (p. 4)
En France,des Arabes vont lutter contre le maquis.
Peu à peu, du fait des relations entre M. El Maadi et l’occupant,certains pensèrent à recruter des Nord-africains pour le compte de l’Allemagne. D’après Lafon,l’idée première vint des services allemands de l’avenue Foch dont le chef à l’époque, M. Boemelburg, « connaissait El Maadi et son secrétaire »[37]. « Boemelburg,dit-il,voulait recruter des Nord-africains comme il avait recruté des Georgiens » (Id.). Il souhaitait les utiliser uniquement « pour la garde » des locaux allemands.[38] Finalement,après plusieurs entrevues, « 300 Arabes environ » furent recrutés et groupés dans une maison de Neuilly,au 21 avenue de Madrid". (PBL, 3, 107)[39]
Après le renvoi d’une centaine d’éléments qui n’avaient pas donné satisfaction, cinq sections de trente à cinquante hommes furent mises sur pied. [40] Les Arabes enrôlés furent « dotés de tenues spéciales » (fournies par… le juif Joseph Joinovici) et armés par les services allemands de l’avenue Foch. [41] Leur solde s’élevait à 5 000 F par mois, « payée par les Allemands de même que les dépenses d’équipement »[42].
En février 1944,les sections furent ventilées à Limoges,Périgueux,Tulle et Montbéliard afin de… combattre le maquis,ce qu’elles firent avec des fortunes diverses.
Tous ces faits anéantissent la thèse officielle en noir et blanc. On ne le répétera jamais assez : sur la deuxième guerre mondiale et le national-socialiste,l’histoire vraie reste à écrire…
(voir deux dessins parus dans Er-Rachid,fustigeant la résistance et les bombardements alliés)
Le prétendu « arbitraire » de la Gestapo La thèse officielle.
Cela dit, revenons à la Gestapo. Depuis 60 ans, on parle volontiers de l’ « arbitraire » des polices allemandes qui,dans les territoires occupés,auraient arrêté un peu n’importe qui,sur simple présomption ou même sans aucune raison. Dans son réquisitoire introductif prononcé le 17 janvier 1946,le procureur général français à Nuremberg François de Menthon lança :
"Sur simple délation non vérifiée,sans enquête préalable et souvent sans que les personnes qui y procédaient y soient habilitées,des masses d’arrestation arbitraires ont eu lieu dans tous les pays occupés" [TMI, V,404].
Cette affirmation est cependant fausse.Les propos entendus lors des procès intentés aux auxiliaires des Allemands la contredisent nettement,tout comme certains témoignages parus peu après la « Libération ».
Certaines dénonciations restaient sans suites.
On y découvre tout d’abord que certaines dénonciations ne donnaient lieu à aucune action policière. En février 1944, ainsi,un membre de la « gestapo géorgienne » rapporta des bruits concernant l’existence d’un groupe de Résistants en plein Paris, au Quartier Latin. L’un d’entre eux s’appelait Frépin.Aucune suite ne fut donnée à ces déclarations.[43]
Trois mois plus tard,un auxiliaire appartenant à ce même service raconta que, dans la ville de Saint-Rémy-les-Chevreuses,des signaux lumineux avaient été effectués à partir du sol en direction d’avions alliés qui survolaient le pays en lançant des tracts. Là encore,faute de renseignements plus précis concernant ces prétendus signaux,l’affaire fut classée sans suite.
Or,dans les deux cas,il n’aurait pas été difficile de frapper arbitrairement et de procéder à certaines arrestations.
Mentionnons également l’affaire dite de la Prévoyance (nom d’une compagnie d’assurances). Lors du procès de la « gestapo géorgienne », le plus jeune des accusés (un certain Renato Gamma,d’origine brésilienne,qui avait 18 ans),raconta que, n’ayant fourni aucun renseignement depuis bien longtemps,son supérieur Terrile lui avait demandé d’agir. Le fait que sa mère travaillât à la Prévoyance lui donna une idée. Il prétendit qu’un réseau de Résistance existait au sein de cette entreprise et alla jusqu’à donner des noms au hasard. A l’audience, voici ce que l’on put entendre :
GAMMA: Ma mère travaillait à la Prévoyance [...]. J’ai fourni des noms.
M. LE PRÉSIDENT: Cela peut-être assez grave.
GAMMA: Terrile a pris des notes. Il m’a dit : « Je compte que tu suives l’affaire ».
Il n’y avait rien à suivre là-dedans.Quelques jours après, e lui ai dit : « Je ne peux rien faire.Je suis grillé,cela ne donne rien ». Il m’a répondu : « Bon, l’affaire est classée »[/i] [PGG, dossier 6, pp.77-8].
Peu après,le président du tribunal concéda :
M. LE PRÉSIDENT:
Il semble résulter du dossier qu’aucun membre du personnel de la Prévoyance n’a été inquiété.
Reboul: Terrile était vraiment de bonne composition !
M. LE PRÉSIDENT: Il devait avoir bu ces jours-là [Ibid., p. 79].
Une action ne s’achevait pas toujours par une arrestation.
Lorsqu’une action était tout de même entreprise,elle ne donnait pas forcément lieu à des arrestations. Par exemple,dans le cadre de la lutte contre les maquis en région de Romorantin, une première expédition fut menée par la police allemande dans « un village voisin de cette ville. Armés de mitraillettes,les Allemands et leurs auxiliaires français fouillèrent une à une,toutes les maisons du village.Tous les jeunes gens furent rassemblés sur la place et leur identité fut vérifiée. Aucune arrestation ne fut opérée »[44].
Signalons également deux faits qui se passèrent à Paris,rue Notre-Dame-des-Champs, chez les Pères de Sion. En juillet 1940,la Gestapo perquisitionna dans leurs locaux :
Dans la chambre d’un religieux absent,les perquisiteurs découvrirent une enveloppe fermée qui contenait une somme importante en dollars et en livres,dernières ressources qu’un Israélite traqué avait mises à l’abri.N’ayant pas d’ordre sur ce point, il remirent ostensiblement la liasse de billets dans le bureau. Mais cinq jours plus tard,ils revenaient pour s’en emparer. La somme avait disparu. Le Père ayant refusé de s’expliquer sur la disparition,ils n’insistèrent pas. [45]
Trois mois plus tard, une nouvelle perquisition eut lieu,au terme de laquelle une grande quantité de documents fut emportée. Subrepticement,un des religieux prit en photo les policiers qui déménageaient les caisses. Mais il fut trahi :
"Le lendemain,un officier de la Gestapo se présente en grande colère et demande le responsable. Le responsable se présente :on lui déclare qu’il est prisonnier. Cependant, les photos ayant été retrouvées chez le photographe qui devait les développer,le Père fut laissé en liberté" [Ibid., col. 403-4.].
Précisons également que,sauf cas d’urgence,lorsque plusieurs personnes répondaient au signalement d’un suspect recherché,on prenait soin de vérifier afin d’arrêter la bonne. Ainsi,dans une affaire dite « de Giverny »,un délateur anonyme avait donné le signalement d’un homme qui,disait-il,détenait des armes. Au procès Bonny-Lafon,l’exposé des faits déclarait :
"Escorté d’un sous-officier et de quatre soldats allemands,Lafon a mené une première enquête qui n’aurait pas abouti,plusieurs personnes répondant au signalement fourni pour le détenteur [des armes]" [PBL, 1, p. 47.].
Finalement,le commandant allemand (qui possédait sans doute un signalement plus précis) vint de Paris afin d’ « identifier en personne » le coupable. Se trompa-t-il ? Non,car l’individu désigné donna l’emplacement de « 36 cylindres de parachutage contenant 5 tonnes d’armes » (Id.).
Preuve que l’enquête fut menée jusqu’au bout pour éviter toute forme d’arbitraire.
Les personnes arrêtées et auxquelles on ne pouvait rien reprocher étaient très souvent relâchées.
Enfin,lorsque des arrestations étaient opérées,les personnes auxquelles on ne pouvait rien reprocher étaient finalement libérées (à moins qu’elles n’aient été retenues comme otages).La liste des exemples que je vais maintenant donner est assez longue, mais la gravité du sujet m’empêche de le traiter superficiellement.
En juin 1944,H. Oberchmuckler provoqua,par sa propre faute, un incident dans un débit de boisson et fit arrêter la caissière,Mlle Burgnières. Que lui arriva-t-il ? Emmenée par la Police allemande,elle « fut interrogée rue des Saussaies, puis relâchée »[46].
A la même époque,dans un bar de Toulouse,le patron refusa de servir un armagnac à un membre de la Police allemande (un certain Schweitzer). La conversation s’échauffa et,finalement,le trublion repartit sans avoir bu son verre. Peu après,le patron fut arrêté et emmené à la « Gestapo ». Plus tard, un employé du bar raconta :
"[…] quand il est revenu,il a dit qu’il avait passé un mauvais moment. Il parlait heureusement l’allemand et il a entendu tout ce qu’on disait ; il avait été arrêté pour insultes à l’armée allemande : c’était pour une question d’armagnac qu’on n’avait pas voulu lui servir [à Schweitzer] en bas. Enfin,on l’a relâché tout de même,mais il avait passé un mauvais moment".[47]
Le 23 juillet 1945,au procès de la « gestapo géorgienne »,Honoré Callas, un Résistant qui,sous l’occupation,avait été appréhendé avec plusieurs autres personnes,fut interrogé comme témoin. Voici ce que l’on put entendre :
D: Quand vous avez été arrêté, vous n’avez pas été arrêté seul ?
R: Il y avait [suivent plusieurs noms de Résistants] et deux autres personnes qui n’étaient nullement dans l’affaire,les nommés Prouvet et Devaut qui travaillaient à la maison Técalémit. Ces deux dernières personnes ont fait un mois de prison à Fresnes [PGG, dossier 11, p. 26.].
Comprenez : elles retrouvèrent la liberté après que l’enquête les eut définitivement mises hors de cause.
A ce même procès,la Cour lut la déclaration écrite d’un homme qui avait été arrêté en même temps que d’autres dans un garage lyonnais où des Résistants maquillaient des voitures. Le témoin racontait :
"Ces personnes ont subi un interrogatoire serré aux fins de connaître l’activité [du garage]. N’étant pas au courant de cette activité,je n’ai rien répondu, et j’ai été relâché 42 jours après" [48].
Lors du procès Bonny-Lafon,un jeune homme,Edmond Bidaud,vint témoigner. A Paris,il avait été tombé dans une souricière organisée dans une librairie qui servait de point de rendez-vous à une organisation clandestine, « Défense de la France ». Bien que faisant partie de ce groupe[49], il put justifier sa présence dans le magasin en alléguant qu’il était venu acheter un livre. N’ayant rien trouvé de suspect sur lui (ni arme, ni faux papier, ni lettre…), les agents de la Gestapo le relâchèrent immédiatement. Au procès de ces agents,le témoin déclara :
LE TEMOIN: [Lafon] m’a interrogé.J’ai justifié ma présence dans la librairie « Défense de la France », et j’ai dit que je venais dans cette librairie pour acheter un livre. J’avais effectivement acheté un livre. Il m’a demandé ma profession […]. Après cet interrogatoire,il a paru satisfait. Il m’a relâché […]
M. LE PRESIDENT: Vous n’avez pas été l’objet de violences ?
LE TEMOIN: Aucune [50].
Au même procès,un autre témoin,Françoise Thierry,raconta qu’elle avait été arrêtée à Montbard comme suspecte d’avoir soigné des maquisards et que son domicile avait été perquisitionné,mais sans résultat. Emmenée dans les locaux de la Feld Kommandantur,elle fut interrogée par P. Bonny. Voici ce que l’on put entendre au procès de ce dernier :
LE TEMOIN:
Il m’a demandé des explications sur des récépissés de lettres recommandées, des expéditions de colis,des choses absolument sans importance. Il m’a demandé de réfléchir. Je suis retournée dans la grande salle de la Feld Kommandantur.Puis ils m’ont rappelée. Ils m’ont relâchée en disant : Ne recommencez pas,vous pouvez partir [51].
Mentionnons également l’arrestation,durant l’hiver 42-43, d’ « un certain nombre de personnes » soupçonnées d’appartenir à « une organisation [de Résistance] tenant ses assises à Paris et à Gentilly, dont le chef aurait été M. Paul Appel, ancien député de la Manche ». Toutefois, d’après l’accusé P. Bonny, les renseignements à l’origine de cette opération furent « reconnus inexacts et les arrestations ne furent pas maintenues »[52].
Au procès de la « gestapo de Neuilly » vint témoigner un certain M. Caron. « Communiste ou sympathisant au parti communiste »[53], il avait arrêté le 12 novembre 1942 parce que « suspecté d’avoir, dans l’Oise, fait des sabotages sur la ligne de chemin de fer,coupé des fils téléphoniques et brûlé des meules de blé dans une ferme »[54]. Il fut interrogé au siège de la « gestapo de Neuilly »,boulevard Victor Hugo,et :
Au bout d’une douzaine de jours,Caron fut libéré,aucune preuve n’ayant été relevée contre lui […] [PGN, 1, p. 19].
Dans une déclaration écrite lue au procès de la « gestapo de Neuilly », la victime confirma :
"Cinq ou six jours après [mon arrestation],comme je n’avais toujours rien dit et qu’on n’avait aucune preuve contre moi,j’ai été transféré au troisième étage de l’immeuble,dans une petite chambre,et cinq ou six jours après,j’ai été libéré" [PGN, 4, p. 78.].
Voici un autre exemple très peu connu,mais très révélateur. En juin 1942,l’abbé Louis Foucher,vicaire de Montargis,confessa un Tchèque enrôlé dans l’armée allemande.Peu après,celui-ci déserta. Dans la Documentation catholique, on lit :
"Le vendredi 12 juin 1942,sur les 20 heures […],trois membres de la Gestapo pénétraient au presbytère,perquisitionnaient dans la chambre de l’abbé Foucher et, quand celui-ci rentra,il eut à subir un interrogatoire très court :
— Vous avez reçu chez vous un soldat allemand ?
— Pardon,un soldat tchèque.
— Il n’y a pas de soldat tchèque.Il n’y a que des soldats allemands. Or,vous l’avez reçu. Et puis il s’est évadé. Qu’est-il venu faire ?
— Je ne puis vous répondre,je suis lié par le secret professionnel [secret de confession].
— Il n’y a pas de secret professionnel devant la raison d’État. Parlez,ou nous vous arrêtons.
Devant son refus,l’abbé fut jeté dans l’auto de la Gestapo et transporté à Orléans où il fut enfermé dans une cellule de la prison militaire allemande [ce qui laisse penser que les policiers venus le prendre n’appartenaient pas à la Gestapo,mais à la Police militaire (NdA)] et tenu au secret le plus absolu pendant sept semaines.
Insinuations,mensonges,menaces,promesses,interrogatoires répétés pour essayer de le prendre en contradiction,torture morale,tout fut employé pour essayer de lui arracher son secret.
Enfin,un matin l’abbé vit entrer dans sa cellule deux officiers qui lui dirent :
"Monsieur,nous avons fait une enquête très sérieuse sur votre cas,et cette enquête ne nous a rien appris de nuisible de votre part contre l’armée allemande. Vous êtes donc libre.Nos excuses,Monsieur.Mais sachez que nous sommes très respectueux du secret de la confession "[55].
Mentionnons enfin une affaire beaucoup plus grave et qui aurait pu très mal se terminer sans le sang froid d’un agent français au service des Allemands. Dans le village d’Eymet (Dordogne),certains habitants avaient été dénoncés comme portant de l’aide aux parachutistes anglais (PBL, 3, p. 139). Dans sa lettre, le délateur anonyme avait donné plusieurs noms,dont ceux de MM. Reynaud et Lormand. C’était au printemps 1944.
Une expédition fut organisée.Le chef allemand procéda à l’arrestation des personnes mentionnées par le délateur anonyme,puis il donna à M. Raynaud cinq minutes pour parler,faute de quoi il serait fusillé avec d’autres habitants et le village brûlé.[56]
Un auxiliaire français de la « bande Bonny-Lafon »,Alexandre Villaplane, intervint alors et interrogea M. Reynaud. Celui-ci protesta son innocence et déclara avoir été victime d’une machination. L’auxiliaire parvint à obtenir du chef allemand un sursis de quelques heures à l’exécution[57]. Ayant continué son interrogatoire,il apprit d’un habitant du village,M. Morganti, que la dénonciation anonyme pouvait provenir de la belle-fille de M. Lormand, fâchée avec ce dernier parce qu’elle était en instance de divorce avec le fils Lormand. Cette femme avait déjà envoyé une première lettre de dénonciation (mais apparemment sans résultat)[58].
A. Villaplana fit immédiatement rechercher la suspecte :
"Je me suis informé et j’ai cherché à savoir où était la belle fille de M. Lormand ; on l’a trouvée à 500 mètres de la mairie,cachée derrière un arbre : elle attendait ce qui allait se passer. On l’a emmenée à la mairie […]. Au bout de trois quart d’heure d’interrogatoire,elle a fini par reconnaître que c’était elle qui avait envoyé les deux lettres anonymes contre son mari" [PBL, 3, p. 142].
Les membres des familles Reynaud et Lormand (ainsi que les autres victimes désignées) furent donc sauvés.Quelques jours plus tard,ils vinrent à Périgueux remercier A. Villaplane. (PBL,3, pp. 141-2).
Où est l’ « arbitraire de la Gestapo » ?
Certains furent relaxés au bénéfice du doute.
Certains Français eurent même le bonheur d’être relaxés au bénéfice du doute, parce que, même si des indices existaient,aucune preuve tangible n’avait pu être découverte contre eux. Citons tout d’abord le cas de Bernard Humbert :
- le 2 octobre 1941,il fut arrêté comme distributeur présumé de tracts communistes et livré aux Allemands.[59] Ceux-ci effectuèrent une enquête en bonne et due forme. Ils commencèrent par perquisitionner son domicile, mais sans rien trouver.[60]
Finalement,le procureur l’acquitta au bénéfice du doute.
B. Humbert fut cependant gardé comme otage suite aux attentats communistes qui venaient d’être perpétrés. [61] Dix jours plus tard,toutefois,il retrouva la liberté. Pourquoi ? Lui-même l’expliqua au procès de la « gestapo géorgienne » :
"Cela se passait le 14 novembre [1941],ma mère et ma femme prête à accoucher de mon sixième enfant sont venues rue Boissy d’Anglas pour me voir, et elles ont allégué la naissance de mon sixième enfant qui allait venir ;ils les ont fait attendre jusqu’à midi ;et vu que mon sixième enfant allait venir,ils m’ont libéré ensuite" [PGG, dossier 2, p. 90.].
H. Chamberlin,dit Lafon,fit relâcher « un très grand nombre de Français »
En décembre 1944,l’avocat de Lafon demanda au commissaire Clot,qui avait instruit l’affaire, si son client n’avait pas « profité du crédit incontestable qu’il avait auprès des Allemands pour obtenir la libération d’un très grand nombre de Français ». Le commissaire répondit :
M. LE COMMISSAIRE CLOT:
Cela ne fait pas de doute. Je dois à la vérité le dire,car Lafon,qui a trahi son pays,a fait beaucoup de mal à la France,a fait du bien à des particuliers,incontestablement [PBL, 6, p. 22.] (voir document)
D’autres arrêtés finalement relâchés.
Cela dit,poursuivons avec le témoignage de cet instituteur arrêté à Montbard par la Gestapo au motif qu’il aurait soutenu la Résistance locale.
Au procès Bonny-Lafon, il raconta :
"Je suis passé en jugement à Auxerre,et aucune preuve n’a été fournie contre moi. Je suis resté comme suspect et j’ai été condamné par la Cour martiale à un mois de prison et relâché" [62].
Citons également le cas d’Henri Phegnon,un assureur à Vernouillet (Seine & Oise) qui avait été arrêté parce que soupçonné de faits de Résistance. Les soupçons étaient fondés puisqu’il était le chef de la Résistance locale. Toutefois, aucune preuve tangible ne put être découverte. Après avoir été durement interrogé par des agents français, il fut transféré au siège de la Gestapo, rue des Saussaies. Là, il fut interrogé de manière correcte par des juges allemands :
"ceux qui,réellement,m’ont interrogé,rue des Saussaies,ont été corrects. J’ai été pressé de questions,toujours pour le même motif : on aurait voulu connaître le nom de l’organisation de laquelle je dépendais, quels étaient ceux qui étaient avec moi. Mais je n’ai pas subi de sévices du tout" [PGN, 5, p. 91].
Finalement,il fut libéré et voici ce que lui dit le juge allemand :
"j’ai plaidé votre cause.Je n’ai pas voulu vous envoyer en Allemagne. Et puis, enfin, je n’ai pas eu de preuves contre vous. J’ai demandé votre libération qui vous a été accordée" [PGN, 5, p. 92]. (voir document)
Lors du procès de la « gestapo géorgienne », d’ailleurs,le Président admit que les agents de la Gestapo étaient d’une « correction parfaite ». (voir document).
Mentionnons un autre cas encore plus surprenant,celui de M. Ouizam. M. Ouizam était un juif d’origine marocaine en situation irrégulière : sous l’occupation, il « se cachait à Paris avec de faux papiers »[63]. Manque de chance,il fut arrêté dans le cadre d’une affaire mineure liée au marché noir (vente de chronomètres). Lors de la perquisition,des documents furent découverts qui attestaient la fausse identité du personnage. [64]
Celui-ci et sa compagne furent donc emmenés au siège de la « gestapo de Neuilly » et interrogés. Que leur arriva-t-il ?
Martin interrogea Ouizam et voulut lui faire avouer qu’il était juif,espion et trafiquant d’or. Ouizam fut interrogé pendant 48 heures et frappé […].
Faute de preuves contre lui,il fut libéré ainsi que sa maîtresse,non sans avoir reçu des offres de « travailler » avec Martin,offres auxquelles il ne donna jamais suite. [PGN, 1,p.18].
Voilà donc un juif qui fut arrêté par la « gestapo » pour une affaire mineure et qui fut relâché peu après parce qu’aucune affaire grave n’avait pu lui être imputée sur la foi de preuves manifestes.
La Gestapo ne frappait pas sans preuves.
Tous ces faits tendent à confirmer que les polices allemandes (et en particulier la Gestapo) fonctionnaient comme toutes les autres polices du monde : elles n’agissaient pas sans preuves et relâchaient ceux qui avaient été mis hors de cause.
La Défense le rappelle dans les procès d’après-guerre.
Au procès des « auxiliaires français de la gestapo »,l’avocat d’un des accusés, Me Sialelly,eu le courage de le rappeler. Concernant l’arrestation et la déportation de MM. Colongelo, Rocca et Vitti (voy. plus bas), il déclara :
"Oui,mais encore,aussi féroces que soient les Allemands,quand on leur amenait quelqu’un qui venait d’être arrêté,il fallait encore qu’on puisse lui reprocher quelque chose" .[65]
Deux ans auparavant,au procès de la « gestapo géorgienne » l’accusé Renato Gamma avait clairement expliqué :
"[...] une dénonciation d’une personne n’appartenant pas à un service pouvait porter des fruits,mais quelqu’un appartenant à un service allemand devait apporter un renseignement accompagné d’une preuve quelconque. Je ne pouvais pas dire à Terrile : « Ces individus font de la Résistance ».
Terrile ne pouvait pas les arrêter comme cela.Terrile n’avait pas le pouvoir d’arrêter quelqu’un sans renseignements. Il fallait qu’il prenne les ordres plus haut ; il fallait une preuve tangible".[66]
La procédure.
Dans le cas présent,ces ordres à prendre « plus haut » émanaient du Dr Schmidt. Celui-ci travaillait pour le compte de la Gestapo en France. La procédure était la suivante :
- lorsqu’un des services de police avait repéré des suspects,un rapport était transmis rue des Saussaies et le Dr Schmidt décidait (peut-être après en avoir référé à un supérieur) de la suite à donner à l’affaire. Au procès de la « gestapo géorgienne »,une secrétaire qui avait travaillé dans ce service, Hélène de Tranze, expliqua :
"Les affaires ne pouvaient être décidées qu’après que le docteur Schmidt ait vu le rapport". [67]
Sans début de preuves,l’occupant ne perdait pas son temps.
Sachant qu’il disposait d’effectifs relativement restreints,l’occupant ne perdait son temps à ordonner des actions pour des cas peu importants,surtout si les preuves manquaient. Ainsi,dans l’affaire des prétendus signaux à Saint-Rémy-les-Chevreuses, l’indicateur s’était contenté d’apporter quelques tracts largués par les avions (« [Terrile] m’a demandé une preuve, quelque chose à l’appui. Je lui ai donné des tracts que j’avais [ramassés], et c’est tout »[68]). Or,des tracts ne constituaient pas la preuve que des signaux auraient été envoyés à cet avion. Voilà pourquoi aucune suite ne fut donnée à l’affaire…
D’où également le fait qu’avant de transmettre un quelconque rapport rue des Saussaies, les services de police recherchaient des preuves manifestes. Interrogée lors des audiences,H. de Tranze mentionna le cas d’un jeune homme arrêté pour trafic d’armes :
"Fernandez Parphyre a donné l’indication sur l’affaire.Terrile l’a menée jusqu’au moment où il a eu des preuves que ce jeune homme s’occupait de trafic d’armes. Le jour de l’arrestation,Odicharia est arrivé au bureau,a appelé plusieurs hommes dont Krammer et les autres que j’ai nommés "[PGG, dossier 2, p. 34.].
On ne saurait être plus clair :
- Terrile ne s’est pas contenté d’une dénonciation.
L’affaire étant relativement importante,il a ordonné la continuation de l’enquête jusqu’à l’obtention de preuves. C’est seulement lorsque celles-ci ont été découvertes que les autorités ont ordonné l’arrestation. Sans preuve,gageons que l’affaire aurait été classée,comme celles de la Prévoyance, des Résistants du Quartier Latin ou des signaux à Saint-Rémy.
Enquêtes approfondies.
Les exemples d’enquêtes approfondies préalablement à toute arrestation abondent.
En janvier 1943,un certain Serge Marongin[69], étudiant en pharmacie, livra aux Allemands des renseignements sur une organisation « qui aurait, selon lui,commis plusieurs attentats dans le métro et attaqué une escorte de prisonniers se dirigeant sur Fresne » (PBL, 1, p. 51). Il donna l’adresse du lieu de réunion, boulevard du Maréchal Lyautey. L’occupant agit-il sans attendre ? Non.Il chargea le Français Lafon de l’enquête. Celui-ci organisa « diverses surveillances de nuit » afin de bien repérer les individus impliqués. Une fois les suspects bien identifiés,neuf personnes furent appréhendées.[70]
Peu après,Marongin « apporta des renseignements sur l’organisation clandestine Défense de la France. Il s’agissait d’un groupement disposant d’une imprimerie et diffusant des tracts clandestins » (PBL, 1, p. 51).
Là encore,l’occupant se garda d’agir précipitamment :
Marongin aida à l’enquête préliminaire qui dura trois mois […].
"Les renseignements apportés tant par lui que par les enquêteurs étaient centralisés par Bonny qui établissait les fiches et les rapports dont Lafon remettait un double à Hess.
Au bout de trois mois,vingt noms de Résistants étaient révélés et le lieu de réunion et ses annexes connus […].
L’enquête terminée,le Conseil criminel Boemelburg qui,avec Kieffer, s’occupait de l’affaire a donné l’ordre de passer à l’action qui eut lieu le 26 juillet 1943 " [71]
144 arrestations furent opérées en deux jours,dont 15 furent définitives, les autres personnes ayant finalement été relâchées après avoir été mises hors de cause (PBL, 1, p. 53). Parmi les appréhendés figurait Geneviève De Gaulle,qui fut finalement déportée à Ravensbrück (PBL, 1, p. 54).
L’occupant mécontent lorsqu’il perd son temps avec un innocent
On le voit,les Allemands n’agissaient pas arbitrairement. Sauf urgence,ils menaient des enquêtes parfois très approfondies avant d’arrêter des suspects.
Lorsque,d’ailleurs, un ou plusieurs individus étaient arrêtés qui se révélaient finalement être des innocents,l’occupant était très mécontent d’avoir perdu son temps et son énergie. Mentionnons par exemple le cas où un agent français de la « gestapo de Neuilly », l’ancien policier L. Jouanneteau,avait fait arrêter un sympathisant communiste soupçonné de menées illégales.Après plusieurs interrogatoires,l’homme fut reconnu innocent et relâché. Très irrités,les supérieurs de L. Jouanneteau lancèrent à son encontre : « Voyez-moi ce ballot !... Un vrai policier ? Il nous apporte une affaire qui ne tient pas. »[72]
La Gestapo semait-elle la terreur ? Quatre anecdotes significatives.
On pourra me répondre que si les Allemands n’avaient pas agi arbitrairement, ils n’auraient pas semé partout la terreur comme ils l’ont fait. Ma réponse consistera à poser la question suivante :
- l’Occupant a-t-il vraiment semé la terreur,y compris chez les innocents ?
Quatre petites anecdotes très révélatrices démontrent que, là comme ailleurs, il faut se garder de toute conclusion hâtive.
Un préfet français refuse énergiquement d’exécuter un ordre de la Gestapo.
En décembre 1943,le préfet de l’Isère,Jacques Henry,fut averti par le commandeur de la Gestapo de Lyon qu’il allait recevoir un sac scellé contenant un cadavre. Il devait faire incinérer le sac sans l’avoir ouvert. Plus tard, il raconta :
"Mon refus indigné fut formel ;tout sac qui serait apporté à la Préfecture serait ouvert, tout cadavre identifié en présence du Procureur général et du maire de Grenoble, et la cause du décès recherchée.
Devant mon refus,le Commandeur s’emporta, me déclarant que « M. le Préfet régional de Lyon ne faisait jamais,en pareil cas,semblables objections ».
J’avais pour M. le Préfet régional Angeli une trop haute estime pour croire semblable allégation.
Mais pour confondre l’Allemand de mensonge,j’appelai aussitôt M. Angeli au téléphone.
Mis au courant,il me pria de passer l’appareil au Commandeur. Je conservai l’écouteur et pus ainsi entendre le Préfet régional démentir avec mépris et traiter l’Allemand « de menteur ». Pendant quarante-huit heures,la Gestapo multiplia ses instances,tandis que j’opposais le même inébranlable refus. Puis,elle abandonna ses prétentions et je n’ai jamais pu savoir ce qu’était devenu le corps de son infortunée victime". [73]
Un patron de café porte plainte contre la Gestapo pour vol.
Le 29 juillet 1944,les auxiliaires français montèrent une expédition dans un débit de boisson de Cours-Cheverny où,selon des renseignements (qui se révélèrent exacts), des maquisards étaient hébergés. [74] Après avoir encerclé la maison,ils pénétrèrent à l’intérieur. Les clients furent sortis dans la cour pour y subir une vérification des pièces d’identité. Le patron,M. Pointard, qui revenait chez lui,fut appréhendé à son tour.
Les auxiliaires perquisitionnèrent pendant deux heures.Peu après,M. Pointard (qui n’avait pas été emmené) constata la disparition de bijoux et de 15 000 F (p. 19). D’après la thèse officielle,trop heureux de s’en être tiré à si bon compte,il aurait du se dire:«je suis vivant et en liberté, c’est le principal.Tant pis pour ce qu’ils ont volé ». Mais loin d’agir ainsi, le patron… porta plainte (p. 21). Oui,dès le lendemain,il porta plainte contre la « Gestapo » pour vol.
Ce même jour,les auxiliaires revinrent pour perquisitionner à nouveau et vérifier l’identité des clients qui se trouvaient là. Semèrent-ils la terreur ? Non ; l’exposé des faits raconte : « Cependant, la conversation se déroula sur un ton plus calme que la veille et tous vidèrent ensemble quelques bouteilles de vin » (pp. 20-21). Tout le monde trinqua,donc.
Le 31,enfin,les auxiliaires revinrent une nouvelle fois et exigèrent que M. Pointard retire sa plainte. Le patron du débit de boisson accepta finalement et l’affaire en resta là. (p. 21)
[37] PBL, 3, p. 105, déclaration de Lafon.
[38] « LAFON:
Pour la garde,pour soulager le service.Par exemple avenue Foch…
M. LE PRESIDENT:
Il avait l’intention d’utiliser ces Nord-africains pour la lutte contre le maquis.
LAFON: Non : pour la garde. » (PBL, 3, p. 105).
[39]
« Les Allemands […] furent d’abord assez évasifs et n’autorisèrent en fin de compte, après différentes entrevues, que le recrutement de 300 Arabes qui, encadrés par des Français, devraient être répartis en groupes à Toulouse, Limoges, Périgueux etc. » (PBL, 1, p. 59).
[40] PBL, 1, p. 59-60.
[41] PBL, 1, p. 60.
[42] PBL, 1, p. 60 et 3, p. 110.
[43] PGG, dossier 1, pp. 33-4.
[44] PAFG, dossier 1, p. 21.
[45] Voy. la Documentation catholique, n° 939, 27 mai 1945, col. 403.
[46] PGG, exposé des faits, dossier 1, p. 38.
[47] PGG, dossier n° 7, p. 192, déposition d’Albert Pelisson.
[48] PGG, dossier 8, p. 163 ; déposition de Marcel Berthel lue à l’audience.
[49] « LE TEMOIN. — Je faisais partie de cet organisme » (PBL, 6, p. 140).
[50] PBL, 6, pp. 140-1 et 144. Déposition d’Edmond Bidaud.
[51] PLB, 6, pp. 159, déposition de Françoise Thierry.
[52] PBL, 1, p. 46. Pour la confirmation de P. Bonny à l’audience, voy. PBL, 3, pp. 22-23.
[53] PGN, 3, p. 66, déposition de l’officier Roger Sirjean.
[54] PGN, 3, p.95, déposition de l’inspecteur de Police Emile Nouzeilles.
[55] Voy. la Documentation catholique,nouvelle série, n° 14, 31 décembre 1944, p. 15. L’abbé L. Foucher mourut en août 1944 de deux balles reçues lors des combats…
[56] PBL, 3, pp. 140-1, déclaration d’Alexandre Villaplana.
[57]
« J’ai pu alors à ce moment,faire surseoir à l’exécution en priant l’adjudant chef de m’accorder quelques heures pour savoir si je pourrais arriver à trouver les armes. Il m’a dit, après quelques réticences : je veux bien, mais ce soir à 7 heures… » (PBL, 3, p. 141).
[58]
« J’ai repris l’interrogatoire de toute la famille Lormand. C’était un véritable drame de famille qui se passait dans ce village où les esprits sont très mesquins […]. A six heures, M. Morganti m’a donné un indice et m’a fait comprendre que cela pouvait venir de la belle fille de M. Lormand. Je lui ai demandé pourquoi. Il m’a dit : parce qu’elle est en instance de divorce avec le fils Lormand ; elle a déjà envoyé une première lettre et je lui ai vu prendre dans la caisse de son beau-père 50 000 F : c’est par vengeance quelle a du faire cela » (PBL, 3, pp. 141-2).
[59]
« J’ai donc été livré aux Allemands à Montrouge. A Montrouge,ils ont demandé qui me fournissait les tracts. [...] j’ai donné son nom [Odicharia]. On m’a demandé si j’étais bien sûr que c’était bien Odicharia. J’ai maintenu jusqu’au bout. Ils m’ont gardé pour aller chercher le fameux Odicharia qui habitait rue du Cherche-Midi. Il a été arrêté. Je ne l’ai pas su. Puis ils m’ont changé de prison » (PGG, dossier 2, p. 88).
[60] « On a perquisitionné chez moi ; on n’a rien trouvé » (Id.).
[61]
« Comme il n’y avait pas de tract [chez moi],j’ai été acquitté au bénéfice du doute. On m’a dit : “Le procureur vous a acquitté au bénéfice du doute,mais on vous garde comme otage” » (Ibid., p. 89).
[62] PBL, 6, p. 151, témoignage de Léon Théobalt.
[63] PGN, 1, p. 17.
[64]
« [Francis] amena les “policiers” chez Ouizam. Par malheur, au même moment, la maîtresse de Ouizam arrivait chez son ami ayant dans son sac une lettre établissant que celui-ci avait de faux papiers. » (PGN, 1, p. 18).
[65] PAFG, audience 1er mars 1947, pp. 45-6.
[66] PGG, dossier 6, pp. 10-11.
[67] PGG, dossier 2, p. 18.
[68] PGG, dossier 2, p. 20.
[69] Sur S. Marongin, voy. P. Randa, op. cit., p. 674.
[70]
[« Lafon accepta de se charger de l’enquête et à la tête d’une douzaine d’hommes de la rue Lauriston […] et de quelques sous-officiers allemands, il procéda, a près diverses surveillances de nuit,à l’arrestation de cinq hommes pour son compte, cependant que les Allemands qui lui avaient été adjoints, arrêtaient de leur côté trois hommes et une femme.Ces personnes furent livrées à Kieffer […]. » (PBL, 1, p. 51).
[71] PBL, 1, p. 51-2.
[72] PGN, 3, p. 99 déposition de l’inspecteur de Police Emile Nouzeilles.
[73] Voy. la déposition de Jacques Henry déposée à la Fondation Hoover et publiée dans : La vie de la France sous l’occupation, 1940-1944 (éd. Plon, 1957), p. 497.
[74] PAFG, exposé des faits, p. 18.
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Spartacus Kouros Messages : 2078 Date d'inscription : 13/03/2010 Age : 58 Localisation : Les arènes
Sujet: Re: L’action de la Police allemande en France occupée. Mer 2 Jan - 16:16
Deux femmes portent plainte contre la Gestapo pour vol.
M. Pointard ne fut pas le seul à agir ainsi. Après qu’une perquisition ait été effectuée chez elle (à Montbard), Françoise Thierry, qui venait d’être relâchée par la Gestapo après interrogatoire (voy. plus haut), s’aperçut que des bijoux avaient disparu. Se contenta-t-elle de remercier la Providence pour l’avoir tirée des griffes des horribles Allemands ? Non,elle aussi se hâta de… porter plainte contre ladite Gestapo. Au procès Bonny-Lafon,elle raconta :
"[…] j’ai fait une plainte.Je suis allée à la Préfecture à Dijon.Je suis venue à la Gestapo. On m’a renvoyée à la Gestapo de Dijon.J’ai eu l’impression qu’on me faisait faire le tour de la France. Je n’ai jamais eu aucun résultat" [75].
A Montbard,des bijoux avaient également disparu dans la maison des Plait, alors que le père,la mère et le fils étaient interrogés dans le locaux de la Feld Kommandantur. Lorsque Mme Plait revint,elle s’en aperçut. Loin d’être intimidée par l’arrestation de son fils et que son époux (ils seront déportés), elle alla directement se plaindre à… la Feldgendarmerie.
L’occupant éconduisit-il cette Française appartenant à une famille coupable ? Non,il envoya un télégramme à Paris. A son procès, P. Bonny raconta :
BONNY:
[…] Lafon a rassemblé tous les hommes du service dans son bureau.J’étais présent. Il a dit : « je suis saisi d’un télégramme de la Feldgendarmerie de Montbar, un vol a été commis,je veux connaître le voleur. Personne ne sortira d’ici avant qu’il soit connu ». Après quelques instants, le voleur s’est présenté. C’était un nommé Ferrando.
M. LE PRESIDENT: Il était de la bande des Corses ?
BONNY:
Pas exactement. Il en faisait partie tout de même. Il n’était pas Corse ; voilà pourquoi j’ai dit « pas exactement ».
Lafon lui a demandé où étaient les bijoux.Il a donné une adresse. Une partie des bijoux a été retrouvée. Lafon m’a demandé d’adresser une lettre à Mme Plait,je l’ai fait immédiatement.Mme Plait est venue, un certain temps après, prendre possession des bijoux retrouvés.
M. LE PRESIDENT: Elle est venue rue Lauriston ?
BONNY:
Oui, prendre possession des bijoux qui lui avaient été volés. Chaque fois qu’il y avait un vol et hélas ! il y en a eu quelques-uns, Lafon n’hésitait pas à châtier durement le coupable. Seulement,évidemment dans ce milieu,c’était un peu difficile [76].
Un Commandeur de la Gestapo qui se fait traiter de menteur au téléphone, un préfet qui refuse obstinément d’exécuter son ordre,un patron de bistrot et deux femmes qui portent plainte contre des auxiliaires des Allemands pour vol… Quand on lit cela,on a du mal à croire que les services de police allemands auraient partout semé l’épouvante à cause de leur arbitraire.
Un dénombrement complet permet de réviser l’Histoire.
Parvenu à ce stade de ma démonstration,certains pourront me reprocher d’agir comme la délégation française à Nuremberg,c’est-à-dire de « piquer » quelques affaires ici et là pour porter des conclusions générales,mais sans faire de dénombrement complet.
L’arbitraire de la Gestapo ? Un mythe contredit par les chiffres Les 63 affaires retenues par l’Accusation.
Ce dénombrement complet,l’Accusation l’a fait pour nous. A leurs procès organisés entre 1944 et 1947,les auxiliaires des Allemands furent principalement jugés pour leur action contre la Résistance. Au terme d’enquêtes assez fouillées (sauf en ce qui concerne la «bande Bonny-Lafon» où l’instruction, trop rapide, fut lacunaire[77]), 63 affaires furent découvertes et retenues qui concernaient la lutte contre les maquisards :
-18 mettaient en cause la « bande Bonny-Lafon »,
- 10 la « gestapo de Neuilly », 21 les « auxiliaires français de la gestapo » et
- 14 la « gestapo géorgienne ». Ces 63 affaires permettent d’effectuer un dénombrement complet (pour un résumé de ces affaires, cliquez ici).
Coupable ou innocent ?
Avant d’aller plus loin,qu’on me permette cette petite précision : je considérerai comme victime de l’arbitraire la personne qui a été :
- soit arrêtée sans que rien n’ait motivé cette arrestation (pas d’indices, pas de dénonciation…) ;
- soit condamnée à de la prison, retenue comme otage ou, pis,déportée, malgré une absence manifeste de preuves ;
- soit frappée violemment alors que rien de tangible n’avait été découvert contre elle.
Quatre affaires ont très probablement concerné des innocents.
La principale conclusion qu’on peut tirer des 63 affaires recensées, c’est que la « Gestapo » n’a pas frappé arbitrairement.En effet, si elle avait agi à l’aveuglette, arrêtant n’importe qui sur n’importe quelle vague dénonciation, de très nombreux innocents auraient dû être touchés. Eh bien ! ce n’est pas le cas, loin de là. Sur ces 63 affaires, quatre ont très probablement vu des innocents touchés. Une est à mettre sur le compte des « auxiliaires français de la gestapo », deux sur celui de la « gestapo de Neuilly » et la dernière sur le compte de la « bande Bonny-Lafon ». Les voici rapidement résumée :
1°)
Affaire à mettre au compte des « auxiliaires français de la gestapo » :
- fin 1943,dans un café de la banlieue de Paris,trois personnes,Benoît Colangelo, M. Rocca et Tino Vitti furent appréhendé fortuitement par des auxiliaires français.
- En 1947, B. Colangelo déclara :
« Mon arrestation et celle de mes camarades n’a pas été préméditée. Cela a été une aventure »[78]. Emmenés à Fresnes,tous furent finalement déportés à Buchenwald. Et si les deux premiers revinrent,Tino Vitti,lui, mourut probablement en déportation [79]. Or,il ressort des débats que,sur ces trois garçons,seul B. Colangelo était en infraction (c’était un prisonnier évadé). Les deux autres n’avaient visiblement rien à se reprocher. Leur seul tort fut d’être en « mauvaise » compagnie, au mauvais endroit et au mauvais moment…
2°)
Première affaire à mettre sur le compte de la « gestapo de Neuilly » :
-l’arrestation,le 12 novembre 1942,d’un homme proche du Parti communiste, Charles Caron, suspecté d’attentats. Interrogé et durement frappé,il ne donna aucun renseignement. Et pour cause,il était parfaitement innocent. Il fut d’ailleurs relâché après quelques jours,rien n’ayant pu être prouvé contre lui. A l’audience,l’inspecteur de Police E. Nouzeilles déclara :
"Heureusement que Caron ne faisait pas partie de la Résistance ;sans quoi, sous les coups qu’il a reçus,il aurait pu dénoncer des camarades et cela pouvait entraîner l’arrestation d’une dizaine,peut-être plus,de bons patriotes" [PGN, 3, p. 99].
3°)
Deuxième affaire à mettre sur le compte de la « gestapo de Neuilly » :
- il s’agit d’un incident lamentable au cours duquel un membre de l’équipe de Neuilly, Pierre Lahaye,dont la femme avait obtenu le divorce et la garde des enfants, reprit ces derniers par la force avec l’aide de ses collègues. Il parvint à faire arrêter et retenir comme otage M. Chain, commissaire de Police qui avait fait exécuter l’ordonnance concernant la garde des enfants (avec lui figurait peut-être un huissier).Puis il se rendit chez son ancienne épouse « avec un agent de la Gestapo et un officier allemand » (PGN, 1, p. 20). Là, il déclara que l’otage (ou peut-être les deux ) ne serait pas relâché avant que sa progéniture ne lui soit rendue. L’ex-épouse dut s’exécuter…
Dans cette affaire,le commissaire Chain était parfaitement innocent.
4°)
Affaire à mettre sur le compte de la bande « Bonny-Lafon » :
- j’ai longtemps hésité à la citer,car elle n’est pas fermement établie. L’affaire survint à Montbéliard (Doubs) où des Arabes recrutés par l’intermédiaire de Lafon et chargés de surveiller les usines auraient violé « plusieurs femmes », ce qui aurait d’ailleurs amené « des mesures de répression des Allemands » contre les coupables et leurs complices (PBL, 1, p. 65).
Cependant,si,au procès de la « bande Bonny-Lafon »,cette histoire de viols fut confirmée par un accusé,celui-ci ne faisait que rapporter des « confidences » que lui aurait faites une personne :
M. LE PRESIDENT:
Il résulte des confidences qui ont été faites par Maillebuau à Deleheye qui en a parlé au cours du dossier, que ces excès commis par les gardiens arabes et notamment le viol de plusieurs femmes, avaient amené des mesures de répression des Allemands contre la brigade. Deleheye, c’est exact ?
[Edmond] DELEHEYE: C’est exact [PBL, 3, p. 137].
J’ajoute qu’aucune victime ne vint témoigner au procès et qu’à ma connaissance, aucun Arabe coupable ne fut retrouvé. Bref,cette affaire est loin d’être établie. J’ai tout de même choisie de la mentionner afin de ne pas être soupçonné de complaisance avec les accusés.
52 sur 56, soit 93 % d’affaires concernant des coupables indéniables.
Si l’on excepte ces quatre affaires (et sept autres qui ne permettent aucune conclusion[80]) tous les dossiers évoqués lors des procès de la ont concerné des personnes qui s’étaient effectivement rendues coupables de menées illégales (fabrication de faux papiers,renseignements donnés à l’ennemi, liaison avec la Résistance armée, trafic d’armes, tentative de meurtre sur des agents...). Toutes ! Soit 52 sur 56, c’est-à-dire 93 %. Dans une époque troublée comme le furent les années 1940-1944,une telle proportion démontre que la Police allemande n’a pas fait régner l’arbitraire, bien au contraire :elle a agit avec discernement, ce qui est tout à son honneur.
La Gestapo en France a-t-elle torturé ?
Mais le partisan de la thèse officielle n’a pas épuisé ses arguments. « Nous n’allons pas, me répondra-t-il, louer la Gestapo parce qu’elle aurait dans la plupart des cas épargné les innocents. Pour une Police,la moindre des choses est de ne pas frapper au hasard. Ce qu’on lui reproche,c’est d’avoir traité de façon inhumaine les “coupables” qu’elle appréhendait. Car même s’il s’agissait de gens qui contrevenaient aux conventions de La Haye et qui, de ce fait, pouvaient être exécutés comme francs-tireurs,aucune loi ne permettait des les traiter avec inhumanité. Oui, ce qu’on reproche à l’Occupant, c’est les passages à tabac, les tortures, les déportations, les exécutions sommaires. Les “martyrs héroïques de la Résistance qui comptent parmi les plus purs héros de notre épopée nationale”[81] sont des milliers ».
Certains verront dans cet exposé un argument imparable. Moi pas.
Faits présentés hors contexte
Dans un premier temps,j’appelle à la prudence face à tous ces récits de violence, de torture ou d’exécution sommaire qu’on nous ressert depuis 60 ans.
Cas du suicide d’un juif arrêté.
Un premier exemple très précis illustrera mon propos :
- le 7 août 1944, un juif appréhendé par des auxiliaires français fut interrogé violemment au siège de la Gestapo,rue des Saussaies. Profitant d’un instant d’inattention de ses gardiens,il sauta du quatrième étage par la fenêtre et se tua net en s’écrasant dans la cour.
Présenté ainsi,tout le monde croira au martyr d’un pauvre juif innocent arrêté pour un motif futile et ayant préféré la mort aux tortures abominables qu’on lui faisait subir (par pur sadisme, bien entendu). La vérité est cependant celle-ci : le juif faisait parti d’un groupe de trois Résistants qui avaient tendu en piège à la Gestapo (mais oui, la Résistance tendait même des pièges à la Gestapo). Se faisant passer pour des trafiquants de marchandise, ils avaient fait en sorte d’être repérés. L’objectif était de tuer les agents qui viendraient les arrêter. Mais l’opération échoua et les trois complices furent appréhendés sans avoir pu tuer quiconque.
Invention de ma part ? Nullement. Au procès des « auxiliaires français de la Gestapo »,l’exposé des faits déclarait :
"Il s’agissait, en réalité, […] d’agents de la résistance qui avaient démasqué Combier et ses acolytes et leur avaient tendu un piège. Effectivement,un des « vendeurs » tirait dès son arrivée sur les agents [de la Gestapo].Immédiatement,une fusillade éclatait de part et d’autre. Combier arrêtait l’israélite pendant que ses compagnons arrêtèrent les deux autres individus" [82].
"Transportés rue des Saussaies,les trois complices subirent un interrogatoire dur. Le juif parvint à sauter par la fenêtre et se tua. Les deux autres auraient été fusillés le lendemain au Fort de Vincennnes" (Id.).
Dans cette affaire,on comprend aisément la dureté de l’interrogatoire :
- plusieurs auxiliaires des Allemands venaient de subir une tentative de meurtre. Il fallait impérativement essayer de découvrir le réseau pour lequel les trois malfaiteurs travaillaient. Toutes les polices du monde auraient agi ainsi afin de protéger leurs agents.
La mort de la Résistante Mlle Muller : un cas flagrant de mauvaise foi.
Maintenant, voici un deuxième exemple encore plus net :
- en juin 1944, à Paris, une jeune infirmière Résistante, Mademoiselle Muller, tomba sous les balles tirées à bout portant par deux membres de la « gestapo géorgienne », MM. Solina et Fontini [83].
Raconté sans plus de précision,ce fait sera qualifié d’assassinat brutal et Mlle Muller sera rangée parmi les « martyrs héroïques de la Résistance ».
Avant,toutefois,de juger,il faut s’intéresser aux circonstances de sa mort. Or, les circonstances,les voici : avec un autre Résistant,Roger Boulet,Mlle Muller était tombée dans une souricière. Plus tard,R. Boulet lui-même raconta :
M. BOULET:
[…] [Sébastien Solina] m’a demandé mes papiers ;je les lui ai remis et il m’a fouillé. J’avais un revolver dans ma ceinture ;il n’a pas tiré mon revolver et à ce moment-là je me suis dit : avec une chance,je peux m’en sortir ;mais au moment où je sortais mon revolver de la ceinture,Solina me tirait dessus avec Fontini. C’est Solina qui était sur ma gauche et qui m’a tiré dessus le premier [84].
C’est clair :
les deux agents de la « gestapo géorgienne » ont agi en état de légitime défense : ils ont tiré parce que le Résistant avait tenté de dégainer une arme qu’ils n’avaient pas découverte. La fusillade fut telle que les balles partirent dans tous les sens et criblèrent la pièce[85]. M. Boulet n’eut à déplorer que des blessures superficielles. Mais Mlle Muller,qui était également armée [86], fut blessée mortellement et mourut deux jours plus tard.
Sachant qu’il fallait impérativement présenter cette affaire comme un crime de la « Gestapo », le commissaire du Gouvernement fit preuve d’une incroyable mauvaise foi. Interrogé au procès de MM. Solina et Fontini, R. Boulet déclara qu’il n’avait pas eu le temps de tirer parce qu’il n’avait pas pu ôter le cran d’arrêt de son arme[87]. Le commissaire en déduisit :
M. LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT:
Par conséquent, ils ont tiré sans nécessité de défense. Vous aviez votre revolver et ils ne pouvaient pas savoir s’il y avait le cran d’arrêt ou non, mais c’est comme si vous n’aviez rien puisque vous n’avez pas eu le temps d’enlever le cran d’arrêt ; et Mlle Muller ne s’en est pas servi ?
M. BOULET: Non.
M. LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT:
Le témoignage est d’une gravité exceptionnelle pour Solina [Id.].
Voilà comment un acte de légitime défense devenait un « crime » ; tout simplement parce qu’avant de tirer, les deux auxiliaires français n’avaient pas dit à R. Boulet : « Un instant ! Votre arme est-elle au cran d’arrêt ? Oui ? Alors enlevez-le pour que nous puissions presser nos gâchettes ». Naturellement,tout homme de bonne foi ne pourra qu’écarter les arguties jésuitiques du commissaire du gouvernement. Mlle Muller n’est pas une « victime de la Gestapo » ou de la « barbarie nazie ». Elle avait choisi de combattre illégalement l’occupant ;elle est morte parce que son complice a inconsidérément tiré son revolver en présence à deux hommes qui avaient leurs armes au poing. Face à n’importe quelle police du monde, les choses se seraient passées ainsi.
Ces deux exemples démontrent la nécessité d’être prudent lorsqu’on nous parle des « crimes de la Gestapo ». On a trop tendance à « oublier » que de 1941 à 1944, la France était en guerre,guerre illégale menée par des combattants illégaux, mais guerre tout de même…
Les blessés n’étaient pas achevés.
J’ajoute que si,vraiment, les auxiliaires de Allemands avaient tiré pour tuer, ils auraient achevé les blessés. Or,dans les procès que j’ai consultés,jamais il n’a été question de blessés assassinés. Bien au contraire, les individus touchés lors d’une fusillade étaient immédiatement conduits à l’hôpital. En juillet 1944, par exemple, un jeune homme fut appréhendé avec une serviette remplie de papiers en russe hostiles à l’armée allemande. Emmené dans une voiture, il s’échappa du véhicule à la faveur d’un accident de la circulation. Alors qu’il s’en courait sur le trottoir,Odicharia et Blanchet lui tirèrent dessus et le blessèrent. A son procès, G. Collignon,qui avait été témoin de la scène, raconta :
COLLIGNON:
[…] A ce moment, Odicharia et Blanchet […] m’ont dit : Enlève-toi d’ici, il n’ira pas loin. J’ai eu à peine le temps de faire un pas en arrière, deux coups de feu ont éclaté. Le jeune homme est tombé par terre. J’ai immédiatement […] fait le nécessaire, c’est-à-dire je me suis occupé de chercher une ambulance […].
M. LE PRÉSIDENT: Vous l’avez conduit à l’Hôpital de la Pitié.
COLLIGNON:
Ce n’est pas moi qui l’ai conduit.Je suis rentré à pied rue de Varenne, car j’étais blessé moi-même [dans l’accident][88].
Le blessé fut effectivement emmené à l’hôpital de la Pitié [89].
Un mois auparavant,un Résistant,le docteur Birau (ou Biro),avait été blessé par R. Collignon qui l’arrêtait.En juillet 1945,un témoin, Mme Memain,raconta :
Mme MEMAIN:
[…] M. Biro a dont été ramené blessé à la loge ; avait une balle de revolver à la naissance de la taille, et le sang se répandait assez violemment. On a demandé un docteur ;il y avait un docteur dans la maison ;il est venu et à dit que la balle s’était logée dans la moelle épinière. On a transféré le docteur Biro à l’hôpital dans une ambulance.
M. LE PRÉSIDENT: Qui a fait venir le médecin ?
Mme MEMAIN:
C’est Blanchet [un membre de la « gestapo géorgienne »] qui l’a demandée […][90].
Preuve que les auxiliaires des Allemands ne tiraient pas pour tuer, mais pour se défendre ou pour arrêter les fuyards…
Le mythe des « chambres de tortures » La prétendue « chambre froide » de la rue de Londres.
Cela dit,venons-en aux « tortures raffinées » proprement dites. Là aussi, la prudence s’impose. Lors du procès de la « gestapo géorgienne », par exemple,ce service fut accusé d’avoir possédé une « chambre froide » où les prisonniers auraient été enfermés. L’Accusation se fondait sur les déclarations d’H. de Tranze lors de l’instruction. Mais à l’audience,celle-ci expliqua qu’il s’agissait d’une méprise :
M. LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT:
[…] vous avez parlé de « chambre froide ».
HELENE DE TRANZE:
C’était un bureau qui n’était pas chauffé ; j’ai dit qu’on avait mis [le Résistant] Joël pendant un certain temps dans ce bureau. C’est pour cela que j’ai parlé de chambre froide,j’ai appelé cela ainsi, cela m’a tellement affolée ;en disant chambre froide, j’ai voulu dire un bureau qui n’était pas chauffé [91].
Si,vraiment,une chambre froide avait été installée rue de Londres,on aurait dû en retrouver des traces en septembre 1945. Or,l’Accusation ne produisit aucun rapport et l’affaire fut vite oubliée… Preuve que cette histoire de chambre froide était un bobard.
Les prétendues « traces de sang » de la rue Lariston.
Los du procès dit Bonny-Lafon,un témoin,M. Secq,vint déposer. A la « Libération »,il avait été l’un des premiers à pénétrer dans les locaux du 93 rue Lauriston. A l’époque,on parlait de traces de sang qui y auraient été découvertes, attestant des tortures abominables.M. Secq avait pu tout voir,y compris les cellules aménagées. Voici ce que l’on put entendre :
M. LE PRESIDENT:
Vous n’avez pas constaté des inscriptions sur les murs,des traces de sang ?
M. SECQ:
Des traces de sang, non. Il y avait des inscriptions sur les murs ;les malheureux qui étaient là-dedans devaient s’ennuyer ;ils tenaient des calendriers sur les murs. Il y avait des noms de parachutistes :arrêté à telle date,transféré ici à telle date. Mais pas de traces de sang ni d’instruments de torture [92].
A ma connaissance,aucune preuve de l’existence d’une quelconque « salle de torture » n’a été découverte dans les locaux occupés par les forces de polices allemandes.
Récits de violences douteux Le cas des deux jeunes Résistants de Lyon.
Sur les violences,enfin, notons l’existence de nombreux cas douteux où les versions divergent sensiblement. A Lyon,par exemple,deux jeunes Résistants,J. Choux et G. Cochet,furent appréhendés dans un café lyonnais. Lors du procès de la « gestapo géorgienne », un témoin qui avait vu la scène du dehors raconta :
LE TÉMOIN [M. Charles Favreau]:
Là [dans le café], j’ai vu deux de mes aides qui étaient battus à coups de pied, de poing, giflés, et ainsi de suite, par toute la bande [...] (PGG, p. 117).
Interrogé,l’accusé principal, H. Oberchmuckler,contesta :
M. LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT:
Oberchmuckler,vous reconnaissez que vous avez fait subir un interrogatoire à Jean Choux et que vous l’avez frappé à coups de pieds et de poings ?
OBERCHMUCKLER : Non,je lui ai juste donné quelques gifles [93].
Le cas de M. Rio alias Lenoir.
Citons également le cas de M. Rio (alias Lenoir),un résistant tombé dans une souricière. L’exposé des faits présenté au procès affirmait :
Il est aussitôt identifié par Collignon,qui possède sa photographie. Il lui demande s’il est M. Lenoir. L’autre nie. Collignon lui porte une série de gifles et de coups de poings,ces derniers à l’estomac,après lui avoir passé les menottes sous la menace de son revolver. [94]
A l’audience,Collignon contesta avoir donné des coups de poing :
COLLIGNON: Je lui ai donné une ou deux gifles […].
M. LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT:
Et également des coups de poing dans l’estomac.
COLLIGNON:
Je lui ai donné une ou deux gifles […]. Je n’ai donné uniquement que des gifles [95].
La haine des accusateurs en 1944-47.
Depuis 60 ans,ce genre de dénégations est toujours balayé au motif que les accusés mentaient pour diminuer leurs responsabilités. Il est vrai que ceux-ci avaient des raisons évidentes de mentir. Mais c’est oublier que,de leur côté,les accusateurs pouvaient également noircir les faits afin d’accabler ceux auxquels ils vouaient une haine inextinguible (voir document).
Car cette haine existait bel et bien (voir document).
Le 1er mars 1947,au procès dit des « auxiliaires français de la Gestapo », l’épouse d’un résistant déporté,Mme Memely,s’emporta et,en pleine salle d’audience, traita l’accusé Duquesnoy de « salaud » et dut être rappelée à l’ordre par le Président [96] (voir document).
Au procès de la « gestapo géorgienne », un témoin de l’accusation,Roger Foucher, lança aux accusés en général et à H. Oberchmuckler en particulier :
Témoin]:
La peine de mort,c’est tout ce que vous méritez,toute la bande qui se trouve sur ces bancs,les femmes comme les autres.Les traîtres à la France doivent être exécutés. Du moment qu’ils ont trahi le pays,qu’ils ont fait du mal, livré les familles comme vous avez fait, il n’y a qu’une chose :c’est votre tête… La guillotine,c’est une mort trop douce… Il y a assez de monde dans la salle pour vous lyncher[97].
Loin de le reprendre,la Président de la Haute-Cour renchérit :
M. LE PRÉSIDENT: Ils n’auront jamais les souffrances de Buchenwald… [Id.]
A qui fera-t-on croire que,dans un tel climat,ces témoins haineux n’aient pas eu tendance soit à « oublier » des faits favorables accusés soit à en rajouter, c’est-à-dire à mentir pour aggraver les responsabilités des accusés et,ainsi, obtenir cette peine de mort si ardemment souhaitée ?
Récits mensongers Deux témoins « oublient » de rapporter une bonne action de la Gestapo.
Un petit exemple de fait « oublié » peut être relevé dans le procès Bonny-Lafon. Dans l’affaire Kellner (un Résistant de Boulogne-Billancourt),plusieurs personnes totalement innocentes furent arrêtées (avant d’être rapidement relâchées) parce qu’elles se trouvaient chez le suspect lors de l’intervention de la Gestapo.
Convoquées plus tard comme témoin,l’une d’entre elle,Jacques Cardeillac, eut la franchise de révéler qu’au départ,les agents furent très aimables et qu’ils allèrent jusqu’à leur offrir du café : « Avenue Foch,ils nous ont mis dans une salle très luxueuse,ils nous ont dit d’attendre, ils ont été très aimables […], ils nous ont offert du café,ils nous ont dit d’attendre » (PBL, 7, p. 4).
Mais les deux témoins suivants « oublièrent » de rapporter ces faits. Georgette Paget se contenta de dire : « Nous sommes entrés dans une pièce qui devait être la salle à manger, nous avons attendu jusqu’à ce que notre frère arrive » (PBL, 7, p. 20). Puis vint Monique Paget qui déclara : « Nous sommes montés dans une salle-à-manger avec des boiseries, nous sommes restés là et puis le policier et venu nous dire que mon oncle était rentré chez lui » (PBL, 7, p. 27). Exit l’amabilité des agents et le café offert…
Les témoins divergent dans leurs récits.
Parfois,les versions divergentes entre les témoins font naître le doute. Lors du procès de la « gestapo de Neuilly »,Henri Phegnon et sa fille vinrent témoigner. Ils avaient été arrêtés parce que M. Phegnon était le chef de la Résistance locale. A l’audience,sa fille déclara qu’elle avait été sévèrement battue lors de son interrogatoire :
M. LE PRESIDENT:
Vous avez été battue ? Il [l’accusé Rudy Martin] vous a frappée avec une matraque peut-être ?
LE TEMOIN : Non, à coups de poings. Il m’a relevée par les cheveux.
M. LE PRESIDENT:
Même une jeune fille, il n’hésitait pas à vous frapper ! [PGN, 5, p. 96.]
Peu avant,cependant,son père avait témoigné sans que sa fille ait pu savoir ce qu’il avait dit (car avant de déposer, un témoin n’assiste pas aux débats). Or,voici ce qu’il avait déclaré :
"J’ai entendu qu’on frappait ma fille,et on me l’a amenée un peu fatiguée, quoi qu’elle était énergique et se tenait bien ". [98]
A supposé qu’on ait vraiment frappé cette demoiselle « à coups de poings », elle ne serait pas apparue « énergique » et se « tenant bien », quoi qu’« un peu fatiguée » ; elle serait apparue chancelante, abattue, avec le visage tuméfié. Tout porte donc à croire que la jeune fille a exagéré. Peut-être a-t-elle reçu quelques gifles, mais pas plus…
Plus grave,en deux occurrences,lors des procès intentés à la « Libération », les mensonges des accusateurs apparurent au grand jour.
Marcel Mémain n’a pas été roué de coups.
Dans l’affaire déjà mentionnée où une souricière permit d’appréhender un certain nombre de personnes rue Margueritte,l’acte d’accusation affirmait qu’un Résistant arrêté, Marcel Mémain, fut « roué de coups en présence de sa mère et de sa fiancée »[99]. Roué de coups,cela signifie qu’il en reçut de nombreux,donnés avec les poings, les pieds, les coudes etc. Lors des audiences,cependant, R.Collignon nia le fait :
M. LE PRÉSIDENT:
N’avez-vous pas constaté que l’un des hommes aurait frappé Marcel Mémain ?
COLLIGNON:
Justement,c’est une chose qui m’étonne parce qu’en principe tout le monde a été très calme. Pour Marcel Memain,je n’ai pas vu qu’il se soit passé quelque chose comme brutalité. Il y a peut-être eu une gifle [PGG, dossier 3, p. 11.].
Appelée comme témoin,la mère de Marcel Memain confirma les déclarations de l’accusé :
M. LE PRÉSIDENT: Il [votre fils] aurait été maltraité immédiatement,je crois ?
Mme MEMAIN:
Oui, d’abord.On lui a donné une gifle assez violente,on lui a mis des menottes et on l’a fouillé [PGG, dossier 10, p. 113.].
Preuve que R. Collignon disait vrai face à l’Accusation qui,elle, avait menti en faisant passer une gifle,même « assez violente »,pour un passage à tabac (il a été « roué de coups »).
Tout cela pourra apparaître comme du pinaillage. Mais en période de guerre civile, lorsque les esprits sont surchauffés et que la mort rode partout,un simple coup n’est pas synonyme de mauvais traitements. Dans l’affaire du garage lyonnais qui maquillait des voitures pour la Résistance, l’organisateur,Jean Bergognio, fut arrêté en février 1944. Emmené dans les locaux de la Police allemande,il fut interrogé. Lors du procès de la « gestapo géorgienne »,il eut cette réponse significative :
M. LE PRÉSIDENT: Est-ce que vous avez été frappé avec brutalité ?
LE TÉMOIN:
J’ai pris deux coups de poing. Ils ne m’ont pas frappé,en somme. J’ai pris quelques coups de poing, c’est tout [PGG, dossier 8, pp. 170-1].
Ces propos pourront surprendre un jeune né après 1960. Car en temps de paix, lorsque tout est calme et que l’autorité n’est guère contestée, une simple gifle donnée à un opposant qui s’est laissé arrêter apparaît comme une violence inqualifiable.Mais en temps de guerre,lorsque l’ennemi a déjà pénétré sur le territoire, que le vent de la révolte souffle et que,à l’arrière du front, des civils ont déclenché une guerre illégale,un coup de poing donné à un adversaire appréhendé devient, hélas, chose normale… Là encore,tout est affaire de contexte. Notons d’ailleurs que dans son « Rapport sur les atrocités allemandes commises pendant l’occupation », le professeur H.Paucot a admis :
"Les gifles et les coups de poing faisaient rarement défaut dès le début, mais ce sont les sévices mineurs dont sont malheureusement coutumières la plupart des polices" [100].
Le Résistant Biro ment sciemment.
Revenons cependant à notre sujet. Cette déformation des faits (une gifle devient un passage à tabac) n’est pas unique. Dans cette même affaire de souricière, un autre Résistant, Jean Bireau (ou Biro), reçut une balle qui lui laissa la jambe gauche paralysée. Au procès des auxiliaires des Allemands, l’exposé des faits précisait :
"[J. Biro] comprend qu’il est tombé dans un piège et tente de fuir. C’est à cet instant que Blanchet se précipite sur lui et entame une lutte sévère. Le Dr Biro est plus fort. Il terrasse Blanchet et frappe sévèrement Collignon [je souligne],qui malheureusement parvient à se dégager,et,tirant son arme, fait feu sur le Dr Biro".
A l’audience R. Collignon,confirma avoir fait feu après qu’il eut été frappé par son adversaire :
"je me suis trouvé assailli par le docteur Bireau ;j’ai reçu un coup violent à la tempe, une lutte s’est engagée et mon veston a été déchiré. Nous avons réussi à nous dégager l’un et l’autre ;j’ai essayé de sortir mon revolver mais il s’est accroché au chien parce que c’était un revolver à barillet ; je lui ai dit : « Haut les mains ». Sans doute s’est-il aperçu que je n’avais plus mes lunettes, il a fait un mouvement alors j’ai tiré. Il a été atteint du côté droit" [PGG, dossier 3, p.14.].
Or,appelé comme témoin,Jean Biro raconta une histoire différente. En contradiction non seulement avec l’accusé,mais aussi avec l’exposé des faits, il prétendit que R. Collignon lui avait tiré dessus sans sommation et sans avoir été frappé auparavant :
"un des deux individus [Blanchet] s’est avancé vers moi et m’a saisi par le veston. J’ai compris que j’étais tombé dans une souricière et j’ai commencé à me battre avec cet individu. Je l’ai renversé et à moitié assommé. Malheureusement, il continuait à m’agripper par mes vêtements et je n’ai pas eu le temps d’aller vers la deuxième personne qui se trouvait au fond de la salle. Celui-ci a tiré un revolver de sa poche intérieure et a tiré sur moi à une distance d’à peu près deux mètres, alors que j’essayais de me diriger vers lui. Je me suis effondré les deux jambes paralysées et je suis resté étendu sur le sol de la loge" [PGG, dossier 9,p.43.].
S’il n’avait « pas eu le temps d’aller vers la deuxième personne qui se trouvait au fond de la salle »,c’est qu’il n’avait pas pu la frapper,donc que l’individu n’avait pas été directement menacé,donc qu’il avait tiré sans sommation.
Peu après,cependant,R. Collignon rectifia et rappela qu’ils s’étaient battus avant que lui-même ne tire (« c’est après une courte lutte que j’ai tiré sur lui »,Ibid.,p.45). Alors que le témoin aurait dû crier au mensonge, il n’en fit rien :
M. LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT:
Docteur,vous aviez déjà terrassé votre premier adversaire et vous vous attaquiez au second. Vous étiez le plus fort ?
M. BIREAU: Oui. Malheureusement,le premier me tenait encore agrippé (Id.).
Cette absence de protestation et cette façon de rester dans le flou sont significatives : de façon évidente,c’est le témoin qui avait menti,pas l’accusé qui contestait sa version… Et si le témoin mentait, c’était pour accabler l’accusé.
Conclusion sur les récits de violences.
Voilà pourquoi la plus grande prudence s’impose face à tous ces récits qui montrent la « Gestapo » rouant de coups,torturant,tirant sans sommation,exécutant froidement etc. Le fait que les accusés aient pu avoir intérêt à diminuer leurs responsabilités n’est pas suffisant pour toujours rejeter leurs dénégations. Car les « bons » eux aussi ont pu mentir,et ont menti,par haine ou par ressentiment.
Naturellement,deux mensonges relevés ne suffisent pas pour jeter le discrédit sur tous les récits entendus lors des procès. De nombreux témoins ont été sincères lorsqu’ils ont raconté les violences qu’ils ont subies entre les mains de la police allemande. Mais loin de me gêner,ces récits honnêtes confortent ma thèse. Nous allons maintenant voir pourquoi.
Pourquoi la Gestapo a-t-elle parfois usé de la violence ? On interroge pour avoir des renseignements
Plus haut,nous avons vu que les interrogatoires pratiqués par la Gestapo étaient avant tout destinés à recueillir des renseignements. Les procès organisés à la « Libération » confirmèrent le fait.
Un dialogue significatif.
Voici un dialogue significatif entendu lors d’une audience,alors qu’on jugeait les membres de la « gestapo géorgienne » (il s’agit du témoignage de Roger Boulet,Résistant arrêté sous l’occupation) :
M. LE PRÉSIDENT: Ils vous ont interrogé à plusieurs reprises.
M. BOULET: Oui, pour savoir où étaient mon chef et mes hommes…
M. LE PRÉSIDENT: Ils paraissaient attacher une grande importance, évidemment…
M. BOULET:
Surtout à mon chef, le lieutenant Georges Lefée, qui était arrêté à la Santé [PGG, dossier 10, pp. 122-3.].
Cet exemple est loin d’être unique.
Des renseignements obtenus permettent de décapiter un réseau.
Dans l’affaire dite « des PTT »,un réseau de Résistance avait été détecté dans la banlieue parisienne. « Le groupement était très actif,avait un budget et des armes en quantité relativement considérables »[101]. Celui-ci ayant pu être infiltré grâce à un agent double,les premières arrestations eurent lieu en juin 1944,au cimetière de Thiais,lors d’un piège tendu sous forme d’un rendez-vous avec des Résistants. Les prisonniers furent interrogés. Par plaisir ? Non,pour obtenir des renseignements. Au terme de ces interrogatoires,la Gestapo apprit que les membres de l’organisation possédaient une « boite aux lettres » dans une loge de concierge au 4,rue Margueritte, à Paris. La concierge s’appelait Mme Memain,épouse de René Memain.
Le 13 juin 1944,une perquisition fut organisée dans la loge :
« Des tracts,des listes d’adresses,des documents,2 machines à écrire sont saisis et emportés. Une somme de 50 000 F est découverte dans une enveloppe [...] » (Ibid., p. 52). Au 6ème étage,les agents « mirent la main,dans une chambre de bonne, sur une assez grosse quantité d’armes (grenades, mitraillettes,bombes incendiaires etc.) qui avaient été entreposées là par Marcel Memain,et qui était le dépôt d’armes de son groupe de Résistance » (Ibid., p. 57). Par la suite,une souricière fut organisée,qui permit de décapiter le réseau.
On le voit : les premiers interrogatoires permirent d’obtenir un renseignement capital, l’adresse de la « boîte aux lettres ». Par la suite,ce renseignement fut exploité.
La confirmation inattendue d’un Résistant.
Autre exemple :
-le 5 février 1944,à Lyon,quatre voitures servant à la Résistance furent découvertes dans un garage. Immédiatement, le Police allemande rechercha le nom du propriétaire du local. A procès de la « gestapo géorgienne »,on put entendre :
"Ils [les auxiliaires des Allemands] cernèrent alors le café voisin et arrêtèrent quatre jeunes gens qu’ils livrèrent aux Allemands qui devaient obtenir, à la suite d’un interrogatoire à leur façon, le nom du propriétaire du garage, M. Buffet, absent lord de la perquisition" [PGG, dossier 1, p. 73.]
Là encore,donc,les interrogatoires furent menés de façon à obtenir une information nécessaire à la suite.
Parmi les gens arrêtés figuraient Jean Choux et Georges Cochet : « ces deux petits gars étaient des agents de liaison du colonel Descoures »[102]. A l’audience,H. Oberchmuckler confirma que leur interrogatoire fut violent : « J’ai […] donné des coups », avoua-t-il[103]. Par sadisme ? Non,tout simplement parce que sur G. Cochet,on avait trouvé « de petites feuilles de papier,avec l’indication d’un maquis près de Valence, avec toutes les précisions utiles : les entrées,les sorties,les armements,les postes de résistance. »[104]. « [J]’ai compris que c’était une très grosse affaire » expliqua H. Oberchmuclker (Id.). D’où cette volonté d’obtenir à tout prix des renseignements afin de décapiter le groupe.
Soulignons d’ailleurs qu’à l’audience, le « supérieur » de MM. Choux et Cochet dans la Résistance admit que les Allemands avaient usé de la violence pour extorquer des informations :
"Là [dans le café],j’ai vu deux de mes aides qui étaient battus à coups de pied, de poing, giflés,et ainsi de suite,par toute la bande [...]. Ils avaient trouvé évidemment des papiers sur ces deux petits gars. Ils voulaient savoir d’où cela provenait,où ça allait[105].
De façon inattendue,le Président lui-même renchérit :
M. LE PRÉSIDENT:
C’est peut-être ce qui a motivé les brutalités, parce qu’on a trouvé sur eux des papiers importants ?
LE TÉMOIN [C. Favreau ]: Évidemment.
M. LE PRÉSIDENT: Et sur vous, on n’a rien trouvé ?
LE TÉMOIN: Rien du tout (PGG, dossier 8, p.121).
D’où le fait que,contrairement à MM. Choux et Cochet,il ne fut pas battu et fut au contraire rapidement relâché.
Un interrogatoire sévère permet de trouver le poste émetteur clandestin.
Dans une autre affaire,six agents de renseignement américains (des « parachutistes ») furent appréhendés boulevard Suchet et emmenés dans les locaux de la Police. Les Allemands voulaient à tout prix saisir leur poste émetteur. Ils les interrogèrent jusqu’à obtenir le renseignement voulu. Au procès des « auxiliaire français de la Gestapo »,l’exposé des faits déclarait :
"Du propre aveu de Combier,les tortures ont été extrêmement violentes et sous leur effet,l’un des Américains indiqua l’emplacement d’un poste émetteur Bd Suchet. Berger [un policier allemand] et Combier se rendirent sur les lieux et [...] Berger se rendit au sous-sol d’où il sortit avec le poste émetteur" [106].
Tous ces faits confirment que les Allemands interrogeaient pour obtenir des renseignements utiles afin de lutter contre l’ennemi.
On n’est pas violenté quand on parle.
Dans ce climat,la personne qui acceptait de parler n’était pas gravement violentée (tout au plus recevait-elle quelques coups). Un cas flagrant est celui d’Armand Crahes.Le 29 juillet 1944 vers 23 heures, l’homme fut appréhendé alors qu’il passait devant le café où les résistants se réunissaient. Au procès des « auxiliaires français de la Gestapo », le Président le questionna :
M. LE PRÉSIDENT::
On vous a arrêté, on vous a conduit à Blois. On vous a interrogé à Blois ?
M. CRAHES: A Blois, Combier m’a interrogé avec Jouaire.
M. LE PRÉSIDENT: Comment vous ont-ils interrogé ? Vous ont-ils battu ?
M. CRAHES: Oui, ils m’ont battu.
M. LE PRÉSIDENT: Sur quelle partie du corps ?
M. CRAHES: Ils m’ont mis un coup de poing dans la figure [...][107].
Ce coup suffit pour que le témoin craque et « donne » un maquisard : il s’agissait du neveu du jardinier pour lequel il travaillait (voy. ci-dessous). A partir de ce moment,non seulement A. Crahes ne fut plus battu, mais il fut finalement relâché :
M. CRAHES :
J’ai été arrêté le 29 [juillet 1944] et je suis ressorti le 7 août. [...] Je suis sorti par la Gestapo qui m’a relâché [Ibid.,pp. 212-3].
On ne violente pas dans des affaires mineures Cas d’un rédacteur en chef d’un journal clandestin.
Précisons également que,pour des affaires mineures (sabotage local, diffusion d’écrits anti-allemands),les gens interrogés n’étaient généralement pas torturés, même s’ils ne donnaient aucun renseignement. Sous l’occupation, à Paris,le rédacteur en chef d’un journal russe anti-allemand fut appréhendé avec trois de ses collaborateurs. Au procès de la « gestapo géorgienne », le Président l’interrogea :
M. LE PRÉSIDENT:
[…] Est-ce que vous avez été violemment maltraité pendant votre séjour [entre les mains des Allemands] ou avez-vous été traité convenablement ?
M. BORISSOF:
Pas trop bien. J’ai été battu au moment de l’arrestation et quand on m’a amené rue de Varenne,on a appuyé avec force le revolver contre les côtes;je l’ai senti pendant plusieurs semaines [PGG, dossier 9, p. 125].
Certes,il est douloureux d’être frappé lors d’une arrestation mouvementée et d’avoir un pistolet fortement appuyé sur les côtes. Mais on ne saurait ici parler de « tortures ». (PAFG, exposé des faits, p. 18).
[75] (PBL, 6, p. 159, déposition de Françoise Thierry).
[76] PBL, 3, pp. 102-3.Il est indéniable que Lafon fit son possible pour lutter contre le vol. Par exemple,à Tulle, deux de ses hommes avaient volé dans une épicerie. A son procès, il raconta sans être démenti « L’épicière est venue me le dire ; je les ai frappés devant elle et je leur ai infligé six mois de prison » (PBL, 3, 134). A l’audience,d’ailleurs,le commissaire Clot,qui avait instruit le dossier, se vit demander si Lafon avait gardé pour lui ce qu’avaient pu voler ses hommes.
Il répondit :
« M. LE COMMISSAIRE CLOT:
D’une façon précise,je ne crois pas. Je sais qu’en plusieurs occasions, Lafon a fait restituer des sommes d’argent.On peut citer le cas de la bijoutière […] qui avait été assaillie par l’équipe des Corses de la rue Lauriston […]. A cette femme, on avait volé des bijoux. Lafon l’a appris. Il a convoqué notamment un nommé Suizoui […] il a exigé qu’on lui rapporte les brillants et il les a restitués, tout au moins en grande partie » (PBL, 4, p. 20).
[77] Le procès de la « bande Bonny-Lafon » eut lieu en décembre 1944,soit deux mois seulement après la « libération » complète du territoire. Après les graves excès d’août-octobre 1944, son objectif était de montrer au pays que la Justice (légale) allait s’occuper de condamner tous les « traîtres » et les « collabos », donc qu’il était inutile de poursuivre les règlements de compte sauvages ou n’aillant qu’une simple apparence de légalité. Dans ce climat, l’instruction fut menée de façon à établir suffisamment de faits justifiant la condamnation des accusés. Mais elle n’alla plus loin. D’où son caractère très rapide et très lacunaire, que le Tribunal ne songea même pas à nier :
« M. LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT:
Nous sommes obligés de reconnaître que l’instruction a été particulièrement rapide […].
M. LE PRESIDENT:
Je le reconnais étant donné les circonstances…
Me DELAUNEY:
[…] Il faut reconnaître qu’il y a des lacunes dans ce dossier.
M. LE PRESIDENT:
Ce n’est pas douteux. » (PBL,3,pp.10-11).On ne pouvait espérer meilleur aveu.
[78] Voy. PAFG, audience du 1er mars 1947, p. 45.
[79]
« M. LE PRÉSIDENT:
Alors, vous avez été envoyé à Fresnes, puis déporté à Buchenwald. Et sur vos deux camarades qui étaient arrêtés en même temps que vous, un seul est revenu ?
M. COLANGELO:
Oui, Tino Vitti est mort sûrement » (Ibid., p. 35).
[80] Sept affaires ont frappé des personnes dont,faute d’informations,on ignore si elles étaient innocentes ou non.Le lecteur les trouvera résumées dans l’annexe, il s’agit de : l’affaire I.4 dans le procès de la « gestapo géorgienne ; l’affaire IX dans le procès de la « gestapo de Neuilly » ; les affaires II, IV.1, IV.2, VII.1 et VIII.4 dans le procès de la « bande Bonny-Lafon ». J’ajoute qu’une perquisition infructueuse chez un suspect n’implique pas toujours l’innocence de celui-ci. Le 23 mars 1944, par exemple, en Dordogne, des membres de la bande Bonny-Lafon se rendirent chez le couple Marceron que l’on suspectait de détenir des explosifs. Lors du procès de cette bande, le Président déclara : « Cette femme et son mari étaient soupçonnés d’avoir des caisses d’explosifs ; elle a répondu en même temps que son mari qu’elle n’avait pas d’explosifs et ne savait pas ce que cela voulait dire. Il a été procédé à une perquisition à laquelle ont pris part les Nord-africains, il y avait effectivement six caisses d’explosifs appartenant à la Résistance cachée dans la propriété, mais fort heureusement, elles n’ont pas été découvertes » (PBL, 3, pp. 152-3).
[81] Dixit le procureur général français à Nuremberg, François de Menthon (TMI, V, 372).
[82] PAFG, exposé des faits, p. 26.
[83]
Né à Tunis en 1911,de nationalité italienne,Sébastien Solina avait été condamné à un an de prison en 1943 « pour exercice du métier de souteneur » (PGG, dossier 1, p. 153). Devenu aide-géomètre,il travailla dans l’organisation Todt et entra ensuite à la « gestapo géorgienne » (Id.). Bref,on aurait tort de voir en cet homme un « nazi fanatique » ; c’était une « petite frappe » que les circonstances entraînèrent dans une voie tortueuse…
[84] PGG, dossier 10, p. 121.
[85] PGG, dossier 1, exposé des faits pp. 57-8.
[86]
« M. LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT:
Mlle Muller avait un revolver ?
M. BOULET: Oui, elle ne s’en est pas servi » (PGG, dossier 10, p. 124).
[87] « M. BOULET: Non,je n’ai pas tiré ;comme mon revolver était au cran d’arrêt,la balle n’est pas partie » (Id.).
[88] PGG, dossier 2, pp. 22-23.
[89] PGG, dossier 1, exposé des faits, p. 35.
[90] PGG, dossier 10, p. 114.
[91] PGG, dossier 12, p. 27.
[92] PBL, 6, p. 113, déposition de M. Secq.
[93] PGG, dossier 3, p. 94.
[94] PGG, dossier 1, pp. 55-6.
[95] PGG, dossier 3, p. 17.
[96] PAFG, audience du 1er mars 1947, p. 24.
[97] PGG, dossier 10, p. 29.
[98] PGN, 5, p. 89, déposition de Henri Phegnon.
[99] PGG, dossier 1, p. 52.
[100] Voy., TMI, XXXVII, document F-571, p. 263.
[101] PGG, exposé des faits, p. 44.
[102] PGG, dossier 8, p. 121, déposition de Charles Favreau.
[103]
« J’ai assisté à cet interrogatoire. J’avoue que j’étais très nerveux. Je n’ai pas été très correct. J’ai même donné des coups » (PGG, dossier 3, p. 80). Voy. également l’exposé des faits, p. 83 : « M. Choux, agent de la Résistance, sous les ordres de M. Buffet [réseau lyonnais], a été arrêté le 5 février [1944] entre le café et le garage. Oberchmuckler lui fit subir un interrogatoire très dur et le frappa à coups de pieds et de poings. M. Choux fut alors emmené au siège de la Gestapo en compagnie de son ami Cochet,arrêté avec lui.Tous deux furent à nouveau frappés. Oberchmuckler s’acharnait (sic) puis Choux et Cochet furent déportés à Buchenwald et viennent de rentrer ».
[104] PGG, dossier 3, p. 81.
[105] PGG, dossier 8, pp. 117 et 120.
[106] PAFG, exposé des faits, p. 25.
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Spartacus Kouros Messages : 2078 Date d'inscription : 13/03/2010 Age : 58 Localisation : Les arènes
Sujet: Re: L’action de la Police allemande en France occupée. Mer 2 Jan - 16:23
Cas du dépôt de Vaize (à Lyon)
Dans une autre affaire,à Lyon,des attentats et des sabotages avaient été commis au dépôt de Vaize,endommageant plusieurs locomotives. H. Oberchmuckler fut chargé d’interroger les ouvriers. A son procès, voici ce que l’on put entendre :
LE TÉMOIN [Marcel Renni]: Oui, c’est lui qui menait l’interrogatoire.
M. LE PRÉSIDENT: D’après ce que vous avez dit, il était très dur et arrogant ?
Le commissaire du gouvernement] Reboul:
Vous n’avez pas assisté à des brutalités ?
LE TÉMOIN: Non.
[...] M. LE PRÉSIDENT: Et vous ne l’avez pas vu se livrer à des brutalités ?
LE TÉMOIN: Non [108].
M. LE PRÉSIDENT:
Qu’est-ce qui s’est passé ? Est-ce qu’il a usé envers vous de brutalités ?
LE TÉMOIN [Paul Chivre]:
Non. Il ne m’a pas touché.Il m’a interrogé durement.J’étais chef de service, lorsqu’il y a eu l’explosion des bombes. Il a cherché à me faire avouer, mais sans me toucher. Il voulait savoir si je connaissais celui qui aurait fait cela [...]. Il a voulu essayer de me faire avouer à force de paroles [Ibid., pp. 152 et 154).
Un autre Résistant interrogé sans violence.
Parfois même,des Résistants arrêtés dans des affaires plus graves n’étaient pas torturés. Xavier Alessandrini résistait avec ses deux fils. Une perquisition menée après dénonciation permit de découvrir chez lui « des tampons qui servaient à faire des pièces d’identité » (PLB, 7, p. 65). L’homme fut arrêté et emmené pour être interrogé. Plus tard,il déclara :
"[…] je fus interrogé par le docteur Sam, Allemand. Je n’ai pas à me plaindre de l’interrogatoire que j’ai subi de la part de ce monsieur" [Id.].
Finalement,personne ne fut arrêté.
On brutalise quand l’arrêté ne répond pas.
En revanche,ceux qui,dans des affaires plus graves,refusaient obstinément de parler étaient battus,parfois même très gravement.
Un prévenu confirme.
Lors de l’instruction du procès de la « gestapo de Neuilly, le jeune prévenu Jacques Labussière (né en 1923) déclara :
"Les patriotes arrêtés étaient conduits 93 rue Lauriston où ils étaient interrogés. Ils ne restaient au service qu’une journée au plus […].
Lorsque les détenus ne voulaient pas répondre,ils étaient frappés et souvent j’en ai vu qui avaient la figure enflée à la suite des coups reçus" [109].
Cas du couple Bisson.
C’est incontestablement vrai. Ainsi,après que A. Crahes eut « donné » le neveu du jardinier pour lequel il travaillait,les auxiliaires de la Police allemande se rendirent chez ledit jardinier. Il s’agissait de M. Bisson. Au procès organisé en 1947,on apprit ce qui suit (je souligne) :
"Bisson et son épouse furent fortement maltraités parce qu’ils refusaient d’indiquer le refuge de leur neveu. Bisson emmené par la Gestapo de Blois,où il fut interrogé et frappé par Jouaire, fût incarcéré à la maison d’arrêt de Blois,d’où il fut libéré le 10 août par la Résistance" [110].
C’est net :M. Bisson subit un traitement beaucoup plus dur qu’A. Crahes parce qu’il avait refusé de parler…
Abondance d’exemples
De tels exemples abondent, qui montrent de gens battus parce qu’ils gardaient obstinément le silence. En voici quelques-uns (je souligne) :
Charles Caron, arrêté parce que suspecté de faits de Résistance :
Pendant cinq jour Caron était interrogé par Martin et ses agents sous l’accusation d’être communiste,et, comme il refusait de répondre,il était à chaque fois violemment frappé. [111].
Alfred Sirot,arrêté le 20 juillet 1943 :
"J’ai passé à l’interrogatoire le 23 juillet 1943. Ne voulant pas répondre aux questions qu’ils me demandèrent,ils me torturèrent" Ils m’on cassé une côte,la mâchoire inférieure [TMI, XXXVII, 273.]
Francisser Guilbert,arrêté le 23 septembre 1943 pour trafic d’armes (une perquisition avait permis d’en trouver deux chez lui) :
"N’avouant rien,ils me frappèrent à coups de matraque et de nerf de bœuf, ils me cassèrent deux dents.Ils allèrent même jusqu’à me faire passer à la baignoire tout habillé et me ramenèrent tout mouillé et me laissèrent dans cet état trois jours et trois nuits "[Ibid., p. 277].
Marcel Rémy,arrêté le 2 mai 1944 pour Résistance :
"Comme je ne voulais rien dire,on m’a dévêtu et mis à la baignoire […]. Comme je persistais dans mon silence,on m’a détaché et remis encore une nouvelle fois sur le ventre" [Ibid., p.285].
Henri Phegnon,assureur à Vernouillet (Seine & Oise) et chef du groupement de résistance de cette localité,arrêté le 1er décembre 1943 :
LE TEMOIN:
On voulait savoir,comme j’étais le chef de la Résistance à Vernouillet, le nom de mes camarades. Comme je ne répondais pas,on me frappait à coups de nerfs de bœuf sur la tête,et on me retrempait dedans, cinq à six fois de suite [PGN, 5, p. 90].
Joguer,Résistant du réseau Mithridate,fut arrêté chez lui :
Les agents de la Gestapo procédèrent à son interrogatoire et le frappèrent violemment parce qu’il refusait de répondre [PAFG,exposé des faits, p.11].
Plus haut,j’ai parlé d’un jeune Russe appréhendé avec une serviette contenant des écrits hostiles à l’armée allemande,blessé alors qu’il tentait de s’enfuir et transporté à l’hôpital de la Pitié. Convoqué comme témoin au procès de la « gestapo géorgienne »,il raconta :
M. NOVO BOROWSKY:
[…] A l’entrée de la Pitié, l’homme qui m’avait arrêté, a continué à me frapper en me posant toujours les mêmes questions que celles qu’il me posait depuis le début,c’est-à-dire pour donner des renseignements quelconques. Évidemment,j’ai refusé de donner tous ces renseignements. J’ai donné une ou deux phrases absolument inventées ; que c’était un nommé Jacquot qui m’avait donné ces papiers (Jacquot n’existait pas, bien entendu).
Au bout d’un quart d’heure,il s’est arrêté de me frapper.Il m’a craché à la figure. Il m’a dit que si je ne disais pas la vérité,on me laisserait sans soins, etc. [PGG, dossier 12, p. 45/3.]
Autre cas :
Joël, juif,dit Henri Boucher, dit Le Boxeur, était Résistant à Paris. Il « fabriquait de faux tampons allemands pour le compte de la Résistance »[112]. Des agents lui tendirent un piège en se faisant passer pour des Résistants qui voulaient un tampon. Joël fut appréhendé. « [conduit rue de Londres,il y fut interrogé,frappé et même torturé, puis livré aux Allemands. » (Ibid., p. 126). «Terrile et Sautet ont soumis Joël pendant deux heures à toutes sortes de tortures » (Ibid., p. 131). « Joël avait fini la peau du crâne fendue »[113].
Interrogée au procès de la « gestapo géorgienne »,l’ancienne secrétaire H.de Tranze expliqua les raisons de ces mauvais traitements :
« M. LE PRÉSIDENT: [...] A-t-il était torturé et frappé sauvagement, ou bien a-t-il été sauvagement brutalisé ?
Hélène de TRANZE [elle se trouvait dans le bureau d’à-côté]:
Il a été battu […]. J’ai entendu les questions qu’on lui posait, et Joël ne voulait pas répondre.
M. LE PRÉSIDENT: Et comme il ne répondait pas,qu’est-ce que vous avez entendu ?
Hélène de TRANZE: On l’a battu [PGG, dossier 6, p. 48-9.].
Un cas intéressant : les Résistants de château des Lelong.
Mentionnons maintenant l’affaire du château de Mlle Lelong, où les auxiliaires des Allemands appréhendèrent tout un groupe de Résistants. Parmi eux figurait un certain M. Vernazobres,arrêté alors qu’il partait pour le maquis. [114]. Plus tard, il déclara :
M. VERNAZOBRES:
Il voulait essayer de nous faire dire que nous étions vraiment des maquisards, à ce moment-là,ou si nous nous rendions au maquis.C’est surtout sur ce point là qu’il nous interrogeait,c’était surtout cela qui l’intéressait.
M. LE PRÉSIDENT: C’est parce que vous ne répondiez pas qu’il vous frappait.
M. VERNAZOBRES: Exactement [Ibid., p. 56.].
M. Vernazobres fut alors emmené rue des Saussaies :
"Il y avait là deux personnes en uniforme,deux Allemands,qui m’ont interrogé à mon tour avant d’aller dans l’autre salle.Évidemment,ils m’ont posé toutes les questions qu’ils ont posées aux autres,à savoir si nous étions dans le maquis, ce que nous faisons, ils essayaient de nous faire avouer et, par la suite, voyant qu’ils n’obtenaient rien, l’un m’a dit : « Mon vieux,vous allez faire comme vos amis,vous allez passer de l’autre côté, à l’autre interrogatoire ».
Il y avait deux civils,c’étaient deux Allemands,l’un d’eux enleva son veston et se mit à taper sur moi avec un nerf de bœuf [...] en me demandant de préciser le jour de notre arrivée et ce que nous étions venus faire,ce que nous faisons,ce que nous comptions faire. Évidemment,je lui ai répondu que nous étions là en vacances, que nous faisions du camping,enfin une histoire quelconque,et il s’est acharné sur moi et sur mon cousin [...]. Nous tombions, nous nous relevions etc." [Ibid.,p.57].
Preuve que les agents de la Gestapo ne frappaient pas par plaisir,mais pour délier les langues.Avant de procéder à un interrogatoire,d’ailleurs,ils prévenaient qu’il valait mieux parler. Mlle Olga Ramette avait été arrêtée pour avoir facilité le départ de jeunes vers le maquis. Dans sa cellule se trouvait un autre Résistant appréhendé,M. Faucon :
Mlle RAMETTE:
A un moment donné,j’ai vu quelqu’un de la Gestapo qui est venu dire à M. Faucon : « Il faut avouer tout ce que tu sais. Si tu ne parles pas, tu saurais ce qu’il t’en coûte. Si j’ai un conseil à te donner, parle » [PGG, dossier 12, p. 18.].
Des propos semblables furent tenus à Mlle Lelong. Une fois appréhendée avec ses compagnons Résistants,cette jeune personne fut enfermée dans une salle avec son ami Paul Porestin. Plus tard, elle raconta :
Mlle LELONG:
... [Beller m’a dit] me prenant par la douceur : « Si tu parles, je te promets que tu ne seras pas battue,mais si tu ne parles pas, il sera d’abord battu devant toi et ensuite il sera fusillé ». Évidemment,je n’avais rien à dire. Alors, nous étions traités des pires mots grossiers : « Salope », « ordure »,tout ce que vous pouvez imaginer,et très vilement battus de coups de poings,coups de pieds dans le ventre,des gifles.
M. LE PRÉSIDENT:
Vous avez été vous-même frappée à coups de poings et de pieds dans le ventre par Beller.
Mlle LELONG: [115].
La nature de la Résistance rendait nécessaire l’emploi de la violence.
Je loue le courage de ces personnes qui,pour une action qu’elles croyaient bonne, ont gardé le silence même sous les coups. Mais dans le même temps,je refuse de blâmer ceux qui ont donné ces coups. La raison est simple :
- à Nuremberg, l’Accusation elle-même n’a pas contesté le fait que les Résistants pouvaient être condamnés à mort et exécutés comme francs-tireurs.
- Ce qu’elle a reproché aux Allemands,c’est d’avoir « torturé » avant,parfois,de tuer. Dans son réquisitoire introductif,le procureur général français déclara :
"Certes,les membres de la résistance ne remplissaient que rarement les conditions prévues par les Conventions de La Haye pour être considérés comme des combattants réguliers. Ils pouvaient être condamnés à mort comme francs-tireurs et exécutés. Mais ils furent assassinés sans jugement dans la plupart des cas après avoir affreusement torturés" [TMI, V, 408].
Le message était donc le suivant :
- « Vous pouviez les exécuter,mais pas les torturer ». C’est cependant oublier que face à la Résistance,les Allemands étaient confrontés à ce que les tacticiens appellent une « guerre asymétrique » ; c’est-à-dire une guerre où les armes utilisées dans l’un et dans l’autre camp sont de nature différente :
- à une armée bien armée et bien disciplinée,donc dotée d’une grande force de frappe, s’opposent des petits groupes qui compensent leur faible armement par une mobilité extrême, une lutte dans l’ombre (pas d’uniforme, clandestinité) et, avant tout, l’initiative dans l’action. Sous l’occupation, la nécessité du secret était telle que l’article 3 de la circulaire n° 2 publiée par la Résistance déclarait :
"Tout homme qui sollicite son admission dans le maquis de la Résistance […] gardera le secret le plus absolu sur la situation des refuges,la personnalité de ses chefs ou de ses camarades. Il sait que toute infraction à cette défense sera punie de mort" [116].
Il en découle que,pour l’armée régulière,l’unique riposte possible consiste à recueillir des informations suffisantes afin de :
- a) prévenir les coups de main ;
- b) démanteler les réseaux secrets.
Pour cela,il faut infiltrer et,quand on a la chance de saisir un membre de ces organisations clandestines,lui soutirer le maximum d’informations (noms des complices et des chefs, lieux de rendez-vous, localisation des caches d’armes, prochaines actions projetées…). Dans ce cas, si un interrogatoire « normal » se révèle infructueux, il n’y a plus qu’à procéder à un interrogatoire « poussé ».
Et lorsque le combat se transforme en lutte désespérée pour la survie, lorsque celui qui est aux prises avec la Résistance se trouve en même temps encerclé de toutes parts,attaqué simultanément sur deux (et même trois fronts) et promis à l’écrasement total en cas de défaite militaire alors les interrogatoires « poussés » peuvent rapidement dégénérer en séances de tortures si la personne questionnée refuse de répondre. Quitte à choquer,je dirai : c’est le jeu... Si on refuse ce jeu,alors il ne faut pas déclencher de guerre illégale dans une guerre à la vie et à la mort.
Rappelons que le 20 juillet 1944,répondant à D. Einsenhower qui,dans une déclaration unilatérale, avait qualifié les Résistants de soldats réguliers,le haut commandement allemand pour l’Ouest prévint :
"Si le haut commandement allié souhaite cette forme barbare de la guerre,à son aise. Mais qu’il se rendre compte que,dans ce cas,le combat sera mené des deux côtés avec les mêmes moyens" [117].
Il est donc absolument malhonnête de porter les violences qu’ont pu subir certains Résistants sur le compte du « sadisme nazi ». La plupart du temps, les agents de l’Allemagne n’agissaient pas par sadisme ; ils agissaient pour soutirer les informations nécessaires à la lutte suprême.
Les agissements de la Gestapo envers les femmes et les jeunes filles Fausseté de la thèse officielle.
Malgré ces évidences,le procureur général français à Nuremberg osa déclarer :
« les exécutants avaient toute latitude pour laisser se déchaîner leurs instincts de cruauté et de sadisme à l’égard de leurs victimes » (TMI, V, 404).
Cette thèse est encore véhiculée par une certaine littérature de sex-shop (voir document).
A supposer que ce fut vrai,ces agents en auraient profité,surtout à l’encontre des femmes qui tombaient entre leurs mains. Or,ils n’en ont pas profité.Certes,dans son rapport déjà cité,H. Paucot a écrit que, lors des interrogatoires,les femmes et les jeunes filles «sadiquement étaient presque toujours complètement dévêtues»[118] (voir document).
Mais c’est faux :dans les milliers de pages que j’ai pu lire,jamais il n’a été question de déshabillage[119],de viol ou même de gestes déplacés.
Mlle Phegnon n’a rien subi d’humiliant.
Au procès de la « gestapo de Neuilly »,Colette Phegnon,la fille du chef local de la Résistance,raconta son interrogatoire;si elle prétendit avoir été frappée (voy. plus haut),elle ne mentionna aucun déshabillage,aucune torture. Sur ce chapitre,elle se contenta de déclarer : « [R. Martin] m’a menacée de la baignoire. Mais cela s’est arrêté là. » (PGN, 5, 96).
Aucun « geste inconvenant » sur Mlle Lelong
Plus net encore, voici ce que l’on put entendre lors de la déposition de Mlle Lelong, laquelle racontait son calvaire alors qu’elle était attachée (tout habillée) à une chaise et battue par le « gestapiste » M. Beller :
M. LE PRÉSIDENT: Aucun geste inconvenant ?
Mlle LELONG: Non.
M. LE PRÉSIDENT: J’aime mieux cela [120].
Mme Mémain parle d’agents « assez convenables »…
Deux ans auparavant,une autre Résistante,Mme Mémain,s’était vue poser une question semblable et avait donné une réponse semblable :
M. LE PRÉSIDENT:
Est-ce que ceux qui étaient dans la loge se sont montrés convenables envers vous, Mlle Genet et autres ?
Mme MEMAIN: Ils ont été assez convenables [121].
… et Mme Thierry d’agents « corrects »
Au procès Bonny-Lafon,une femme dont il a déjà été question,F. Thierry, fut également questionnée sur la façon dont elle avait été interrogée :
Me DELAUNEY:
vous avez été relâchée,après un interrogatoire qui a été courtois,je crois ?
LE TEMOIN: Qui a été correct [122].
Le cas des femmes enceintes L’Accusation parle de femmes enceintes battues jusqu’à l’avortement…
A Nuremberg,l’Accusation française produisit une déclaration terrible du major Pierre Loranger. Après avoir enquêté sur les agissements des services de police allemands en France sous l’occupation,il écrivit :
"Aux supplices physiques,le sadisme de leurs tortionnaires ajoutait le supplice moral particulièrement pénible pour une femme ou une jeune fille d’être dévêtue et mise à nu par ses bourreaux.
L’état de grossesse ne les préservait pas des coups et lorsque les brutalités entraînaient l’expulsion du produit de conception,elles étaient laissées sans soins, exposées à tous les accidents et toutes les complications de ce criminel avortement" [TMI, XXXVII, 297].[voir document]
Aucun témoignage ne vient confirmer.
Suivent trois témoignages écrits de femmes et un émanant d’un homme mais concernant son épouse. On s’attend à trouver quatre récits terribles évoquant des mises à nu, des tortures inhumaines infligées à des femmes enceintes et des fausses couches. Mais on ne découvre rien de tel : aucun déshabillage, aucune humiliation, aucun avortement dû à des coups :
- Lucienne Krasnoploski n’a rien subi ;employée pendant deux mois comme femme de ménage à Kommandantur de Valenciennes,elle aurait vu des gens frappés et torturés (Ibid., pp. 299-300).
- Madame Carton,une serveuse de bar qui n’aurait pas servi assez vite deux Allemands, reçut une gifle brutale qui lui perfora le tympan (pp. 297-8.
- Madame Hazard, dont le mari était « chef d’un groupe de résistance » aurait été frappée à l’aide d’un nerf de bœuf « avec la dernière violence », mais sans que les coups n’occasionnassent de fracture, ce qui « stupéfia » le médecin (p. 298).
Notons que ces trois femmes n’étaient pas enceintes. La seule qui l’était s’appelait Gilberte Sindemans. C’était une jeune résistante de 22 ans. Le 24 février 1944, elle fut appréhendée dans un hôtel à Paris. Une fouille permit de découvrir dans ses affaires des tampons de la Kommandantur, des laissez-passer, des cartes de travailleurs allemands (volées la veille) ainsi qu’une boîte de cartouches et trois revolvers (TMI, XXXVII, 298). C’était donc un activiste importante. Voici ce qu’elle écrit :
"Aussitôt,ils mirent les menottes et m’emmenèrent pour un interrogatoire. Ne répondant pas,ils me giflèrent en plein visage avec une telle force que je tombais en bas de ma chaise. Ils me cravachèrent avec un cercle de caoutchouc,en plein visage […].
Je dois vous dire que j’étais enceinte de trois mois.
Après mon premier interrogatoire, je fus conduite à la prison de Fresnes et je fus jetée dans un cachot sans matelas,sans couverture,et toujours les menottes aux mains derrière le dos, de plus les menottes aux pieds et pendant 4 jours, sans rien manger ni boire.Le 4ème jour,ils vinrent me chercher pour un interrogatoire. J’ai eu 24 interrogatoires et à chaque fois je revenais le visage encore plus enflé. Devant mon mutisme, ils me menacèrent de me faire déporter pour être fusillée. Ne parlant pas davantage, ils me mirent six mois en cellule au secret.
Arriva le jour de l’évacuation de la prison.Comme j’attendais mon bébé, ’espérais être libérée, mais je reçus la visite de mon commissaire et de l’aumônier. Ils me dirent que ma dernière [heure] était arrivée et que je devais parler […].
Je fus envoyé au Fort de Romainville et de là à l’hôpital où j’eus ma petite fille, le 25 août" [TMI, XXXVII, 299].
Certes,son aventure est très pénible. Mais si l’on ne veut pas prendre des coups et mettre la vie de son bébé en danger, on ne participe pas à une guerre illégale,on ne vole pas des papiers et des tampons de l’ennemi et on ne se livre pas au trafic d’armes en pleine occupation. De plus, je souligne que G. Sindemans n’a pas été dévêtue et, surtout, qu’elle n’a pas reçu de coups qui lui auraient fait perdre son bébé. Non, elle a finalement pu accoucher d’une petite fille vivante à la naissance. Preuve que, même mise au secret, elle n’a pas été si maltraitée que cela.
Par conséquent,ces quatre témoignages ne viennent nullement prouver les allégations du major Loranger. Or,gageons que si les autorités françaises avaient pu en recueillir ne serait-ce qu’un seul, même émanant d’un simple témoin oculaire, ils l’auraient produit. Aujourd’hui, ainsi, il n’est pas malhonnête d’affirmer que les allégations du major Loranger ne reposaient sur rien de fiable.
La malhonnêteté de l’Accusation.
Il est d’ailleurs intéressant de relever qu’à Nuremberg,le procureur adjoint C. Dubost lit la déclaration du major Lanranger puis cita uniquement la déposition de G. Sidemans (puisque les trois autres ne prouvaient rien) en prenant soin de la tronquer :
- il ne lit que les premières lignes,jusqu’à « Je dois vous dire que j’étais enceinte de trois mois », occultant ainsi le fait qu’elle avait finalement accouché d’une petite fille (TMI, VI, 179-180).
Ainsi laissait-il accroire au Tribunal que cette Résistante aurait,comme tant d’autres, perdu son enfant… On ne saurait être plus malhonnête… [voir le document]
Cas des femmes de Résistants : la Gestapo aurait pu faire bien pire.
Ces précisions effectuées,allons plus loin. Sous l’occupation,lors visites domiciliaires effectuées afin de saisir des Résistants, les auxiliaires des Allemands ont très souvent fait face aux épouses des individus recherchés. Comment se sont-ils comportés envers elle ? Les ont-ils déshabillées,torturées,frappées au point qu’elles eussent avorté si elles avaient été enceintes ? Nullement.
Cas de Mme Lecour.
Prenons tout d’abord le cas de Mme Lecour,de Cours-Cheverny. Son époux était un Résistant recherché. Le 30 juillet 1944, des auxiliaires français vinrent à son domicile. Mais l’homme n’était pas là ; il s’était réfugié ailleurs. A la maison,le groupe trouva uniquement l’épouse,alors enceinte de sept mois, avec un bébé.
Que firent ces individus ? A leur procès, l’exposé des faits raconta :
"Mme Lecour,enceinte de sept mois et seule avec un bébé de un an, était chez elle lorsque Combier et son équipe s’y présentèrent. Ces individus se livrèrent à une perquisition en règle de la maison et tentèrent par la menace de leurs armes,d’obtenir des renseignements sur le refuge de Lecour. Combier poussa la goujaterie au point de porter des gifles à Mme Lecour, malgré son état "[123].
A l’audience,l’époux fut entendu comme témoin :
M. LE PRÉSIDENT: Qu’est-ce qu’ils ont fait à votre femme ?
M. LECOUR: Ils l’ont frappée.
M. LE PRÉSIDENT: Ils ont fouillé toute la maison ?
M. LECOUR: Ils ont fait une perquisition chez moi […].
M. LE PRÉSIDENT: Est-ce qu’ils n’ont pas frappé votre femme, malgré son état ?
M. LECOUR: Oui.
M. LE PRÉSIDENT: De quelle manière l’ont-ils frappée ?
M. LECOUR: Ils l’ont giflée et tirée par les cheveux [124].
Puis vint l’épouse :
M. LE PRÉSIDENT: [...] Est-ce que l’un d’entre eux ne vous a pas porté des gifles ?
Mme LECOUR: Ils m’ont frappée et tirée par les cheveux [Ibid., p. 219.].
On doit certes condamner des violences exercées sur cette femme. Mais,si l’on en croit le major Loranger et tous les autres propagandistes, ces individus auraient dû recourir à des moyens bien plus terribles pour la faire parler:
- ils auraient dû prendre son bébé et dire : « Parle, ou on lui coupe d’abord une oreille, puis la deuxième… » ;
- ils auraient dû enlever l’enfant et lancer à la mère : « On te le rendra quand tu auras parlé » ;
- ils auraient dû allonger la femme à terre,la déshabiller et lui vociférer : « Parle où on te piétine le ventre ».
Les auxiliaires français se sont abstenus d’agir ainsi et ils partirent sans avoir pu apprendre le refuge du Résistant recherché…
Perquisition chez M. Buffet.
De Cours-Cheverny,allons à Lyon.Les membres de la « gestapo géorgienne » y recherchaient un Résistant assez important, M. Buffet. S’étant rendus chez lui et ne l’ayant pas trouvé,il opérèrent une perquisition en règle :
LE TÉMOIN [Mme Buffet]: [...] Vous avez tout renversé mes matelas et tout...
OBERCHMUCKLER.: Vous avez raison.
Reboul: [...] La perquisition a été complète ?
LE TÉMOIN: Oui.
Reboul: Les matelas ont été renversés ?
LE TÉMOIN: Les tiroirs, tout était par terre ! [PGG, dossier 8, p. 94]
Les agents ne trouvèrent rien qui aurait pu révéler la cachette de M. Buffet. Dans la maison,cependant,se trouvaient sa femme et sa fille. Sans surprise,ils cherchèrent à extorquer de la mère des informations. L’exposé des faits déclare qu’Oberchmuckler « l’interrogea durement et se répandit en menaces »[125]. L’a-t-il battue, torturée ? La suite permet de répondre à la question : H. Oberchmuckler,nous dit-on, «fit coller au mur Mme Buffet sous menace du revolver» (Id.). C’est tout…
En 1945,d’ailleurs,appelée comme témoin,Mme Buffet ne mentionna aucun traitement inhumain dont elle aurait été la victime. Voici ce qu’elle déclara :
"Le 5 février 1944,vers 11 heures du matin,trois individus se sont présentés à mon appartement,sous la menace d’un revolver,et ont fait une perquisition. Ils n’ont rien trouvé,naturellement,et ils m’ont questionné sur ce que faisait mon mari, sur ce qui se passait dans le garage. Je leur ai répondu que je ne savais rien,que je n’étais pas au courant. Ensuite,ils m’ont questionnée sur un nommé Georges,qui est actuellement le commandant Jouneau. J’ai dit que j’ignorais qui était cette personne, que je ne la connaissais pas.Voyant qu’ils n’arrivaient à rien,ils sont restés une heure à l’appartement. Ils m’ont questionné sur la famille de mon mari, me demandant où elle habitait,et ils sont repartis. Le lendemain, dimanche matin, trois autres individus sont venus. Ce n’étaient pas les mêmes. Ils m’ont encore questionnée. Ils ont fait une nouvelle perquisition et ils sont repartis" [126].
Peu après,le Président l’interrogea sur les menaces qu’elle avait subies :
M. LE PRÉSIDENT:
Vous avez indiqué qu’il [le chef] ne vous aurait pas menacée. Vous n’avez pas indiqué que c’était lui qui vous avait menacée ?
LE TÉMOIN: Il tenait son revolver contre moi.
M. LE PRÉSIDENT: C’est lui qui le tenait ?
LE TÉMOIN: Oui.
M. LE PRÉSIDENT:
C’est Obermuchkler qui tenait le revolver contre vous et qui vous a forcée à vous appuyer contre le mur ?
LE TÉMOIN:
Oui, c’est cela. Je n’ai pas bougé, d’ailleurs. Je suis restée immobile pendant la perquisition,pendant l’interrogatoire [Ibid.,p. 88-9].
Puis ce fut le tour du Commissaire du gouvernement Reboul :
Reboul:
Est-ce que vous n’avez pas été menacée au cours de cette première perquisition ?
LE TÉMOIN:
Non. On m’a simplement dit de me tenir tranquille. [...]. Je leur ai dit que j’ignorais ce que faisait mon mari. Ils m’ont dit que je pouvais me taire,mais que s’ils trouvaient mon mari, son affaire était classée [Ibid., p. 90].
Or,Mme Buffet connaissait parfaitement les activités illégales de son époux, ainsi que sa cachette. Lors du procès,elle lança fièrement à H. Oberchmuckler : « Je vous ai drôlement possédé ! » (Ibid., p. 95). Gageons cependant que si l’équipe venue l’avait déshabillée,durement frappée, brûlé les « parties sensibles »,enfoncé des allumettes sous les ongles ou coupé les oreilles de sa fille,cette femme aurait parlé. Mais les « collabos » ne l’ont pas fait…
Notons en outre qu’après la perquisition,les membres de la « gestapo géorgienne» recherchèrent M. Buffet activement. Ils présentèrent des photos aux gens du quartier pour savoir s’il était connu[127]. Or,ce Résistant avait une mère et des beaux-parents. Ils auraient donc pu les arrêter et faire prévenir M. Buffet que sa famille recouvrerait la liberté une fois qu’il se serait lui-même livré ;ils auraient même pu le demander sous forme d’un ultimatum. Ils ne l’ont pas fait ; ils ont juste arrêté par erreur son neveu, Georges Buffet, parce qu’ils croyaient que c’était le « Georges » de la Résistance qu’ils recherchaient.
Ils ne torturent pas,ils proposent de l’argent.
Justement,parlons-en de ce « Georges ». Il s’agissait de M. Jouneau « qu’Oberchmuckler recherchait activement » (Ibid., p. 84). Agissant selon une procédure habituelle,les auxiliaires vinrent perquisitionner à son domicile. Sans surprise, « Georges » était absent ; l’équipe ne trouva q ue son épouse et ses enfants. D’après l’exposé des faits lu au procès en juillet 1945,H. Oberchmuckler se « montra odieux »[128 . A-t-il torturé la femme ou torturé ses enfants sous ses yeux pour qu’elle parle ? Non. On lit :
"il tenta de corrompre Mme Jouneau en lui offrant de l’argent et déshabilla une de ses petites filles pour s’assurer de son sexe. Il se retira après deux heures d’interrogatoires et avoir volé des fourrures et effets" [Id.].
A l’audience,Oberchmuckler démentit et accusa un autre :
"[Mme Jounaud] me confond avec Krammer. Krammer qui était présent lui a dit : si vous me donnez l’adresse pour la direction de M. Jouneau, je vous donne cent mille francs ; et il a montré un paquet d’argent. [...]. En ce qui concerne le fait de déshabiller une petite fille,une petite fille de six mois, je précise qu’elle était couchée dans un petit lit, sur une veste en cuir [...]. Un Allemand a soulevé l’enfant,a pris cette veste de cuir et l’a volée. Alors,cette femme-là a pensé qu’on a regardé sa fille,une fillette de six mois, et elle va constater si vraiment l’Allemand a soulevé sa fille pour voler cette chose-là". [PGG, dossier 3, p. 98/
Toutefois,convoqué comme témoin,M. Jouneau accusa H. Oberchmuckler et précisa :
"[…] les enfants l’intéressaient particulièrement,et surtout ma fille aînée qui avait deux ans à l’époque,ressemblant un peu à un garçon. Les garçons l’intéressaient,ce monsieur,et il a précisé qu’il avait ce qu’il fallait pour s’en occuper.Je suis fort heureux qu’il n’ait pas eu à le faire.
[...] Cela s’est passé à 8 heures du matin, jusqu’à 11 heures, où s’est passée la perquisition. Oberchmuckler a fait passer tout ce qui était en son pouvoir, c’est-à-dire l’argent, d’abord. Il a mis 100 000 francs sur la table, ce malotru, pour ma personne. Elle valait mieux que cela, Monsieur Oberchmuckler, et vous ne saviez pas quel était l’esprit qui pouvait animer les Résistantes françaises. Vous auriez pu en mettre dix fois plus. Vous ne les auriez pas entraînées dans ce mauvais travail !" (Applaudissements dans la salle).
D’autre par,il avait donné l’ordre de ne pas enlever les enfants. Il attendait que son enquête soit plus approfondie.
Inutile de vous dire que ma femme était habituée à ce genre de répression : c’était la troisième.Le lendemain, elle déménageait, et sans tarder. [PGG, dossier 8, p. 139].
De tout cela,que retient-on ? Que pour faire parler une femme,les membres de la « gestapo géorgienne » n’utilisèrent aucune violence : ils ne torturèrent pas la mère en la déshabillant et en la frappant, ils ne molestèrent pas les enfants sous ses yeux en lui enjoignant de parler. Non, ils tentèrent de lui délier la langue avec de l’argent…
Aucune brutalité contre Mme Cléret.
Revenons à Paris et à l’affaire du réseau des PTT. La Police allemande recherchait M. Cléret,un des chefs Résistants, ainsi que ses hommes. Des membres de la « gestapo géorgienne » se rendirent à son domicile et trouvèrent uniquement sa femme. Lui était allé se réfugier en Seine-et-Oise pour « éviter une arrestation qu’il présageait comme imminente »[129]. Ils interrogèrent l’épouse qui refusa de répondre. Que se passa-t-il alors ? Fut-elle battue, torturée, électrocutée,brûlée avec de l’acide[130] ou avec un cigare allumé appliqué sur les seins[131], passée à la baignoire[132] ? Laissons-lui la parole. Le 23 juillet 1945,Mme KOMAROV, épouse Cléret, témoigna ainsi devant la Haute Cour :
Mme KOMAROV:
On m’a présenté les photographies des gens qui étaient des résistants des PTT arrêtés en me demandant de les reconnaître. Comme je refusais de le faire et que je ne voulais pas parler ils m’ont emmenée rue des Saussaies pour me faire parler, puis à Fresnes.
Rue des Saussaies, on m’a présenté des photographies. Ils voulaient que j’avoue que je connaissais ces gens,que mon mari était un agent terrible, qu’il était un tueur d’hommes, un tas de choses.
Une heure et demie après cela,j’ai été amenée à Fresnes.Pendant ce temps, ces messieurs étaient occupés à tout piller chez nous […] .
M. LE PRÉSIDENT:
Vous n’avez pas été brutalisée pendant que ces hommes étaient chez vous ?
Mme KOMAROV:
Non, je n’ai pas été brutalisée. On m’a dit des injures [PGG,dossier 11,pp. 3-4.].
On ne saurait être plus clair :bien que l’affaire ait été assez grave,Mme Cléret, qui refusait de parler,ne fut pas maltraitée,tout juste injuriée.
J’ajoute que,informé de la détention de son épouse,M. Cléret mit « tout en œuvre pour la faire libérer. Par l’intermédiaire d’amis,il parvint à toucher un des lieutenants d’Odicharia [...] qui demanda à M. Cléret 150 000 Frs pour l’élargissement. Cléret en passa par là et le 7 août 1944, Mme Cléret était remise en liberté »[133]. A l’audience,M. Cléret confirma : « Je crois que c’est plutôt à cause des 150 000 francs qu’elle a pu sortir de prison »[134].
La simple ruse contre Mme Meley.
Restons à Paris. Dans le cadre du démantèlement d’un réseau de Résistance, la Police allemande rechercha un certain M. Meley,le chef de l’organisation. Mais celui-ci avait pris la fuite, laissant sa femme seule chez lui. Les auxiliaires des Allemands tentèrent donc d’obtenir de l’épouse des informations. Employèrent-ils la torture, le fouet,l’acide, l’électricité ? Une fois encore, non. Il essayèrent la ruse :
1°) Le 20 juin 1944,G. Collignon se fit passer pour un membre de la Résistance qui voulait voir M. Meley.Mme Meley se contenta de répondre « Mon mari n’est pas là ». G. Collignon se retira (PGG, dossier 1, p. 67).
2°) Huit jours plus tard,des agents de la Gestapo vinrent dans l’appartement à minuit, « le mirent à sac,et perquisitionnèrent partout » (Ibid., p. 68). Il y restèrent pendant un certain temps,y organisant la surveillance par roulement afin d’appréhender M. Meley lorsqu’il viendrait. Mais rien ne vint,si bien qu’ils abandonnèrent. Mme Meley ne fut même pas arrêtée (Id.).
Même stratagème contre Mme Viard.
Dans la même affaire,la Gestapo chercha à saisir Georges Viard. Mais lui aussi avait fui,ne laissant que sa femme. Le 28 juin 1944, deux agents vinrent à son domicile et se firent passer pour des Résistants qui voulaient connaître son lieu de retraite. Mme Viard garda un silence prudent. Les intrus ne cherchèrent même pas à perquisitionner. « Ils lui donnèrent alors un numéro de téléphone [...] et la prièrent de les avertir si son mari rentrait. Mme Viard promit,ne fit rien, et ne revit jamais ces individus ». Lors du procès de la « gestapo géorgienne », l’un des accusés, Solina, reconnut qu’il avait perquisitionné chez Mme Viard et confirma cette version des faits :
"Mme Viard a simplement dit que son mari était absent. Nous avons dit : « Voulez-vous dire à votre mari qu’il téléphone à M. Totor ». On n’a même pas cherché dans la maison, alors qu’on pouvait aller dans toutes les pièces et procéder à toutes les vérifications qu’on aurait voulues" (PGG, dossier 3, pp. 59-60.).
L’aveu surprenant d’une femme pas maltraitée.
Terminons avec le cas de M. et Mme Marceron. Membres de la Résistance, ils cachaient six caisses d’explosifs chez eux. Ils furent « donnés » par une femme qui, après avoir été arrêtée,avait parlé. Lorsque les agents au service des Allemands arrivèrent,ils savaient ce qu’ils devaient trouver. Mais sans surprise, le couple nia tout en bloc[135]. La femme avait avec elle son petit enfants de 2 ans ½. Les agents, qui n’avaient pas de temps à perdre,auraient alors pu s’en saisir et se saisir de la mère pour faire pression sur l’homme (« Avoue ou on leur fait sauter la cervelle »). Ils n’en firent rien ; ils ne touchèrent ni à l’un ni à l’autre. Après avoir fouillé la maison sans résultat,ils annoncèrent qu’ils allaient emmener le mari (très probablement pour le confronter à celle qui l’avait « donné »). A leur procès, Mme Marceron raconta :
"[…] je leur ai demandé s’ils voulaient bien permettre à mon mari de manger un peu et de s’habiller un peu. Ils ont accepté tout de suite. Alors,mon mari s’est mis à casser la croûte.
Ces messieurs,parmi les Allemands, ont demandé s’ils pouvaient casser la croûte avec lui,en me disant qu’ils paieraient. J’ai dit : Si vous voulez manger,faites comme mon mari,servez-vous avec ce qu’il y a". [PBL, 7, p.53].
Le repas achevé,ils partirent avec le suspect. Par la suite,un agent français proposa à Mme Marceron qu’elle lui donne ses économies en échange de quoi il sauverait mari. « Si vous voulez bien, lui dit-il, je m’empare de cette somme [200 000 F], je vous laisse 25 000 F pour élever votre enfant. Oui ou non ? »[136]. La femme accepta et garda 30 000 F (p. 56). Quelques heures plus tard, M. Merceron revint et déclara : « Ils sont au courant de tout. Mme Mesclos a tout donné » (p. 57). Il fut bien obligé de dévoiler la cachette des explosifs. Les Allemands le déportèrent en Allemagne,mais ils laissèrent la mère en liberté et ne touchèrent pas à l’enfant…
Au procès,d’ailleurs,Mme Marceron eut le courage de terminer sa déposition en déclarant (avant d’être interrompue par le Président) :
"Je n’en veux pas aux Allemands,ce sont des ennemis,nous le savons très bien. Un Allemand défend sa patrie,nous défendons la nôtre…" [PBL, 7, p. 62.]
Tel fut le comportement de la « Gestapo » envers les épouses des Résistants. Nous sommes bien loin de l’image véhiculée par la propagande officielle…
- Conclusion -
Soixante ans après les faits,l’Histoire officielle donne de la Gestapo une image complètement fausse. Tronquant le jugement de Nuremberg,elle la présente comme une assemblée de criminels qui auraient semé la terreur à partir de 1933 en Allemagne, puis à partir de 1939-1940 dans les pays occupés.
La Gestapo nous dit-on, aurait été chargée de supprimer toute opposition, même purement spéculative. Pour mener à bien cette mission,elle aurait entretenu un immense réseau de délateurs, arrêté arbitrairement, torturé,envoyé en camp de concentration, fusillé etc. Ses victimes se compteraient par dizaines de milliers.
Comme d’habitude lorsqu’il est question de l’Allemagne hitlérienne,l’image créée résulte d’un « savant éclairage de scène ». Une partie seulement des planches est illuminée,l’autre restant plongée dans l’ombre, ce qui permet de cacher les faits dérangeants. Concernant la création de la Gestapo,on occulte l’état réel de l’Allemagne en janvier 1933 :
- la terrible crise économique,
- la faillite du parlementarisme,
-la paralysie des institutions,
- le réel danger bolcheviste.
Ainsi condamne-t-on les peuples à ne jamais comprendre pourquoi,une fois au pouvoir, les nationaux-socialistes ont balayé la République de Weimar,restreint les libertés individuelles et mis en place une Police secrète qui devait défendre le nouveau régime, encore fragile, contre le danger révolutionnaire.
A l’époque,seule une action énergique pouvait sauver l’Allemagne de la mort par asphyxie économique et,par conséquent,du danger bolchevique. Cette action,Hitler l’a entreprise. L’immense majorité du peuple allemand l’a compris et l’a suivi,trop heureuse de retrouver un avenir digne de ce nom.Dès lors,loin d’être un instrument de terreur, la Gestapo fut une police politique banale, aux moyens relativement réduits telle qu’il en existait une déjà sous Weimar et telle qu’il en existait dans pratiquement tous les pays. En 1939, d’ailleurs, 0,05 % de la population allemande était internée pour des motifs politiques.
Le fait que,jusqu’à la guerre,la Gestapo ait agi comme une police parfaitement banale était si évident telle qu’à Nuremberg, les juges la déclarèrent « association criminelle » à partir du 1er septembre 1939 seulement. Depuis six décennies, cependant, les historiens occultent ce fait capital.
Cette restriction rendait-elle justifiée la décision du TMI ? J’estime que non. Car, pour la période 1940-1945,les magistrats se sont également fondés sur une image créée avec une scène partiellement éclairée. En particulier, ils ont négligé le fait qu’à partir du 3 septembre 1939,l’Allemagne se vit imposer une lutte à la vie et à la mort et qu’à partir de 1942, cette lutte devint pour elle un combat désespéré face aux trois plus grands empires mondiaux. A cette époque,le Reich était encerclé de toute part, soumis à un blocus impitoyable et attaqué sur deux fronts. Pris dans ce tourbillon de feu, pouvait-il accepter qu’à l’arrière du front, des citoyens des pays occupés se lèvent pour mener une guerre illégale ? Évidemment non. Or, cette guerre illégale était une guerre asymétrique : face à une armée d’occupation régulière surgissaient des petits groupes faiblement armés mais dont le point fort était le caractère insaisissable. Pour les combattre,il fallait à tout prix obtenir les renseignements nécessaires : noms des chefs, lieux des rendez-vous secrets, prochaines actions projetées, emplacements des caches d’armes... Voilà pourquoi rapidement,les interrogatoires des Résistants appréhendés purent devenir très violents lorsque ceux-ci refusaient de répondre.
Depuis 1945,les vainqueurs attribuent ces « tortures » à la « barbarie nazie » ; ils les présentent comme une conséquence logique du « nazisme » qui aurait nié toute morale. Ils se trompent : ces violences étaient dues à la nature de la guerre illégale entreprise contre l’occupant. Quand l’arme principale est l’absence de renseignement que l’ennemi possède sur vous, il va de soi que cet ennemi va tout mettre en œuvre pour recueillir les informations nécessaires. Et si la lutte devient une lutte désespérée à la vie et à la mort, il ira jusqu’à battre,voire torturer, pour obtenir ce qu’il veut. C’est fatal et la faute revient en premier lieu à ceux qui déchaînent une guerre d’extermination.
Soulignons toutefois que les vainqueurs exagèrent très souvent lorsqu’ils dénoncent les « tortures » dont la Gestapo se serait rendue coupable. Sans doute y a-t-il eu des cas horribles ; mais contrairement à ce qu’ils prétendent, dans l’immense majorité des cas, l’occupant et ses sbires ont été beaucoup moins loin qu’ils auraient pu. Certes, ils ont battu,ils ont passé à la baignoire, ils ont pendu par les mains ou par les pieds, ils ont frappé à coups de nerf de bœuf… mais seulement dans des affaires jugées graves et lorsque l’individu appréhendé refusait de parler. Ils n’ont pas torturé tout le monde, loin s’en faut. Soulignons en outre qu’ils ont épargné le plus possible les femmes, les épouses et les enfants. Les allégations du major Loranger concernant le déshabillage systématique des femmes et les avortements provoqués par les coups ne reposent sur rien.
Enfin, il est à noter que,contrairement à une légende tenace,les services de police allemands n’ont pas frappé arbitrairement,loin s’en faut. Les procès d’après guerre sont à ce titre très révélateurs : sur les 57 affaires liées à la lutte contre la résistance pour lesquelles les accusés ont été jugés, 53,au moins,concernaient des « coupables » incontestés. Cette proportion seule suffit pour écarter la thèse de l’arbitraire.
La Gestapo a donc été une police politique banale chargée tout d’abord de prévenir et de réprimer les actions hostiles à l’État. Par la suite,dans les territoires occupés,elle a eu comme mission de combattre la guerre illégale. Les excès qu’elle a pu commettre,et qu’elle a commis, ne sont pas la conséquence du « sadisme nazi », mais du contexte dans lequel elle a été amenée à agir, un contexte de lutte à la vie et à la mort. La faute revient donc non pas à Hitler, mais à ceux qui, pour abattre son régime, ont déchaîné en 1939 une guerre d’extermination.
Les « barbares », c’était eux.
[108] PGG, dossier 8, pp. 149 et 151.
[109]
PBL, 1, 38. Notons qu’à l’audience, J. Labussière ne parla plus que d’une personne qu’il aurait vue ainsi
(« M. LABUSSIERE :
J’ai vu une personne,franchement » (PBL, 2, p. 98). Cependant,cette minimisation à l’audience m’apparaît peu crédible.
[110] PAFG, exposé des faits, p. 20.
[111] PGN, 1, p. 19. Confirmation à l’audience par le témoin lui-même :
« M. Le PRESIDENT:
Est-ce qu’ils n’ont pas obtenu de votre part des renseignements qu’ils désiraient ?
LE TEMOIN: Pas du tout : je n’ai pas parlé ». (PGN, 4, p. 75).
[112] PGG, exposé des faits, p. 126bis.
[113]
Id. Voy également PGG, dossier 6, p. 32 :
« M. LE PRÉSIDENT:
Est-ce que quand vous l’avez vu,vous avez pensé qu’il avait été victime de mauvais traitements ?
GAMMA:
Il avait le visage un peu tuméfié. » ; PGG, dossier 12, p. 26 :
« M. LE COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT:
Pour que l’affaire Joël vous causât cette impression,les tortures de Joël ont été épouvantables ?
HELENE DE TRANZE: C’était un garçon qui avait été battu. ».
[114]
« ils avaient l’air de savoir pertinemment que nous étions là pour nous rendre dans un maquis » (PAFG, audience du 1er mars 1947, p. 54).
[115] PAFG, audience du 1er mars 1947,déposition de Jacqueline Lelong,p. 4.
[116] Voy. P. Henriot, Et s’ils débarquaient ? (Éditions du Centre d’études de l’Agence Inter-France, 1943), p. 268.
[117] Voy. Otto Abetz, Histoire d’un politique franco-allemande,1930-1950. Mémoires d’un Ambassadeur (éd. Stock, 1953), p. 312.
[118]
« Les femmes et les jeunes filles étaient traitées de la même façon [que les hommes] et sadiquement étaient presque toujours complètement dévêtues » (doc. F-571, TMI XXXVII, 263).
[119]
Sauf dans une affaire, mais il s’agissait d’un vol sordide perpétré par deux membres de la « bande Bonny-Lafon ». Les voleurs déshabillèrent et torturèrent une vieille femme et son infirmière pour les contraindre à révéler l’endroit où les économies étaient cachées. Puis ils assassinèrent les deux malheureuses. Dans cette lamentable affaire, les individus n’agissaient cependant pas comme des agents au service des Allemands, mais comme de vulgaires malfrats soucieux d’enrichissement personnel…
[120] PAFG, audience du 1er mars 1947,déposition de Jacqueline Lelong, p. 24.
[121] PGG, dossier 10, p. 117.
[122] PLB, 6, p. 167, déposition de Françoise Thierry.
[123] PAFG, exposé des faits, p. 20.
[124] PAFG, audience du 1er mars 1947, déposition de M. Lecour, p. 216.
[125] PGG, exposé des faits, p. 83.
[126] PGG, dossier 8,p.86, déposition de Mme Mathilde Vernay,épouse Buffet.
[127]
« Ils promenaient dans le quartier des photographies agrandies et demandaient à tous les gens s’ils me connaissaient » (PGG, dossier 8, p. 66) ;
« Reboul: Je dis que le témoin nous apporte un nouveau fait,c’est que,postérieurement à l’affaire, ils l’ont recherché partout en promenant dans le quartier des photographies qu’ils avaient pris soin de faire agrandir. » (Id.). En vérité,les photos avaient été agrandies par Mme Buffet huit ans auparavant (Ibid., p. 135).
[128] PGG, dossier 1, p. 84.
[129] PGG, exposé des faits, p. 66.
[130]
« Il faut réserver une mention spéciale à des supplices plus raffinés : […] incisions entre les orteils sur lesquels on versait un liquide corrosif, les courants électriques bien dosés qui convulsaient tous les muscles » (voy. le rapport déjà cité d’H. Paucot, TMI XXXVII, p. 264).
[131]
« J’ai personnellement vu une jeune femme qui portait sur les seins les cicatrices de brûlures faites avec un cigare allumé » (Ibid., p. 265).
[132] « l’immersion dans un bain d’eau glacée leur était familière » (Ibid,. p.263).
[133] PGG, dossier 1 p. 67.
[134] PGG, dossier 11, p. 9.
[135]
« Mon mari a répondu en souriant qu’on n’était pas,évidemment,détenteurs d’explosifs […].J’ai répondu pareillement,que je ne comprenais pas du tout ce qu’il voulait dire » (PBL, 7, p. 52, déposition de Mme Marceron).
[136] Ibid, p. 55, déposition de Mme Marceron.
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L’action de la Police allemande en France occupée.
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