et régime politiqueAvec ce qu’il faut désormais appeler l’ « affaire Guéant », nous nageons
en plein confusionnisme.
D’abord parce que Monsieur Guéant a confondu « Civilisation »
et régime politique, ce qui, convenons-en, n’est pas tout à fait la même chose…
Ensuite, parce que la gauche dénonce des propos inscrits dans l’exacte ligne
de ceux jadis tenus par Victor Hugo, Jules Ferry, Léon Blum ou encore Albert Bayet.
Pour ces derniers, il existait en effet une hiérarchie entre, d’une part
les « peuples civilisés », c'est-à-dire ceux qui se rattachaient aux Lumières
et à l’ « esprit de 1789 », et d’autre part ceux qui vivaient encore dans
les ténèbres de l’obscurantisme.
Jules Ferry déclara ainsi devant les députés le 28 juillet 1885 :
« Il faut dire ouvertement qu’en effet, les races supérieures ont un droit vis-à-vis
des races inférieures ; mais parce qu’il y a aussi un devoir.
Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures ».
Quant à Léon Blum, le 9 juillet 1925, toujours devant les députés, il ne craignit pas
de prononcer une phrase qui, aujourd’hui, le conduirait immédiatement
devant les tribunaux :
«Nous admettons le droit et même le devoir des races supérieures d'attirer à elles
celles qui ne sont pas parvenues au même degré de culture et de les appeler
aux progrès réalisés grâce aux efforts de la science et de l'industrie. »
Reconnaissons que Monsieur Guéant est bien loin d’avoir tenu de tels propos clairement racistes. La gauche ferait donc bien de balayer devant sa porte et si les représentants
de la « droite » avaient eu un minimum de culture, ils auraient pu, en utilisant
ces citations et bien d’autres encore, renvoyer le député Letchimy au passé de
son propre parti.
Le problème est que Monsieur Guéant est un universaliste pour lequel l’étalon maître
de la « Civilisation » est, selon ses propres termes, le respect des
« valeurs humanistes qui sont les nôtres ».
A ce compte là,effectivement le plus qu’un milliard de Chinois, le milliard d’Indiens,
les centaines de millions de Japonais, d’Indonésiens etc., soit au total 90%
des habitants de la planète, vivent en effet comme des « Barbares » ou
des « Sauvages».
Barbares et sauvages donc les héritiers de Confucius, des bâtisseurs des palais
almohades et de ceux du Grand Moghol puisqu’ils n’ont pas encore adhéré à
nos « valeurs humanistes », ces immenses marques du progrès humain qui
prônent l’individu contre la communauté afin que soient brisées les solidarités,
la prosternation devant le « Veau d’Or » afin d’acheter les âmes,
la féminisation des esprits contre la virilité afin de désarmer les peuples,
les déviances contre l’ordre naturel afin de leur faire perdre leurs repères.
Face à cette arrogance et à cet aveuglement qui constituent le socle de la pensée
unique partagée par la « droite » et par la gauche, se dresse l’immense ombre
du maréchal Lyautey qui, parlant des peuples colonisés, disait :
« Ils ne sont pas inférieurs, ils sont autres ».
Tout est dans cette notion de différence, dans cet ethno différentialisme
qui implique à la fois respect et acceptation de l’évidence.
Or, c’est cette notion de différence que refusent tous les universalistes.
Ceux de « droite », tel Monsieur Guéant, au nom des droits de l’Homme,
ceux de gauche au nom du cosmopolitisme et du « village-terre ».
Bernard Lugan08/02/12