Comme tous les ans,le 6 juin verra l'organisation de commémorations
du Débarquement allié en Normandie.
Je fais souvent remarquer que cette opération eut lieu à 6 heures du matin,
soit à la sixième heure (révolue) du sixième jour du sixième mois de l'année:666.
Refuse-t-on de prendre l'heure en compte? Alors je noterai que l'arrivée
des troupes alliées,est survenue le sixième jour du sixième mois
de la 6ème année de guerre:666 encore.
On me répondra,avec raison,que cet horaire a été imposé pour des raisons
purement accidentelles,en premier lieu la météo.
J'en conviens.Mais la Providence se sert toujours des circonstances
sans rapport avec l'évènement pour se manifester.Retournez le problème
dans tous les sens,regardez à droite et à gauche,le fait demeure:
le nombre de la Bête est omniprésent dans la date du Débarquement.
Car je pourrais ajouter 1+9+4+4=6+6+6.Diable,c'est le cas de le dire....
cela fait beaucoup !
Autre fait capital:l'opération a été accompagnée d'intenses bombardements
qu'on ne saurait comparer à ceux réalisés par les Allemands lors de la
Blitzkriegde mai-juin 1940.Cette fois,il ne s'agissait plus d'attaques chirurgicales visant
les seuls objectifs purement militaires (même si,comme toujours,des erreurs
peuvent être commises et des civils touchés),mais de tapis de bombes déversés
un peu partout afin de paralyser la vie de la région et,ainsi,de gêner l'ennemi.
La moindre gare,la moindre garnison,la moindre présence de véhicules allemands
valait à l'agglomération d'être écrasée par une vague de bombardiers.
Le cas de Coutances,dans la Manche,est typique,la ville n'offrant aucun intérêt
stratégique,l'immense majorité des habitants y était restée.Mal lui en prit.
Les stratèges alliés ayant cru y déceler un objectif militaire,les forteresses
volantes y semèrent la mort et la désolation.
Le drame le plus poignant fut celui de cette jeune fille dégagée trois jours
plus tard d'une cave par des Allemands revenus déblyer.
Son père,sa mère,ses frères et ses soeurs étaient morts dans ce sous-sol
dont l'entrée avait été obstruée par les bombes, la dernière communication
avec l'extérieur étant un soupirail.Seul survivante,elle avait dû appeler
à l'aide mais dans le sauve-qui-peut général,personne ne l'avait entendue.
Pendant trois jours et trois nuits,ainsi,elle était restée prise dans ce piège
avec les cadavres de ses proches.
Quand elle fut extraite de là,elle était devenue folle et mourut quelques mois
plus tard (Alexandre Caillet,
Le massacre de Coutances,auto-édité)
A Caen,les sauveteurs retrouvèrent une famille entière,parents et enfants,
morte dans une cave dont tous les accès avaient été obstrués.
Cette fois,il n'y avait aucun survivant.Mais le père avait décrit sur un feuillet
l'agonie des siens,la lente asphyxie de son épouse et de ses enfants
dans ce sous-sol saturé de monoxyde de carbone.
Dans ses dernières phrases,il se plaignait d'un mal de tête de plus en plus
insupportable,annonciateur d'une fin proche.Il avait achevé son récit
en demandant à celui qui le trouverait d'acquitter une dette d'argent
qu'il avait envers un proche.
J'ai glané cette information dans les souvenirs d'un jeune homme,
Rémy Streiff,qui avait fait partie des équipes de secours.
J'ai tenté de le retrouver,lui ou sa famille,afin de savoir où consulter ce feuillet.
J'ai mené des recherches dans les archives départementales.
Je me suis renseigné au Mémorial de Caen.En vain.Ce document exceptionnel
n'intéresse personne.Ah ! s'il s'était agi d'une famille juive victime
de la "barbarie nazie",s'il s'était agi d'une Anne Franck,ce petit feuillet
serait pieusement exposé dans un musée et des copies reproduites un peu partout.
Mais les morts étaient des Normands victimes des "libéra-tueurs",alors ce feuillet
est tombé dans les oubliettes de la Mémoire.
Aujourd'hui,ceux qui pénètrent dans le Monoprix du centre de Caen ignorent
qu'en juin 1944,un jeune scout d'une quinzaine d'années,membre des équipes
de secours,y fut mortellement blessé par une verrière qui,soudainement,se brisa.
Un énorme bout de verre lui transperça l'estomac.Il mourrut quelques jours
plus tard,heureux d'avoir accompli son devoir et édifiant tout le monde par
sa patience.Mais à la différence des FFI tombés ici ou là,aucune plaque
ne vient rappeler la mémoire de ce jeune héros.Aux oubliettes lui aussi.
J'ai longtemps arpenté Caen à la recherche de plaques ou de monuments
qui rappelleraient des drames précis,causés par ces bombardements aveugles.
Je me suis rendu dans différents lieux,théâtres d'évènements tragiques.
Je n'ai trouvé aucun signe commémoratif,non plus qu'à la clinique de la
Miséricorde.Dans cet établissement avaient été amenés de nombreux blessés
d'un premier raid allié.Lorsque les forteresses volantes revinrent semer la mort,
la clinique fut gravement touchée.Ce bâtiment moderne s'effondra et de nombreux
occupants se retrouvèrent coincés entre les dalles de béton.
Comble de malheur,un incendie éclata,qui se généralisa.
Dans cet atmosphère d'apocalypse,au milieu des cris et des plaintes,
secouristes et membres du personnel soignant qui avaient pu en réchapper
se démenèrent pour tenter d'arracher les malheureux aux flammes.R.Streiff était là.
Il raconte les efforts inouïs déployés pour tenter de déplacer les gravats voire
de percer les dalles de béton avec des outils de fortune afin de ménager les sorties.
En vain la plupart du temps.Parmi les drames,celui de cette femme dont les jambes
étaient coincées sous des gravats,deux religieuses infirmières la tiraient
désespérément par les bras car les flammes approchaient.
A un moment,la chaleur étant trop intense,elles durent se reculer et ne purent
qu'assister,terrifiées,à la mort de cette femme qui brûla vive.
Pénétrez aujourd'hui dans cette clinique,vous n'y trouverez nulle mention
de cette nuit tragique.Seul le cimetière voisin (le cimetière des Quatre-Nations)
a longtemps gardé le souvenir.
En 1994,encore,à l'entrée,deux ou trois rangées de tombes portaient la date
du 6 juin 1944,avec les noms de familles entières.
J'y suis retourné il y a peu et j'ai constaté que ces tombes étaient très dégradées.
Le souvenir s'estompe...
Cette gênz face aux victimes est très révélatrice.En effet,quand on évoque
ces bombardements,la réponse des bien-pensants est toujours la même:
"Que voulez-vous,on ne fait pas d'omelette sans casser d'oeufs."Cependant,si cet argument justifiait réellement la stratégie des Alliés,alors
il n'y aurait pas à avoir honte de ces civils français morts sous les bombes
anglo-américaines.Il faudrait au contraire les honorer comme des martyrs
inévitables de la "Libération".Des bâtiments détruits auraient dû être transformés
en monuments du souvenir,leur histoire aurait dû être écrite depuis bien longtemps
et les photos de corps publiés afin que les jeunes générations puissent bien
mesurer l'ampleur du sacrifice.
Or,c'est tout le contraire:alors qu'à Oradour-sur-Glane,le "village martyr" a été
conservé,la reconstruction en Normandie n'a quasiment rien laissé subsister.
Dans son ouvrage,déjà cité sur le "
massacre de Coutances",A.Caillet l'a regretté.
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