La loi de la beauté.Tout ce qui a pour nous une valeur éternelle se trouve soumis à des lois d'airain.
Même si nous voulions arrêter le cours des étoiles, elles poursuivraient leur route
d'après des lois éternelles, de même que la nature suit aussi la loi rythmée
de la naissance et de la mort.Les lois éternelles refusent le chaos, la décomposition
et la destruction de toutes les valeurs.
Bien avant que l'homme n'ait reconnu le bien fondé des choses, il obéissait déjà
à sa loi dans son activité créatrice.Celui qui a parcouru nos riches galeries d'art
avec recueillement comprend pourquoi les statues classiques en marbre des anciens
Grecs le frappent par leur charme autant que les plus belles oeuvres contemporaines.
Trois mille ans se sont écoulés sans entacher l'idéal de beauté animant les Grecs
et auquel nous témoignons également une admiration profonde.
A une certaine époque, il était de mode de considérer l'art comme quelque chose
de mort, ce que l'on colporte toujours aujourd'hui dans ces cercles ennuyeux qui
s'intéressent aux choses du
bel esprit Ils se préoccupent beaucoup du prétendu manque d'idées créatrices nouvelles
et cherchent ainsi à démontrer que les artistes de notre temps ne peuvent que
copier l'antique.
Mais aucun artiste créateur ne peut créer véritablement en s'écartant de la loi
classique de la beauté.Comme autrefois, la Vénus de Milo reste un idéal de formes
et les oeuvres immortelles d'un Michel-Ange ne cherchent pas à imiter celles
des grands maîtres grecs Polyclète ou Lysippe, mais sont des créations intuitives
faites d'après les lois éternelles de la beauté.
Léonard de Vinci fut le premier à avoir reconnu le principe de la beauté.
La formule du
nombre d'or lui a atribuée
b=b:(a+b).
Cela signifie que le corps humain, du sommet de la tête jusqu'au nombril, se trouve
soumis au même rapport de proportion que les autres parties inférieures, et
inversement avec le corps entier.Négliger la règle du
nombre d'or ne peut aboutir
à une nouvelle forme d'art mais bien à la négation de la loi de la beauté et ainsi
au chaos.
Rappelons-nous seulement ces
" révolutionnaires" qui se plaisaient
à nier le
nombre d'or .C'étaient les artistes dadaïstes et tous ceux
qui se comptaient à juste titre parmi les
"primitifs", et qui pensaient
être les précurseurs d'une nouvelle époque.Ce qu'ils nous ont laissé représente
des monstres et nullement des portraits humains dont la vue doit nous élever
et non pas nous horrifier.Quel peintre peut négliger impunément les règles
de la perspective sans produire des oeuvres factices que nous considérons
à juste titre comme un art dégénéré ?
L'architecte devra toujours prendre en compte deux éléments fondamentaux,
les parties porteuses et portées, afin de les assembler en un tout harmonieux.
En architecture également, on croyait devoir contredire les exemples classiques
en remarquant que la façade doit s'adapter à l'organisation de l'espace
et non l'inverse.
La construction fut divisée en deux parties opposées et incompatibles.
Mais l'art architectural réside dans le fait d'associer ces deux éléments
de façon harmonieuse.La dégénérescence des règles d'or s'exprime dans
ces maisons dont les murs ont des fenêtres asymétriques et de tailles différentes,
ce qui ne fait que prouver l'incapacité de ce style d'architecture qui croit pouvoir
omettre les lois de la beauté.
Il y a peu de temps, nos galeries d'art furent enrichies d'une pièce unique acquise
par le directeur:le discobole de Myron.Nous y constatons la présence de toutes
les lois de la beauté, y compris en ce qui concerne l'harmonie parfaite du corps.
Il est représenté à l'instant précis où il balance le disque pour le lancer ensuite.
C'est cet instant où deux mouvements différents se relayent:le balancement
du bras, le
point mort avant le lancer proprement dit.
On ne peut choisir au hasard n'importe quel instant se trouvent circonscrit
dans le mouvement.Qu'il s'agisse d'un cheval qui saute ou d'un homme qui court,
on peut toujours trouver un
point mort au sein des mouvements qui
composent l'action.
Aujourd'hui, nous connaissons la règle de la beauté régissant les oeuvres
artistiques, leur construction et la composition.Les artistes antiques ne
connaissaient certes rien de la formule du
"nombre d'or", mais un sentiment
artistique sain les guidait.
Pendant longtemps, on pensait qu'aucune loi absolue et éternelle régissait l'art.
On songeait au goût de l'époque et l'on croyait que chacune possédait son propre
idéal de beauté.On confondait ainsi l'art et la mode.Lorsqu'on visite une galerie d'art
où sont rassemblées les plus belles oeuvres des derniers siècles, on constatera
qu'il n'y en a pas une qui correspondait au
"goût du public", donc qui était
à la mode .
Nous sommes confrontés aujourd'hui à ce type d'oeuvre sans les comprendre,
car le spectateur doit ressentir au travers de la création ce sentiment qui
animait l'artiste lorsqu'il la créa.En effet, aucune oeuvre d'art ne peut être
comprise si on doit l'expliquer auparavant de façon intellectuelle.
Une oeuvre d'art parle pour elle-même, sinon ce n'en est pas une.
Et il remarquable que tous les
artistes qui, pour dissimuler leur incapacité,
suivent de nouvelles voies en croyant pouvoir ainsi se soustraire
aux lois de la beauté,sont hostiles à tout véritable art qu'ils considèrent comme poussièreux.
Ils essayent de mettrent à l'écart celui qui respecte les lois éternelles de la beauté
en le taxant de vulgaire imitateur de l'antique.
L'art donne tout à celui qui respecte ses lois.Lorsqu'on regarde aujourd'hui
un homme qui trempe et endurcit son corps par des exercices physiques,
il peut s'approcher de l'idéal et ressembler au discobole de Myron.
La beauté est une notion exactement tracée qui a prouvé sa raison d'être
au cours des siècles.Chaque ethnie nationale peut posséder son propre
idéal de beauté,
mais celui-ci reste unique et absolu pour cette ethnie nationale.
On voit donc que l'artiste aussi est lié à des lois d'airain dans sa liberté créatrice,
qu'il ne peut contourner s'il ne veut pas sombrer dans le chaos, la décomposition
et le bolchevisme culturel nihiliste.
L'oeuvre d'art, c'est la religion matérialiste.Wagner.