Rappel des faits :
Le 23 mars 1944, un attentat à la bombe perpétré par des partisans à dominance
communiste dans le centre de Rome,Via Rasella,contre une compagnie du régiment
de police de Bolzano faisait 320 morts et 110 blessés dans ses rangs,plus deux civils
italiens,dont un enfant,coupé en deux.
En représailles,le haut commandement décidait de mettre à mort 335 otages,
dont 75 juifs.
C'est Herbert Kappler, le commandant de la police militaire allemande de Rome
qui est chargé de l'exécution,assisté de son adjoint le capitaine Piebke
et du commandant Karl Hass.
Les condamnés seront abattus d'une balle dans la nuque.
C'est le "massacre des Fosses ardéatines".
Comment qualifier les faits ?
L'attentat de la Via Rasella, en pleine ville,aveugle,par des hommes sans uniforme,
et touchant des civils,était clairement contraire aux lois de la guerre et
à la convention de Genève.
Quelle que fût la noblesse éventuelle de leur cause,ceux qui l'ont commis étaient
objectivement des terroristes.
Plus grave,un tel acte en de telles circonstances engendrait forcément,
étant donné les usages de l'époque,des représailles sanglantes sur les civils,
ses auteurs ne l'ignoraient pas,puisque partout en Europe,la stratégie des groupes communistes était de provoquer des représailles par des attentats.
La première responsabilité,chronologique,fonctionnelle,et morale,du massacre
des Fosses ardéatines revient donc aux "résistants" coupables du massacre
de la Via Rasella.
Maintenant,la troupe allemande qui a exécuté les otages est aussi l'auteur
d'un acte horrible.
Est-ce un crime de guerre,ou un crime de la guerre ?
Les juristes peuvent en débattre,les philosophes aussi :
toujours est-il que Kappler fut condamné à la prison à vie par un tribunal
italien en 1947. Mais quid de Priebke ?
Il ne commandait nullement l'oprération.Une éventuelle condamnation
ne se comprendrait que s'il avait montré quelque "zèle" spécial,
cruauté particulière des moyens,acharnement caractérisé contre tel type d'otage.
Qu'n at-il été, et comment la justice a-t-elle jugé son cas ?
En 1948,il a fait l'objet d'un classement sans suite par une justice italienne
pourtant politisée et sensible à ce genre d'affaire.
Priebke a vécu ensuite 47 ans en Argentine,nullement caché,sous son nom.
Ce n'est qu'en 1995, les grands "criminels nazis" se raréfiant que les fils
de la mémoire (en l'espèce Beate Klarsfeld) se sont avisés de lui.
Extradé vers l'Italie le 20 novembre,il était jugé par un tribunal militaire.
Le procès dura trois mois,vingt-cinq audiences,et chacun des vingt avocats
des plaignants eut tout loisir d'interroger le prévenu.
Le verdict tombait le premier août 1996 au soir :
Priebke était libre.
Le cas était donc clair: l'accusé était un soldat allemand qui avait procédé
sans surcroît d'horreur à des représailles horribles contre un crime horrible
dans une guerre horrible.
Las,les bien-pensants,et la communauté juive, ne l'entendaient pas de cette oreille.
Le maire de Rome fit éteindre l'éclairage public,et de jeunes vengeurs assaillaient
le tribunal,avec à leur tête Ricardo Pacifici,qui est devenu depuis le très actif
président de la communauté juive de Rome. Cela crie:
" Personne ne sortira d'ici si Priebke ne sort pas menotté.Il faut qu'il aille
dans une prison civile car la justice militaire on n'en veut plus".Au lieu de faire marcher les carabiniers pour dégager cette tourbe,
la justice se barricade dans son temple et appelle son ministre.
Celui-ci (il s'appelle Flick,comme l'adjudant,cela ne s'invente pas) arrive à minuit,
confère,et convoque la presse à une heure.
Sa décision : Priebke ne peut être libéré !
On a bien lu: sous pression d'une certaine foule,le ministre annule souverainement
la décision qui vient d'être rendue par les juges au nom du peuple italien.
Le reste n'est plus qu'une affaire de temps,c'est Dreyfus à l'envers,
l'innocent va devenir coupable au fil des révisions.
En octobre 1996, le verdict d'août est annulé.
Le 22 juillet,à la suite d'un nouveau procès,le prévenu est condamné à quinze ans
de prison,ramenés à cinq en raison de son âge (il a 84 ans).
Ca ne va toujours pas,mais c'est comme dans les référendums sur l'Europe,
il suffit d'insister pour obtenir le bon résultat:
- en janvier 1998 s'ouvre le procès d'appel qui condamne Priebke,
le 16 novembre,à la réclusion criminelle à perpétuité.Enfin !
(Mais comme on est en Italie,la détention à domicile est autorisée à partir de 1999,
et les gens bien informés assurent même qu'ils l'ont vu sortir pour faire des courses
à partir de 2009,il avait 96 ans.)....