Les Espérances planétariennes, un livre à lire et à faire lire
http://www.voxnr.com/cc/d_entretiens/EEkluuVuZpvImtnBIU.shtmlEntretien LLJ :
Hervé Ryssen, Vous venez de publier un gros livre avec un titre
un peu mystérieux. Pourriez-vous nous expliquer de quoi il retourne ?
HR : C’est très simple. J’ai analysé de très près la littérature et la philosophie « cosmopolites », c’est-à-dire, qui aspire à la suppression des frontières et à l’unification du monde. Je me suis rendu compte que le terme « espérance » revenait assez régulièrement dans les textes, et correspondait parfaitement à ce que je voulais démontrer. Quant au terme « planétarien », c’est un néologisme qui signifie très exactement ce qu’il veut dire. Je l’ai préféré à « mondialiste », qui est aujourd’hui trop empreint d’idéologie.
LLJ : Que vouliez-vous démontrer ?
HR : Je voulais démontrer que la société multiculturelle n’est pas
tant un phénomène naturel que le résultat d’un discours idéologique inlassablement ressassé depuis des décennies.
Ce discours planétarien a encore gagné en vigueur depuis la chute
du Mur de Berlin, et aujourd’hui, toutes nos têtes pensantes, communistes
ou démocrates, s’accordent à penser que le gouvernement mondial
est un idéal à atteindre.
Ainsi, les années 90 ont vu une exceptionnelle floraison de produits
culturels affichant un cosmopolitisme débridé.
Les ouvrages de Jacques Attali, Alain Minc, Alain Finkielkraut, Marek Halter, Guy Sorman, Pierre Bourdieu, Jacques Derrida, Edgar Morin, Albert Jacquard, BHL, Guy Konopnicki, pour n’en citer que quelques-uns, sont particulièrement éloquents à cet égard.
On y appelle très clairement au métissage généralisé et à la dissolution
des nations.
Un exemple assez amusant :
Prenez le livre de Jacques Attali intitulé :
Le Dictionnaire du XXIe siècle, et sélectionnez les passages nous engageant dans cette voie planétarienne ; mettez tout ça dans l’ordre, et vous obtiendrez un résultat assez comparable à un texte sulfureux imprimé en Russie au début du XXe siècle.
C’est très étonnant, mais le résultat est encore beaucoup plus fort lorsque
l’on se rend compte que le discours est similaire chez les dizaines
d’auteurs que j’ai pu décortiquer, qu’ils soient de nationalité française,
russe ou américaine, ou encore chez les auteurs allemands ou viennois
du début du siècle (Einstein, Hannah Arendt, Freud, Stefan Zweig,
Joseph Roth, etc.). Les concepts, la mentalité, les pirouettes intellectuelles,
les contorsions idéologiques sont exactement les mêmes d’un auteur à l’autre.
LLJ : Quels sont les grands thèmes abordés dans votre livre ?
HR :
J’ai commencé par présenter la face scientifique de la grande idée planétarienne : depuis la découverte d’un squelette d’australopithèque
datant de trois millions d’années dans la région des grands lacs africains
, il est admis que tous les hommes du monde descendent d’un ancêtre commun, et que Lucy – c’est ainsi qu’on l’a nommée – est la grand-mère
de l’humanité. Dès lors, il est de bon ton, dans la cour des lycées
de se déclarer « africain », en attendant d’être « chinois » ou
« turco-mongol », le jour où l’on fera d’autres découvertes.
Il faut dire que cela permet aussi de ne pas prêter le flanc
à de terribles accusations.
Autre révolution de première importance : depuis février 2001,
le décodage du génome humain nous prouve que les races n’existent pas
et que tous les hommes sont des frères.
C’est en tout cas ce que tient à nous dire le professeur Axel Kahn.
Ces thèmes corroborent évidemment l’idée d’unification du monde.
Après avoir décrit l’idéal planétarien (le village global, le nomadisme, l’apologie du métissage, la destruction de la famille “patriarcale”, etc.),
il fallait aborder la méthode planétarienne :
On voit ici en pleine lumière l’immense mépris dans lequel les auteurs cosmopolites tiennent les cultures traditionnelles des sédentaires.
Dans ce domaine, Bernard-Henri Lévy se distingue particulièrement,
mais il est suivi de très près par Daniel Cohn-Bendit et Alain Minc.
Le thème de la culpabilisation fait bien évidemment l’objet d’un chapitre
à part entière, tout comme l’immigration, qui est aujourd’hui l’arme
la plus efficace dans la guerre à mort que l’Empire global mène contre
les résistances ethniques.
Bien évidemment, je prends appui dans ma démonstration
sur des centaines de citations.
Je m’étonne d’ailleurs que ce travail de débroussaillage n’ait jamais
été effectué jusqu’à présent.
LLJ : Vous n’avez pas abordé la question européenne ?
HR : Si, si, bien sûr. Là encore, en lisant Jacques Attali, entre autres, on s’aperçoit que nos intellectuels avaient déjà écrit qu’ils considèrent
que cette construction est un marchepied vers le gouvernement mondial. C’est écrit en toutes lettres, et il n’est nul besoin d’aller chercher
ces considérations dans les vieux textes d’avant-guerre.
Bien entendu, j’ai eu l’immense plaisir de conclure ce chapitre
avec la baffe géante du référendum du 29 mai 2005.
Permettez moi une petite anecdote : lors d’un débat télévisé,
Cohn-Bendit, fou de rage, avait insulté Philippe de Villiers de la manière
la plus outrageante.
Que ce dernier n’ait pas relevé l’offense est une faiblesse bien pardonnable sur un plateau de télévision., car après tout, il vaut mieux passer
pour un martyr, aux yeux des électeurs, que pour un homme violent
et impulsif. Mais les transports de haine de Cohn-Bendit m’ont paru
très révélateurs. Il faut comprendre, en effet, que les gens comme
Cohn-Bendit vivent fébrilement l’époque que nous vivons.
Tout leur paraît favorable aujourd’hui, et ils s’imaginent que l’humanité
est enfin à la porte d’entrée des temps messianiques.
Il faut savoir que dans la tradition mosaïque, l’arrivée du Messie
se confond avec l’unification du monde et la disparition des conflits,
qu’ils soient nationaux ou sociaux. Ici encore les textes sont très explicites (Emmanuel Lévinas, Jacob Kaplan, George Steiner, etc.)
Par conséquent, le NON des Français au référendum a littéralement
fait capoter une étape essentielle qu’attendaient impatiemment les esprits planétariens.
Mettez-vous à la place de Cohn-Bendit : il attend le Messie depuis 3000 ans ; on lui dit enfin qu’il va arriver, qu’il est là, au coin de la rue, qu’il approche,
et puis plouf ! tout s’effondre parce qu’une poignée de résistants, d’abrutis réactionnaires qui ne comprennent rien à rien, ont préféré leur vulgaire
liberté tribale à l’ouverture des temps messianiques.
Avouez qu’il y a de quoi enrager !
LLJ : Vous voulez dire que c’est l’attente du Messie qui détermine
les actes et les idées des intellectuels cosmopolites ?
HR : Je ne parle ici que des intellectuels juifs.
Pour eux, assurément, c’est la question essentielle.
C’est précisément ce point qui constitue la question centrale de l’esprit mosaïque dans la mesure où elle se confond avec l’idée d’unification planétaire.
Il faut comprendre que les intellectuels juifs vivent dans cette attente,
et c’est cette tension permanente qui donne un sens à leurs actes
et à leurs propos.
Il est très rare qu’une œuvre, chez eux, soit une production neutre.
A travers tous les livres que j’ai pu éplucher, à travers les nombreux films que j’ai pu analyser, je me suis rendu compte que leurs productions étaient toujours empreintes d’idéologie messianique.
Ce qui ressort de tout cela, assurément, c’est que l’avènement du monde nouveau passe par la destruction du catholicisme et du monde européen.
Il faut avoir lu les travaux de Wilhelm Reich et les ouvrages
des “freudo-marxistes” pour comprendre jusqu’où peut aller cette rage
de destruction. Le thème de la “vengeance” se retrouve d’ailleurs
aussi bien dans les textes religieux du XVIe siècle que chez certains romanciers contemporains comme Albert Cohen.
Ce sont ces permanences qui m’ont frappé le plus.
Elles traversent les siècles, se transmettent sans prendre une ride d
e génération en génération. Il n’y a rien de secret là-dedans, et d’ailleurs, la totalité des livres à partir desquels j’ai travaillé se trouvent
dans les bibliothèques municipales de la Ville de Paris.
LLJ : Comment vous est venue l’idée de vous plonger
dans toute cette littérature ?
HR :
J’ai écrit ce livre un peu par hasard, après avoir découvert le livre
de
Soljénitsyne (Deux Siècles ensemble) paru en 2003,
qui met en relief le rôle du “petit peuple” dans la révolution bolchevique. Comme j’ai été moi-même un fervent “bolchevik” pendant mes années universitaires, je me suis étonné de n’avoir pas été au courant
de cet aspect de la question. J’ai alors repris un par un les grands
livres traitant de “soviétologie”, et je me suis aperçu qu’en réalité,
tous les grands historiens (Stéphane Courtois, François Furet, Ernst Nolte, entre autres) ont soulevé le problème, mais de manière très anecdotique. Cette question forme la deuxième partie du livre, que j’intitule :
La fin d’un rêve messianique.
La troisième partie, qui est aussi importante que la première,
traite de l’explication de l’antisémitisme par les Juifs eux-mêmes
et de la mentalité cosmopolite en général, ainsi que de certains
problèmes d’actualité : l’antisémitisme noir, la mafia, les grandes escroqueries de ces dernières années, qu’elles soient financières
ou intellectuelles, les “boursouflures médiatiques”, etc.
LLJ : Vous avez conscience, j’espère, que vous vous attaquez
à forte partie ?
HR :
C’est amusant que vous disiez cela : c’est exactement l’expression
que le romancier Patrick Modiano met dans la bouche de l’un
de ses personnages ! Mais je vais vous dire une chose :
je ne m’attaque à personne.
Je me contente d’analyser assez froidement ce que je découvre ici et là.
Si la vérité aujourd’hui tombe sous le coup de la loi, le devoir du juge,
en tant qu’homme de lois, est assurément de la condamner.
Mon devoir à moi, en tant qu’homme de lettres, est de l’écrire.
De mon point de vue, tout est donc parfaitement en ordre de ce côté-ci, d’autant que je me contente de mettre en forme ce que d’autres ont exprimé. En revanche, je pense que le problème se situe en amont, si je puis dire :
je pense en effet qu’il ne devrait pas être permis de nous laisser insulter
chez nous, dans notre pays.
Quand M. Bernard-Henri Lévy écrit que la culture « terroir-bourrée-binious » l’ « écœure », comme il le dit si bien, il faut ou lui infliger une très forte amende, proportionnelle à ses revenus colossaux.
Je vais trop loin, quand je dis cela ?
Les Espérances planétariennes, 432 pages ; 19,90 euros franco. Commandes à Éditions Baskerville, (SDE Domiciliations)
14 rue Brossolette, 92300 LEVALLOIS
Chèques à l’ordre de HERVE FRANÇOIS (en majuscules, sans rien ajouter)